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Poches -> Littérature |
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Enfance, adolescence, jeunesse… 1900-1927 | | | Julien Green Souvenirs des jours heureux J'ai lu 2011 / 6,70 € - 43.89 ffr. / 283 pages ISBN : 978-2-290-01476-9 FORMAT : 11cmx18cm Imprimer
Si lon en croit léditeur, ce livre est resté plus ou moins inconnu jusquen 2007, date à laquelle on a retrouvé le manuscrit, traduit de langlais par lauteur lui-même qui lavait écrit en 1941-1942 alors quil était en exil aux États-Unis. Si lon sintéresse à luvre de Julien Green (1900-1998), on sait quil existe déjà une autobiographie écrite en 1974, intitulée Jeunes années. On peut donc imaginer que ce curieux ''nouvel'' ouvrage ne soit qu'une redite ; il nen est rien, mis à part deux ou trois événements connus de la biographie de lauteur. Plus dépouillé que cette dernière, le présent ouvrage retrace les grandes étapes de la jeunesse de lécrivain.
Ce récit (et non un roman comme il est indiqué sur la couverture) tranche un petit peu avec les autres essais autobiographiques de l'auteur car cest le livre dun réfugié de 42 ans, un homme encore jeune qui décide de revenir pour la première fois sur son enfance parisienne. Le style y est à la fois très relâché et direct. Sans se passionner toujours pour le propos de l'auteur, on ne peut qu'être extrêmement attaché à son caractère sensible. Green est peut-être lun des rares écrivains ayant écrit sur lui-même (romans dinspiration personnelle, essais, autobiographie, et un journal intime colossal relatant près de quatre-vingt années) que lon ne peut taxer de narcissisme ; il fait avant tout uvre de littérature. En bon mémorialiste du XXe siècle, Green sattache en effet aussi bien aux descriptions dun monde quaux portraits de ses contemporains, non sans passer par une âpre analyse psychologique de sa propre personne.
Ces mémoires ne dérogent pas à la règle. Julien Green est un parisien américain. Ce sont les années davant-guerre qui sont décrites dans un premier temps. La vie de famille à Passy, la scolarité au lycée Janson de Sailly, les rêves du jeune écolier, puis la guerre et l'engagement volontaire pour la Croix Rouge, enfin, ses études à Savannah puis le retour à Paris et le projet de devenir peintre. Vient ensuite la consécration avec son premier ouvrage, Pamphlet contre les catholiques de France (1924) qui révèle un talent décrivain. Mont-Cinère (1926) puis Adrienne Mesurat (1927) lui permettront assez rapidement de vivre de sa plume. Tous ces faits sont merveilleusement décrits déjà dans son autobiographie. Ici, on est dans lesquisse, la narration, lévocation. On assiste au parcours du jeune écrivain avec attention, déjà porteur de luvre à venir. Sa relation impossible avec Marc, quand il étudie à Savannah, n'est pas évoquée ici.
Outre ce retour à la jeunesse de Green, ce récit offre pour intérêt de réaliser la distance nous séparant de l'époque où il fut enfant, un temps révolu. Cent ans ont passé et nous séparent d'un temps où les cancres récitaient du Virgile, où les voyous jouaient leur réputation aux billes, où les jeunes peintres rencontraient dans la minute Matisse ou Mike Stein, où lon était accepté dans les salons de Cocteau, où lon hésitait à 20 ans entre Grasset et Gallimard bien avant décrire le moindre mot ! Malgré la grande tuerie de 14/18 et la perte de certains proches, le jeune Green évolue dans un univers à sa convenance, où les grandes dualités sont dans la psychanalyse, dans lart et la politique. Les crises financières, telles quil les raconte, ne durent quune journée et demie !
Figure importante du siècle passé, Green le rêveur, le flâneur solitaire, homme discret mais écrivain prolifique, propose ici une première ébauche de ce qui sera son uvre autobiographique. Un retour sur sa prose permet de ne pas loublier, et de plonger dans un univers à la fois calme et tourmenté.
Jean-Laurent Glémin ( Mis en ligne le 04/04/2011 ) Imprimer
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