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Poches -> Littérature |
| Michka Assayas Exhibition Gallimard - Folio 2004 / 6.60 € - 43.23 ffr. / 382 pages ISBN : 2-07-031535-5 FORMAT : 11x18 cm
Première édition : Gallimard, 2002. Imprimer
Philippe, le personnage principal dExhibition, est un quadragénaire désabusé et mal dans son époque (la nôtre). Certes, il a par le passé été un jeune homme enthousiaste. Marqué par le punk, les mouvements alternatifs et le gauchisme jouisseur des années 70, il a collaboré durant son adolescence à plusieurs fanzines rock, trouvant par là à exprimer son érudition musicale. Mais à quarante ans, Philippe na jamais tâté de la vie active, préférant gérer chichement un héritage. Il mène une existence morne à Gif-sur-Yvette, pimentant ses journées de connexions au Minitel rose et de rituels sadomasochistes pitoyables. Finalement, une radio commerciale fera appel à Philippe pour «fournir du contenu» au «support papier» quelle projette de lancer.
Exhibition évoque linadaptation aux valeurs majoritaires de lère du vide. Philippe fait le constat que lépoque a fait de lironie la qualité suprême ; un individu moderne se doit dadopter en toute circonstance le ton du décalage, sous peine de se voir sévèrement marginalisé. Hélas, cette dérision masque un bon gros cynisme, dobédience essentiellement libérale, qui ne peut que mener les hommes lucides à lapathie. Conséquence : Philippe peine à trouver sa véritable identité, dautant que ses amis de jeunesse sont devenus des étrangers pour lui. Même son mariage et sa paternité semblent lui échapper et nêtre quune forme de pis-aller. La mort de lesprit de sérieux le contraint à nêtre que spectateur de sa propre vie.
On a tendance à voir son empreinte partout, mais il y a du Houellebecq chez Assayas, dabord par la nature des thèmes (lentreprise perçue comme un champ de bataille, la misère sexuelle, le dégoût face une société cachant sa vacuité derrière une ironie perpétuelle), ensuite par le recours à un ton pince-sans-rire souvent très drôle. Roman générationnel et pessimiste, bourré de références musicales, Exhibition constate la disparition de lesprit de sérieux, et prend acte de la nature affreusement résignée de la génération qui succède à celle du narrateur. Pour autant, le ton nest pas geignard, et Assayas na pas écrit un roman de barbon nostalgique à la Finkielkraut. Mais on conçoit que lorsque lon a fantasmé sur Clash ou Joy Division, lidée que Star Academy représente une forme didéal soit un peu difficile à avaler.
Olivier Cleuet ( Mis en ligne le 30/07/2004 ) Imprimer | | |
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