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Poches -> Littérature |
| Paul Auster Je pensais que mon père était Dieu - et autres récits de la réalité américaine Le Livre de Poche 2004 / 8.50 € - 55.68 ffr. / 542 pages ISBN : 2-253-10954-1 FORMAT : 11 x 18 cm
Ouvrage paru en 2001 (Actes Sud). Anthologie traduite de l'américain par Christine Le Boeuf.
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"Les histoires n'arrivent qu'à ceux qui sont capables de les raconter" affirme Paul Auster, dans La Chambre dérobée (in la Trilogie new-yorkaise, Actes Sud). Pourtant, lorsquen mai 1999, Daniel Zwerdling lui propose de lire chaque mois une nouvelle sur les ondes de Radio NPR, lécrivain songe avec lassitude quil a déjà assez de travail et aucune envie de "mouliner des récits sur commande". Il sesquive poliment en promettant de réfléchir. Cest son épouse et inspiratrice habituelle, Siri, qui lui offrira le soir même une brillante idée : "mets les gens à la tâche, quils écrivent leurs propres histoires et ensuite tu liras les meilleures à la radio".
La consigne est lancée : des histoires vraies, courtes, pas de restrictions quant au sujet ni au style. A sa grande surprise, Auster en reçoit quatre mille et découvre très vite laspect singulièrement gratifiant de lentreprise : cette avalanche danecdotes, de coïncidences troublantes, de récits burlesques ou poignants reconstitue sous ses yeux le portrait en mosaïque dune "autre Amérique". Profondément vivante, marquée par les grands événements de lhistoire comme par les abîmes incompréhensibles des destins individuels. Le credo du projet (et du livre qui en est issu aujourdhui, regroupant les cent soixante-douze meilleurs récits) peut se résumer en une seule phrase, dit Paul Auster, elle-même empruntée à la lettre dun participant : "nous navons jamais été parfaits, mais nous sommes réels".
Oui, bien réel, cet homme comiquement "terrassé par son manteau" lors dun premier rendez-vous avec une femme trop séduisante ; savoureux, le "mystère des tortellinis" qui scelle lattachement dun couple ; tristement vraisemblable - mais transfigurée par le talent de la narratrice - cette lente dérive alcoolisée dune famille après lassassinat de la mère par un rôdeur. Un autre meurtrier cherchera désespérément comment ne pas avoir à tuer sa victime
Quant à limpunité du meneur cagoulé du Ku Klux Klan, elle ne résistera pas longtemps à lirruption de son célèbre corniaud, surgi dune ruelle pour lui faire la fête: toute la communauté, terrorisée linstant davant, sera bientôt secouée de rire devant le défilé
qui marquera évidemment la déconfiture de la sinistre confrérie dans le village.
Je pensais que mon père était Dieu nest donc pas, à proprement parler, un "nouveau Paul Auster", comme il a été annoncé partout, mais une anthologie composée par lécrivain. Et cest pourquoi elle répond bien à son univers où lhallucination nest jamais très loin, où la quête de lidentité nécessite de se soumettre à détranges péripéties. Une belle lecture, qui peut se goûter à petites lampées, comme on savourerait un recueil de contes surprenants et décalés.
Isabelle Nouvel ( Mis en ligne le 02/10/2004 ) Imprimer
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