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Poches -> Littérature |
| Richard McCann La Mère des chagrins Seuil - Points 2008 / 6.50 € - 42.58 ffr. / 245 pages ISBN : 978-2-7578-0821-4 FORMAT : 11,0cm x 18,0cm
Traduction d'Anne Damour. Imprimer
Elle aurait aimé sappeler Maria Dolores, la Mère des chagrins. Elle souffre davoir trop vécu, elle a en elle cette nostalgie envahissante qui la ronge tous les jours. Sur sa table de chevet, les souvenirs dune vie passée : le poudrier de Chérie sa mère adorée, des livres, toujours les mêmes, lui rappelant ses velléités de devenir écrivain.
Son fils, interdit, voit en elle une icône, lincarnation de la féminité. Elle, avec ses fourreaux passés de mode, ses robes impeccablement repassées, le Shalimar imprégnant latmosphère. De son enfance, il garde en lui ces moments de volupté, cette allégresse journalière découter sa mère lui raconter toujours les mêmes histoires. Elle devient ce tout, cette envie, cette promiscuité. Son frère et son père sont des personnages secondaires, presque intrusifs. Pourtant, il se souvient de cette nuit, celle où son père est mort dune hépatite, de son enterrement avec les honneurs militaires, mais surtout de la présence théâtrale de sa mère. Car, elle est entière, superbement hystérique et incroyablement suave.
Mère des chagrins, elle est ce personnage ambivalent, celui qui inspire. Na-t-il pas passé des heures durant à se déguiser avec les habits de sa mère, prémisse de son homosexualité ? Nest-ce pas la volonté inconsciente de devenir elle, de la posséder un peu plus chaque jour ?
Il y a de la souffrance sourde dans La Mère des chagrins, celle du temps révolu, ce temps que lon pensait éternel. Le narrateur a pourtant un langage tout de bienveillance et dironie ; comment ne pas sourire en se souvenant des abris atomiques qui pullulaient dans les années cinquante ? Mais lauteur pardonne la naïveté, la subjugue par ce portrait de femme fascinante et déroutante. Même si le style (ou la traduction) est parfois entachée de quelques faiblesses, La Mère des chagrins est un roman plein de ce charme désuet, que lon aime tant.
Catherine Martinez-Scherrer ( Mis en ligne le 25/06/2008 ) Imprimer | | |
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