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Bande dessinée  ->  Manga  
 

Gekiga
Yoshihiro Tatsumi   Coups d'éclat
Vertige Graphic 2003 /  12.00 € - 78.6 ffr. / 110 pages
ISBN : 2-908981-81-5
FORMAT : 17 x 24 cm

Préface d'Adrian Tomine
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Le nom de Yoshihiro Tatsumi ne vous dit peut-être rien ; pourtant, cet artiste fut à l’origine d’un nouveau style de manga, créé en 1957 et baptisé gekiga. Ce mouvement se voulait en opposition avec le manga traditionnel, à but essentiellement divertissant, et proposait pour la première fois aux lecteurs des bandes dessinées à l’univers violent et désespéré : «Nos aînés nous avaient enseigné que la bande dessinée était comique, usant d’ellipses, de déformations, d’amplification des expressions ou des attitudes, de gags. Il s’agissait de faire rire les lecteurs. Nous ne voulions plus de cela (…). Nous nous adressions à des lecteurs mûrs, en mesure de comprendre.»

Coups d’éclat est l’illustration parfaite de cette nouvelle façon d’aborder le manga : il s’agit en fait d’une succession de petites histoires, très courtes en général, véritables tranches de vie prises sur le vif. On y découvre des «héros» cassés, désabusés et souvent seuls, parfaitement incapables de s’adapter aux réalités de la vie quotidienne. C’est ainsi qu’on retrouve, aux détours de ces nouvelles animées, des personnages aussi meurtris qu’attachants, tel le vieux Hanayama, employé proche de la retraite pour qui finir sa vie en tête-à-tête avec son acariâtre d’épouse relève du cauchemar ; ou encore ce jeune auteur de manga en mal d’inspiration, dont la principale occupation est la lecture des graffitis dans les toilettes publiques. Bref, c’est un quotidien médiocre que nous présente Tatsumi, au réalisme désespéré, magnifiquement mis en image par un esthétisme qu’il définissait de la sorte : «Nous nous sommes (…) intéressés au rendu de la réalité, contenant l’expression graphique dans son style, développant à travers le dessin ce que nous voulions faire entendre, nous attachant aux mouvements, plaçant sous les lumières du premier plan des personnages en buste dont on pouvait saisir les émotions sur le visage, cherchant à rendre compte de leur état psychologique.»

Cet univers de résignation, jalonné de thèmes qui sont autant de leitmotive bien mornes – prostitution, injustice sociale, marginalisation et exclusion – se veut ainsi le reflet d’une certaine réalité, laissant de côté l’habituelle sublimation du monde environnant utilisée dans la BD japonaise : de par cette œuvre originale et puissante, Tatsumi donne au manga ses lettres de noblesse.


Océane Brunet
( Mis en ligne le 22/10/2003 )
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