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Bande dessinée -> Manga |
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Doit-on sauver des vies à n’importe quel prix ? | | | Syuho Sato Say hello to Black Jack (vol. 4) Glénat - Seinen manga 2005 / 6,40 € - 41.92 ffr. / 250 pages ISBN : 2-7234-4735-9 FORMAT : 13x18 cm Imprimer
Un drame terrible se noue au sein du service de néonatalogie où exerce Saitô, une fois de plus renvoyé à une épineuse problématique : les parents dun trisomique 21 refuse lintervention chirurgicale qui pourrait le sauver dune mort certaine. Persuadés du fait que leur enfant ne pourra vivre heureux et se sentant de tout façon ni le courage, ni la force de le prendre en charge, le jeune couple préfère reporter son affection sur son jumeau, exempt de toute pathologie. Hélas, ce dernier vient à mourir subitement. Désespéré, Saitô va alors tenter de convaincre les parents de signer lautorisation dopérer le petit handicapé, usant de stratagèmes proches du harcèlement moral. Mais face à lobstination du couple, le jeune interne est acculé à des solutions extrêmes : cest ainsi quil se met en tête de les déposséder de leur autorité parentale afin de réaliser lintervention salvatrice sans leur assentiment
Ce quatrième volet dune série qui sétait jusque là essentiellement penchée sur la difficulté dêtre médecin via le prisme de la hiérarchie et de la subordination excessive exercée au sein des grands centres hospitaliers, explore plus particulièrement ici les méandres nébuleux de la déontologie médicale. Saitô, toujours aussi naïf et impulsif, se montre ainsi sous un jour moralisateur et dramatiquement bien-pensant : animé par de bons sentiments parfois agaçants, ce fougueux apprenti médecin plein didéaux se retrouve vite grisé par sa fonction de soignant et, dans sa soif de justice, se révèle très intrusif dans la vie de ses patients. Persuadé de détenir une certaine forme de vérité, fort dune puissance toute relative sur des êtres en proie à des questionnements douloureux, Saitô tente dimposer à tout prix ses points de vue aux parents de lenfant quil sest mis en tête de sauver. Tour à tour menaçant, implorant, trépignant, le jeune homme ne trouve toujours pas la juste distance avec ses patients, aveuglé par ce quil estime être « bon » pour eux. Cet excès dempathie se révèle finalement destructeur et empêche Saitô daller de lavant, lentraînant à mettre en uvre des méthodes de persuasion plus que discutables.
En miroir, son aîné Takasago - qui offre de prime abord un contre-pied élégant à lattitude irréfléchie de linterne - nest pas fondamentalement très différent : rodé à une rhétorique qui relève parfois carrément dun sophisme éhonté pour convaincre ses patients, ce médecin bourru pousse la conscience professionnelle à lextrême. Figure ambiguë au sens du devoir surdéveloppé, Takasago se retrouve ici déchiré entre ses aspirations les plus profondes et ce que lui permet la loi, cest-à-dire très peu de choses.
Mais ce que lon apprécie peut-être justement chez les personnages de Syuho Sato, cest cette humanité faite de failles, de défauts irritants et de jugements à lemporte-pièce qui portent lintensité dramatique du manga à son climax. Loin dêtre de tout repos, les dialogues à bâtons rompus entre des protagonistes à fleur de peau et au bord de leffondrement lancent ainsi à chaque nouvelle page de multiples pistes de réflexion sur les grands tabous de notre société contemporaine.
Soutenue par un trait perfectionniste, la série dépeint par ailleurs un univers hospitalier très lourd et excessivement singulier, où se jouent des tranches de vie poignantes, et ce malgré les incursions répétées dune psychologie de bazar un peu facile. On pourrait ainsi reprocher à ce manga médical son côté bavard, ou encore son sens du happy end à la Walt Disney, mais se serait faire peu de cas de sa grande sensibilité et de sa parfaite retranscription dun milieu très spécifique et fascinant. À quand le semestre en gynécologie obstétrique ?
Océane Brunet ( Mis en ligne le 26/03/2005 ) Imprimer
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