| Aurélien Ducoudray François Ravard La Faute aux Chinois Futuropolis 2011 / 21 € - 137.55 ffr. / 152 pages ISBN : 978-2-7548-0199-7 FORMAT : 19,5x26,5 cm Imprimer
Louis Meunier est un artiste
un artiste du couteau, qui travaille aux abattoirs de lusine de poulet local. Une vie un peu terne, si ce nest la rencontre avec sa femme, Suzanne, la secrétaire du DRH, et la naissance de sa fille, Pauline. Heureusement, dans ce monde un peu blême, il y a aussi Jean Claude, le frère de Suzanne, stéréotype du beauf tout est lourd chez cet homme, de lallure aux blagues et aux magouilles diverses, le genre boute en train pénible, un peu louche, voire truand à la petite semaine
Trois personnages en quête despoir, de réussite, de reconnaissance. Pour Louis, consciencieux et sans états dâme, la reconnaissance passe par la diversification : des poulets, il passe aux bufs
et aux hommes, devenant, à ses heures perdues, un tueur réputé efficace. Bien sûr, Jean Claude est dans la magouille, et la petite famille se serre les coudes pour accéder à la classe moyenne. Mais lorsque la concurrence chinoise se précise, que le profit diminue et que le chômage sinstalle, la petite entreprise de Louis nest pas épargnée par la crise et, dans la famille comme dans latelier, il y a un plan de licenciement
à la sauvage !
Le Tueur, version banlieue triste et classe moyenne : le scénario imaginé par Aurélien Ducoudray oscille toujours entre le polar familial, lhumour noir et la fable sociale, et le lecteur passe des soucis domestiques et familiaux de Louis aux drames de la délocalisation, avec, en prime, quelques embrouilles sanglantes. Mais lidée qui fait le charme de louvrage, la trouvaille qui fonctionne, cest lamoralité absolue de Louis, qui tue aussi facilement des hommes que des poulets, sur qui tout semble glisser, lataraxie faite homme (jusquà ce que
). Un héros pas forcément sympathique, mais troublant, dense. A ses côtés, Jean-Claude et Suzanne campent des personnages normalement mesquins et médiocres, qui vont pousser le bon tueur à bout. Sur cette idée, François Ravard met en image un récit sépia, avec quelques belles pages. Rien de révolutionnaire dans la mise en scène ou dans le dessin, un peu trop obnubilé par les visages et les plans serrés, mais un graphisme solide, qui sait mettre en valeur les personnages, et plonger le lecteur dans lambiance terne de lusine de poulet. Une fable amusante, gentiment cynique, dans lesprit des romans de Jean-Patrick Manchette.
Gilles Ferragu ( Mis en ligne le 23/08/2011 ) Imprimer | | |