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London Calling
Alan Moore   Kevin O'Neill   La Ligue des Gentlemen Extraordinaires – Century (tome 1) - 1910
Delcourt - Contrebande 2010 /  14.95 € - 97.92 ffr. / 80 pages
ISBN : 978-2-7560-1137-0
FORMAT : 23x31,5 cm
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Après deux longues aventures et un Black Dossier (paru en 2007 mais jamais traduit en France pour de bêtes raisons de droits), la Ligue est de retour. On se souvient que l’équipe de 1898 avait été fortement démantibulée suite à l’invasion des tripodes extra-terrestres. L’Homme Invisible avait payé de sa vie sa traîtrise, mis en charpie par un Mister Hyde furieux. Nemo, dégoûté par l’Empire, souhaitait regagner la mer et son île. Mina Murray (Mina Harker de Dracula), la chef du groupe, partait vivre en Écosse dans une communauté de femmes. Quatermain restait seul, dans un Londres qui a bien changé.
Avec toutes ces défections, Alan Moore et Kevin O’Neill ont donc chercher d’autres personnages de la littérature populaire pour ce nouvel épisode. Une dizaine d’années à passé et l’on découvre une nouvelle Ligue, toujours au service de l’Empire Britannique et siégeant dans quelques salles secrètes du British Museum. Mina a repris du service, à la tête de sa troupe récemment constituée. Il y a d’abord Thomas Carnacki. Personnage créé par William Hope Hodgson en 1910, Carnacki est un enquêteur de l’occulte. Puis, A.J. Raffles (personnage de E. W. Hornung), est un gentleman professionnel, un Lupin à l’anglaise. Il y a ensuite Orlando. On avait découvert la vie de cet homme-femme immortel dans les pages du Black Dossier. Né à Thèbes en 1260 avant J.C., ce personnage aussi raffiné qu’énervant a côtoyé Jules César et Robin des Bois, croisé le chemin de dragons et de Merlin, a été l’amant de Sindbad, a posé pour La Joconde de De Vinci… Bref, un CV bien rempli. Et enfin, Allan Quatermain Junior, le fils de. Les lecteurs avertis et attentifs auront une idée plus précise de la véritable identité de ce dernier personnage.

Dans ce Londres parallèle de 1910, nous sommes à la veille du couronnement de George V. Carnacki fait des rêves étranges, et a la vision d’une grande catastrophe qui s’abattrait sur la ville. Il n’en faut pas plus pour que la Ligue se mette en marche. Au cours de leur enquête, ils vont croiser le chemin de la fille de leur ancien allié, le Capitaine Nemo. Janni vient en effet de quitter « l’île mystérieuse » pour rejoindre Londres. C’est dans un bouge de l’East End, que la jeune femme va se frotter à la violence des grandes villes. Mais qui sème le vent…

Avec intelligence et humour, Moore et O’Neill reviennent dans cet univers aux multiples variations possibles. Ils puisent dans le patrimoine culturel et historique quantité d’éléments pour donner de l’épaisseur à leur récit. Comme dans les précédents épisodes, Londres est mise à mal, saccagée par des ennemis extérieurs aussi bien que par des autochtones pas bien lunés. Les auteurs ne sont pas avares en scènes d’ultra-violence, donnant à ce qui pouvait d’abord ressembler à une agréable distraction (un peu comme le film tiré de la bande dessinée, complètement raté), une œuvre d’une grande puissance au discours d’une noire lucidité. Les chansons de L’Opéra de Quat’sous rythment l’ensemble. Les airs de Brecht et Weill faisant écho aux sombres épisodes qui se trament ici : « Mankind is kept alive by bestial acts. »

On peut choisir de lire cette série placidement, page après page, et puis passer à autre chose, ayant l’impression d’avoir lu un comics original, bien qu’un peu tordu et étrange. On peut aussi choisir de suivre Moore et O’Neill dans leurs investigations et devenir un lecteur-enquêteur. Ça n’est d’ailleurs pas un hasard si Moore, après des désirs de retraite, ne concentre finalement son travail d’auteur de comics pratiquement uniquement sur cette série. Lui qui a toujours manipulé les échos d’une planche à l’autre, les liaisons entre des vignettes distantes, il trouve dans cette saga aux multiples références et ramifications le terrain de jeu idéal pour élaborer ses constructions minutieuses. La Ligue multiplie en effet références, citations et clins d’œil divers. Certains trouveront la démarche stérile et trouveront qu’une œuvre qui ne se suffit pas elle-même passe à côté de son objectif. Les autres, armés d’une encyclopédie et de Wikipedia, dégusteront et décortiqueront comme il faut ces planches. La découverte n’en sera que plus ludique et stimulante, et l’univers de la Ligue, avec ses innombrables embranchements dévoilera peu à peu son incomparable richesse.

Deux déceptions toutefois avec ce nouveau cycle : d’une part, le dessin d’O’Neill a perdu en délire et démesure. S’il garde un certain brin de folie, il est d’une certaine manière plus sage, en accord avec un scénario cette fois plus influencé par Brecht que par Verne. Le second gros défaut vient des personnages eux-mêmes. Ces gentlemen n’ont rien de vraiment extraordinaires et font pâles figures face au souvenir de Hyde ou de Nemo. « Ce groupe est une pétaudière », s’indigne Mina. Preuve que Moore, contraint d’aller chercher des personnages de second plan pour ne pas contrevenir aux lois du copyright, est conscient qu’il ne peut ici pas rivaliser avec le charisme de ses anciens héros.
Après un Black Dossier plutôt ardu même si rempli de bons moments, ce troisième véritable volume des aventures de la Ligue reste malgré tout une grande réussite. Moore montre qu’il en a encore sous la plume et, par son écriture et ses idées (ici les passages façon « comédie musicale » et la distanciation façon Brecht appliquée au récit), continue de surpasser d’une bonne tête la plupart de ses collègues.


Alexis Laballery
( Mis en ligne le 23/02/2010 )
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