|
Bande dessinée -> Aventure |
| Jean Giraud Mister Blueberry (tome 28) - Dust Dargaud 2005 / 11 € - 72.05 ffr. / 72 pages ISBN : 2-205-05642-5 FORMAT : 22,5 x 29,5 cm Imprimer
Le cycle « Mister Blueberry » entamé voilà plus de dix ans avec lalbum éponyme, prend fin aujourdhui avec Dust, dénouement inégal mais malgré tout indispensable. Pour loccasion, Jean Giraud fait exploser le traditionnel format des 48 pages, hérité dune lointaine convention collective, et livre un ouvrage de 68 planches, dessinées en un temps record. Lépisode précédent, OK Corral, sachevait de façon brutale, juste avant le fameux duel historique entre les frères Earp et le clan McLaury & Clanton.
Dust souvre donc sur ce règlement de comptes resté dans la légende de lOuest. Usant dun montage nerveux et inspiré, Jean Giraud mène en parallèle le sauvetage de Dorée Malone des griffes de leffrayant Dragon Rouge, serial killer dérangé tout droit échappé dun livre de Thomas Harris. Ces quelques planches douverture sont magistralement menées, un pré-générique danthologie où Giraud fait preuve une fois de plus dun grand sens du rythme et de la mise en scène, basculant dune action à lautre avec aisance et maîtrise. Tout en contraste, la scène suivante, de lintime à ciel ouvert, rappelle les meilleurs moments de luvre dun John Ford.
La suite de cet épisode revient notamment sur la fameuse rencontre entre Blueberry et Géronimo que le lieutenant au nez cassé avait commencé à raconter à son biographe dans Ombres sur Tombstone. Première déception de lalbum, là où Blueberry promettait à son rapporteur une histoire à «vous faire dresser les cheveux sur la tête» (cf. OK Corral), la rencontre entre le Lieutenant et le chef Apache tourne vite court et la suite, certes originale et étonnante, reste en définitive très classique.
Cest dailleurs tout le cycle « Mister Blueberry » qui souffre de ces fausses promesses. En multipliant les personnages et les intrigues, en jouant un peu trop sur limprovisation inhérente aux lois du feuilleton, le Giraud scénariste a dû au final faire face à une quantité de fils narratifs, une pelote quelque peu emmêlée dont il fallait pourtant venir à bout. Avec quelques effets de manche et autres facilités plus ou moins maladroites (la fausse fuite de Dragon Rouge par exemple, ou comment faire retomber platement une course-poursuite qui sannonçait trépidante), Giraud réussit pourtant à atterrir sur ses pattes, et à clore son récit sans trop de casse. Bien sûr, le lecteur pourra être déçu, et les fans de Jean-Michel Charlier seront confortés dans leurs certitudes, mais laisser Dust sous le tapis serait malgré tout faire injure au remarquable travail de Jean Giraud sur lensemble de ces cinq derniers albums.
Car cet épisode marque la fin dun cycle épique et riche en moments danthologie. Il fallait du culot en effet, et beaucoup de talent pour laisser Blueberry, héros mythique et toujours prêt à partir à laventure, collé à sa table de poker le temps dun album entier. Il fallait du culot pour le laisser convalescent le reste du temps. Enfin, il fallait du culot pour mêler dans une même intrigue la grande Histoire, les légendes du Far-West, et celle non moins vivace de Blueberry. Avec ce cycle, Giraud échappe à lombre dévorante de Charlier et saffirme avec force auteur complet, à linstar de son double Moebius, loin dêtre « désoeuvré », mais bel et bien apaisé et conquérant, comme peut lêtre le lieutenant à la conclusion de Dust.
Alexis Laballery ( Mis en ligne le 25/04/2005 ) Imprimer
A lire également sur parutions.com:Mister Blueberry (tome 27) de Jean Giraud Mister Blueberry de Jean Giraud | | |
|
|
|
|