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Bande dessinée  ->  Adaptation  
 

Victor Hugo fait des bulles
Fernando de Felipe   L'Homme qui rit
Glénat - Grafica 2000 /  10.99 € - 71.98 ffr. / 62 pages
ISBN : 2-7234-2693-9
FORMAT : 23 X 32
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Fernando de Felipe tente avec L'Homme qui rit un pari ambitieux : celui d'adapter en une bande dessinée de 64 pages un roman qui en compte plus de 700. Il ne faut donc pas s'attendre à voir dans l'album une simple illustration de l'oeuvre de Victor Hugo : au contraire, il s'agit bien d'une interprétation libre et personnelle. Le scénario, le voici : un gamin de dix ans, victime de trafiquants d'enfants qui lui ont gravé sur le visage un rire perpétuel, est abandonné sur une côte d'Angleterre.

Après un long chemin où il trouve dans la neige un bébé que le froid a rendu aveugle, il est recueilli par un homme à la fois médecin et philosophe qui vit avec un loup. Dès lors, Ursus et Homo, Gwynplaine et Déa forment une famille unie. On les retrouve quinze ans plus tard, tournant de ville en ville pour présenter le spectacle de "l'Homme qui rit". A Londres, Gwynplaine est enlevé par les autorités, qui lui révèlent qu'il n'est pas un vagabond mais un pair d'Angleterre vendu à sa naissance par le roi parce qu'il était l'héritier direct des biens de son père.

Gwynplaine refuse pourtant sa nouvelle condition et part retrouver ceux qu'il aime, bannis de Londres. Mais il arrive trop tard : Ursus s'est donné la mort, et Déa s'éteint de son absence. Lui se suicide en s'enfonçant dans la mer. Ne reste que le loup Homo, hurlant à la mort sur la plage noire en une dernière planche magnifique.

L'histoire que nous raconte Fernando de Felipe est la même que celle de Victor Hugo. Quelles différences pourtant : l'auteur a volontairement oublié certaines scènes ; il a occulté des personnages essentiels du roman (David Dirry-Moir alias Tom-Jim-Jack…) ou a minimisé leur rôle (Barkilphédro). Il a choisi de faire mourir Ursus et de parler de la peste. Il n'a pas jugé bon d'insister sur l'importance de la roulotte, le lieu qui symbolise le lien entre les quatre héros. Il a éradiqué les nombreux aphorismes dont le père des Misérables était friand, et a fait l'impasse sur les digressions historiques.

En fait, le dessinateur s'est concentré sur la figure centrale du héros, ses souffrances, son imaginaire. Il a su restituer parfaitement l'ambiance du plus surréaliste des romans de Victor Hugo avec un trait acéré, à la fois réaliste et onirique, des couleurs vives et des dessins qui sont aussi de véritables tableaux ayant chacun une beauté autonome. De l'alternance et du mélange des tons chauds et froids se dégage une véritable ambiance qui happe le lecteur vers des frissons de peur et d'espoirs.

Le parti-pris de Felipe était apparemment de faire de Gwynplaine un révolté, victime inexorable du Destin, avec une volonté inattaquable de le braver. Mais si ce parti-pris était aussi celui du romancier, on peut regretter que le Gwynplaine de Felipe ne soit pas aussi complet et aussi subtil que celui de Victor Hugo : Gwynplaine est peut-être un saint, il n'en reste pas moins un homme. Hugo avait bien réussi à montrer l'ambivalence du personnage : faible quand il est attiré par la duchesse venue voir le spectacle, fort quand il refuse de se rendre au rendez-vous qu'elle lui fixe. Faible quand il est un moment tenté par sa nouvelle existence de Lord, fort à nouveau quand, se rendant compte qu'il a été "instrumentalisé", il choisit de retrouver son ancienne vie et ceux qui l'accompagnaient et l'aimaient. Felipe a également choisi de ne pas évoquer clairement la dimension politique du roman, pourtant relativement importante: Hugo place en effet ces mots dans la bouche de Gwynplaine "J'ai une mission. Je serai le Lord des pauvres".

La BD ne fait pas mention de cet aspect, c'est peut-être aussi pour cela qu'en prenant vie sur des images, Gwynplaine perd un peu de son épaisseur et de sa complexité. Le pari, toutefois, est gagné : ni illustration linéaire du roman, ni fantaisiste extrapolation, le dessin de Fernando de Felipe parvient à interpréter richement les décors sombres, les cauchemars et la monstruosité qui peuplaient l'imaginaire du Victor Hugo lorsqu'il écrivit L'Homme qui rit au siècle dernier.


Thomas Bronnec
( Mis en ligne le 23/05/2000 )
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