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Bande dessinée -> Humour |
| Fabien Vehlmann Jason L’Île aux cent mille morts Glénat - 1000 feuilles 2011 / 15 € - 98.25 ffr. / 56 pages ISBN : 978-2-7234-7679-9 FORMAT : 24x32 cm Imprimer
Quand deux auteurs doués se rencontrent. Dun côté Fabien Vehlmann, scénariste infatigable qui pond des histoires comme il respire, responsable de quelques-unes des plus belles surprises de ces dernières années (Green Manor, Seuls, Les Cinq Conteurs de Bagdad, Les Derniers Jours dun immortel
), et capable de sattaquer avec la même maîtrise à tous les genres, tous les formats, sans avoir non plus peur de se frotter aux grandes figures (la reprise des aventures de Spirou). De lautre, Jason, sans doute ce qui est arrivé de mieux à la bande dessinée dhumour depuis Trondheim; un scénariste lui aussi à laise dans tous les genres, et qui malgré un dernier album un peu en-dessous (Les Loups-Garous de Montpellier), a signé au moins deux chefs-duvre (Jai tué Adolf Hitler, Attends
) et plusieurs autres pépites. Un style épuré, une « ligne très claire », de nombreux silences, des ambiances mélancoliques peuplées de personnages perdus entre apathie étrange et impassibilité à la Buster Keaton : lunivers de Jason est immédiatement reconnaissable, et totalement singulier.
Si Jason a lhabitude de travailler seul, on réalise vite à la lecture de cet album en binôme que la collaboration na pas été un exercice difficile. Vehlmann sest entièrement plongé dans lunivers de lartiste norvégien, en a extrait les principales caractéristiques pour y glisser, avec aisance et évidence, son histoire de pirates. Plusieurs planches, surtout celles du début, fonctionnent comme celles traditionnellement façonnées par Jason : construction sobre, dialogues succincts, pseudo gags mélancolicomiques en fin de page, narration qui avance prudemment
Dès lors, Jason napparaît pas comme un simple illustrateur, mais bel et bien comme le moteur de lalbum, celui qui a su, implicitement, imposé sa marque, son style. Ce travail est donc un modèle de collaboration, un petit bonheur de rencontre.
Lhistoire raconte lépopée de Gweny, petite fille qui vit seule avec sa mère, son père ayant quitté le village cinq ans plus tôt suite à la découverte dune carte au trésor. Voilà quaujourdhui, Gweny trouve à son tour cette même carte. Un navire de pirates à convaincre et là voilà partie sur les mers à la recherche de son paternel, et accessoirement dun trésor. Très vite, lîle est en vue, mais, évidemment, tout ne va pas être aussi simple
Le récit est à limage des albums de Jason : il emprunte à un genre populaire bien défini (ici, la littérature de pirates), pour finalement mieux le contourner. Si les écarts ne sont pas aussi marqués que dans Low Moon par exemple (qui sattaquait au western) ou Hemingway (mélangeant mémoires décrivains et film de braquage), laventure nest pas dénuée dà-côtés absurdes, laissant vite en plan la traditionnelle histoire de flibuste pour une toute autre aventure. On nage ainsi entre périple initiatique, récit héroïque et comédie potache.
On ne reviendra pas sur le dessin de Jason, au trait toujours impeccable, capable den dire beaucoup avec une étonnante économie. Quant aux couleurs de Hubert, elle termine de donner à cet album une belle atmosphère aux multiples ambiances. Lensemble est finalement assez réjouissant, léger, comme un petit divertimento entre deux morceaux plus imposants.
Alexis Laballery ( Mis en ligne le 31/01/2011 ) Imprimer
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