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Bande dessinée -> Humour |
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Ce qu’il Feiffer de mieux | | | Jules Feiffer Je ne suis pas n'importe qui ! Futuropolis 2007 / 24 € - 157.2 ffr. / 232 pages ISBN : 978-2-7548-0150-8 FORMAT : 18,5x23,5 cm
Traduction de François Cavanna Imprimer
Enfin Feiffer en France ! Illustre satiriste aux États-Unis, dont lempreinte sur la bande dessinée nest plus à démontrer, touche-à-tout actif dans le dessin animé, le livre pour adultes et pour enfants, le théâtre ou le cinéma, Feiffer restait largement méconnu de ce côté-ci de lAtlantique. Hormis une formidable série de pages issues de sa collaboration au Village Voice et publiées dans les années 1970 par Charlie Mensuel, le public français navait pas eu grand-chose à se mettre sous la dent en matière de bande dessinée. Futuropolis se décide à traduire un recueil de nouvelles du maître. Il était temps.
Six nouvelles, six récits datés de 1951 à 1963 durant lesquels Feiffer se laisse porter par une narration fluide sans pour autant perdre de vue ses objectifs : avec un sens aigu de la psychologie, il nous conte des aventures humaines, et présente ses personnages dans le détail, dun trait cynique et efficace. Ce trait réduit à sa plus simple expression caractérise autant son dessin (des lignes hâtivement brossées, mais dune plume vibrante) que les bases de son scénario. Il réalise ses fables tout en caricature, ce qui nimplique pas moins de justesse.
Dans « Pulcinella », le récit qui ouvre le recueil, une Cendrillon des temps modernes devient la reine dHollywood toutes les nuits, pour redevenir une ramoneuse des plus communes après le Tout Dernier Show. Feiffer relie le conte le plus fantaisiste à une satire féroce, sans jamais tomber dans lartificiel. Son absurde est drôle, mais aussi engagé. Même irréalisme significatif dans « La Lune de George », variation sur le thème de Robinson perdu seul sur la lune, et à la fois attiré et effrayé à lidée de recevoir de la visite. On se sent proche de ce malheureux, et en même temps on a limpression den apprendre beaucoup sur nous-même.
Feiffer gratte nos cicatrices ; il sait appuyer là où ça fait mal, décortiquer nos douleurs les moins visibles, traquer la solitude du lecteur. « La Machine solitaire » décrit avec un cynisme épatant une fausse relation de couple où la souffrance ne cesse quen faisant souffrir lautre. Il sait aussi souligner les grandes tares nationales, dénoncer une société oppressante. Si « Munro », charge antimilitariste éperdument comique, a forcément pris quelques années depuis 1951, « Harold Swerg », ironique sur les grandes manifestations sportives, na rien perdu de sa férocité. Il reste encore à évoquer les quelques pages de la courte et muette scénographie de « La Relation » pour citer lensemble du sommaire.
Pour lapprécier, par contre, il faudra un bon fauteuil et du confort : louvrage se déguste comme le grand cru quil est, en faisant sonner les gags et les raccourcis. On regrette simplement que léditeur ait dû travailler sans les pages originales, en conséquence de quoi limpression est parfois un peu floue ou pixellisée. Cela nempêche pas Je ne suis pas nimporte qui !de simposer comme une des sorties les plus importantes du moment. En espérant que les éditions Futuropolis continueront de nous faire parvenir luvre de Jules Feiffer. Il le mérite.
Clément Lemoine ( Mis en ligne le 09/10/2007 ) Imprimer | | |
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