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"Je n'ai pas fait une BD militante."
Un entretien avec Martin Vidberg


Bibliographie :
J.O. 2012, Danger Public, collection Miniblog
Le Journal d'un remplaçant, Delcourt, collection Shampooing
Les Passeurs, Carabas. Dessins de Mickaël Roux


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Après avoir publié son travail sur le Web, Martin Vidberg est aujourd'hui édité chez Delcourt. Son Journal d'un remplaçant revient sur une année d'enseignement dans un établissement pour enfants ultra-violents. Rencontre avec un instituteur-dessinateur.

Parutions.com : Tu étais instituteur et dessinateur pendant plusieurs années, et brusquement tu dessines ton expérience dans le Journal d’un Remplaçant. Pourquoi ? C’était un projet en vue de l’édition ?
Martin Vidberg : Non, je n’ai pas encore rencontré l’angoisse de la feuille blanche depuis que je dessine. Peut-être un peu parce que j’ai un métier à plein temps, j’ai toujours eu beaucoup plus de projets et d’envies que de temps pour les réaliser. Comme souvent, ce sujet s’est imposé par nécessité, je n’avais pas du tout idée qu’il était porteur et qu’il me permettrait de publier. D’ailleurs, quand j’ai montré les premières planches autour de moi, on m’a dit que la forme et la présence de nombreux textes m’empêcheraient probablement de trouver un éditeur. J’ai sans doute profité d’un besoin de renouvellement des éditeurs avec la naissance de collections comme « Éprouvette » ou « Shampooing » chez Delcourt et donc d’une certaine manière, de la « surproduction » actuelle qui angoisse la plupart des auteurs.

Parutions.com : Tu n’avais donc pas l'impression d'avoir trouvé un « sujet »?
Martin Vidberg : Si, absolument, j’avais l’impression d’avoir trouvé un « sujet ». En fait, je n’ai jamais rien eu à raconter et je me suis dit qu’avec le succès des Profs il y avait moyen de se faire un maximum de blé ! J’espère juste ne pas être pénalisé par la surproduction actuelle qui risque de masquer un peu la sortie de l’album…

Parutions.com : Pourquoi le choix d'un journal ? Tu dis à un moment que « l'autobiographie n'est qu'un prétexte ». Tu aurais pu présenter ta vision des choses sous la forme d'un reportage ou d'une fiction…
Martin Vidberg : J’avais commencé, un an auparavant, par écrire un récit qui abordait l’école par grands thèmes. C’était beaucoup mieux écrit et plus réfléchi mais trop sérieux à mon sens. Au lieu d’une BD légère qui montre aussi les moments plus amusants de ce métier je partais sur un truc militant qui ne me ressemblait pas vraiment. L’usage de la première personne m’a permis de parler de tout cela avec plus de naïveté mais ce n’est pas pour autant une vraie autobiographie : j’ai volontairement oublié plein de choses dans ma vie privée, comme l’opération de mon épouse pour laquelle j’ai manqué quelques jours et j’ai zappé ou transformé quelques éléments qui ne me semblaient pas indispensables (par exemple il y avait deux classes et je ne parle jamais de ma collègue).
J’ai essayé de rester fidèle à la réalité. Je n’ai rien inventé mais j’ai oublié des choses volontairement, raccourci des évènements et je me suis même accordé quelques libertés sur la chronologie. Je crois en fait que si l’on respecte avec trop d’exactitude le cours des évènements, on débouche sur un récit qui ne correspond paradoxalement plus du tout à la réalité, parce que trop long ou trop difficile à lire. Après tout, un reporter qui veut retranscrire fidèlement un évènement est quand même obligé de monter ce qu’il a filmé !

Parutions.com : Parlons un peu du contenu du Journal, c’est-à-dire ton expérience d’enseignant. Tires-tu une conclusion de cette année?
Martin Vidberg : Non. Je n’ai pas d’idée arrêtée et de certitude. Je n’ai pas de conclusion toute faite et définitive. J’insiste dessus mais je n’ai pas fait une BD militante avec pour objectif de montrer des erreurs ou des dysfonctionnements, je me suis contenté de décrire les choses telles que je les percevais. Mais si je peux montrer ce qui ne fonctionne pas parfois, je suis bien incapable de proposer des solutions. Je ne suis pas encore mûr pour une carrière politique !... Je constate que certaines choses ne fonctionnent pas ou me choquent mais je n’ai pas de reproche unique à formuler. Ce n’est pas de mon rôle de toute façon. Je m’inquiète quand même des changements cycliques de politique par rapport à l’éducation qui semblent parfois répondre à des modes plutôt qu’à des besoins. En ce moment, la mode est plutôt à la fermeture des centres et des structures spécialisées.

Parutions.com : Comment définirais-tu ta mission (au sens administratif), puisque tu ne peux pas sauver un élève ?
Martin Vidberg : On ne « sauve » pas tout seul un élève, ce serait se donner bien de l’importance. Je suis les élèves pendant une année, je peux les aider, leur permettre de rebondir s’ils sont en difficulté mais une scolarité ce n’est pas qu’une année. Quand j’écris que je ne peux pas sauver les élèves c’est donc surtout parce que je m’inscris dans un processus beaucoup plus long dont je ne suis pas le seul acteur. Je relativise mon importance personnelle mais l’objectif du système éducatif n’en demeure pas moins de conduire tous les élèves à la réussite.

Parutions.com : Et maintenant, tu es instit où ?
Martin Vidberg : Dans un village de campagne très sympathique. Je passe une année tranquille.

Parutions.com : Tu n'as pas l'intention de jamais retourner dans le spécialisé ?
Martin Vidberg : Je n’ai pas d’intention pour le moment. Mais, me connaissant, je ne finirai sans doute pas ma carrière sur le même poste. J’ai besoin de varier les expériences.

Parutions.com : Est-ce qu'il y a des points communs entre le métier de dessinateur et celui d'instituteur ?
Martin Vidberg : Sans doute mais il y a surtout beaucoup de différences. Il y a un métier social qui répond à des horaires et à une organisation stricte et à côté un métier beaucoup plus libre. Je trouve les deux très complémentaires en réalité. Beaucoup de fonctionnaires éprouvent la nécessité d’occuper leur loisir avec une activité libre et enrichissante de ce type.

Parutions.com : Comment te définis-tu aujourd'hui? D'abord comme dessinateur ou d'abord comme instit ?
Martin Vidberg : Comme instit, à 100%. La BD n’est qu’un loisir dans lequel j’ai eu beaucoup de chance. Mais je crois que je suis encore très loin d’y avoir un statut d’auteur professionnel.

Parutions.com : Est-ce que tu montres ton album à tes élèves, à tes collègues ou aux parents ?
Martin Vidberg : Non, je suis bien trop discret pour cela. Mais comme la presse régionale l’a bien couvert, pas mal de monde le connaît. Heureusement, les gens sont également trop discrets pour m’en parler !

Parutions.com : Tu ne te lasses pas de tes personnages en patate? Jamais envie d'utiliser un autre style ?
Martin Vidberg : Je ne m'en lasse pas, c'est tout le problème, mais je vais quand même essayer de diversifier mon style, davantage par défi que par nécessité. Il faut que je sache si je suis capable de dessiner autre chose !

Parutions.com : Tu t'étais fait connaître sous le nom d'Everland. Pourquoi revenir à ton vrai nom ?
Martin Vidberg : Parce que je n'étais pas encore mondialement connu et que si je voulais changer c'était le bon moment. Je n'avais tout simplement pas envie d'assumer un pseudo. Et puis j'aime bien mon nom de famille, même si personne ne sait l'orthographier. Everland était venu par hasard, c'est le nom de mon site et d'un vieux projet BD pour le moment mis de côté. Il s'agissait d'une histoire formidable avec un pays imaginaire dont les décors changeaient en fonction de l'humeur des personnages. Une chouette idée mais j'ai pour le moment toujours raté mes premiers essais de planches. Justement, les patates ne correspondent pas trop à ce type d'univers.

Parutions.com : Avec ton site, tu as été un des premiers Bdbloggeurs avant que ça ne devienne une véritable mode. Quel regard as-tu sur les Bdblogs et leur évolution ?
Martin Vidberg : Les Bdblogs les plus visités atteignent aujourd'hui les 30 000 visiteurs/jours. Ce sont des chiffres énormes pour des espaces autobiographiques peu scénarisés et souvent très amateurs. C'est donc pour moi la preuve que la BD a sa place sur Internet et que plus qu'un effet de mode, on est au tout début de sa diffusion.
Peu d'auteurs osent lancer de vrai BD à suivre adaptées à la lecture à l'écran. Pourtant je suis persuadé qu'il y a déjà un public tout disposé à les suivre. Le problème est qu'il n'y a pas de modèle économique viable pour le moment. Il n'y a pas d'éditeur en ligne et peu de lecteurs prêt à payer. Tout reste à inventer dans ce domaine, et si la « nouvelle BD » est apparue avec les auteurs de l'Association, Internet va peut-être nous offrir une « nouvelle nouvelle BD ».


Propos recueillis par Clément Lemoine en février 2007
( Mis en ligne le 13/02/2007 )
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  • Le Journal d’un remplaçant
       de Martin Vidberg

    Ailleurs sur le web :
  • Le site de Martin Vidberg
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