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Histoire & Sciences sociales -> Poches |
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L’autorité au kaléidoscope | | | Alain Renaut La Fin de l'autorité Flammarion - Champs 2011 / 8 € - 52.4 ffr. / 266 pages ISBN : 978-2-08-123505-2 FORMAT : 11cm x 18cm
Première publication en septembre 2004 (Flammarion) Imprimer
Autant le dire demblée, La Fin de lautorité nest pas un essai de société destiné à un large public mais bien plutôt un ouvrage de philosophie, avec tout ce que cela exige de concentration et dattention de la part du lecteur. En un sens cela va de soi puisque lauteur, Alain Renaut, enseigne précisément cette discipline à la Sorbonne.
Dans un avant-propos passionnant consacré aux «difficultés actuelles voire [à] la crise que traverse aujourdhui la relation éducative», lauteur montre quen réalité cest la notion même dautorité sur laquelle reposait cette relation qui est contestée. Mais pour préciser les données de la crise, il prend le temps de définir dans un premier chapitre les caractéristiques propres à la relation dautorité distinguée du simple pouvoir. A la suite de cette analyse notionnelle minutieuse, Alain Renaut se propose dexaminer lincarnation de la relation dautorité et ses mutations contemporaines dans quatre champs sociaux distincts : la politique, lécole, la justice, la médecine. Ces quatre chapitres, qui constituent la chair de louvrage, sont présentés comme autant dessais indépendants, le lecteur étant dailleurs explicitement invité à les «lire dans lordre qui lui conviendra le mieux».
Dans cet ouvrage est posé le problème de lautorité à lâge démocratique. Lauteur constate sobrement limpossible maintien en létat de relations fondées sur ce rapport dautorité. Comment concilier le maintien en divers champs de la société de ce «surpouvoir» reconnu et accepté, avec la claire affirmation moderne que la relation à lautre ne saurait être conçue autrement quen terme dégalité et didentité ? En effet, linégalité foncière entre les deux pôles de la relation dautorité semble incompatible avec la reconnaissance de la figure de lautre comme alter ego. Ce problème se pose de façon encore plus complexe dans le champ éducatif : il faut en effet se convaincre dans un premier temps que «lenfant lui aussi est un «autre» tout de même identique», avant de chercher à «rendre compatibles cette dénivellation comprise intrinsèquement dans la relation pédagogique et laffirmation dégalité qui est constitutive de la conscience démocratique».
Alain Renaut sefforce de trouver une issue à ces difficultés et propose, dans le champ politique avant tout, les linéaments dun renouvellement de type contractuel de la relation dautorité afin de la rendre compatible avec lesprit démocratique partagé aujourdhui par tous. Mais le projet principal du philosophe nest pas, dans cet essai, de trouver des solutions, mais bien plutôt dexplorer dans leur complexité et leur diversité les métamorphoses et les remises en cause des diverses figures de la relation dautorité à lâge moderne.
Il y parvient, mais au prix dun éclatement certain du propos, qui laisse le lecteur désorienté et frustré. En effet, dans lavant-propos passionnant rappelons-le -, Alain Renaut laisse entendre clairement que la crise actuelle de la relation éducative est à lorigine de sa réflexion sur lautorité à lâge moderne. Le lecteur en déduit avec gourmandise, mais hâtivement sans doute, que lensemble de louvrage sera consacré à cette question. Il accepte alors le détour par lanalyse notionnelle, indispensable pour comprendre les particularités de la relation dautorité, avant de retrouver le propos liminaire dans le chapitre intitulé «éduquer». Mais celui-ci semble trop bref, et lauteur semble dailleurs en convenir lui-même puisquil renoue avec le propos éducatif quelques pages plus loin dans le chapitre intitulé «punir», preuve quil était loin davoir livré tout le fruit de sa réflexion sur le sujet.
Il est en définitive à regretter que lauteur ait tenu à évoquer, dans ce même ouvrage de dimension modeste, lensemble des autres champs sociaux, politique, juridique et médical, où sincarne lautorité. Là encore les analyses sont brèves, et les pages consacrées à ces trois champs nous privent dun développement plus ample sur la crise de la relation éducative. Développement pourtant tant espéré après la lecture de lavant-propos.
Raphaël Muller ( Mis en ligne le 28/06/2011 ) Imprimer | | |
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