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Une leçon d'histoire culturelle
Danielle Tartakowsky   Nous irons chanter sur vos tombes - Le Père-Lachaise, XIXe-XXe siècle
Aubier - Historique 1999 /  / 275 pages
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Les historiens annoncent depuis déjà quelques lustres le déclin de l'école des Annales et de ses grands chantiers d'histoire économique et sociale, appelés, d'après eux, à être dépassés par l'essor de l'histoire culturelle.

Malgré de nombreux essais - et une grande fortune auprès des étudiants, trop heureux d'en profiter pour délaisser leurs cours de statistique, certes peu exaltants - l'histoire culturelle n'a pas encore réussi à s'imposer par des sources ou des méthodes lui permettant de s'attribuer, à l'instar de sa prestigieuse aînée, tous les caractères d'une école historique (maîtres, élèves, travaux de fond, enquêtes, manuels...). Et, si des travaux pionniers, comme celui que Danielle Tartakowsky vient de consacrer à l'histoire du Père-Lachaise, ne venaient périodiquement nous rassurer sur le devenir de l'histoire culturelle, il y aurait fort à craindre que les mots "culture" ou "culturel", copieusement utilisés par les éditeurs pour leurrer un lectorat souvent plus soucieux de modes que de véritable recherche, ne deviennent galvaudés avant même que ce nouveau champ de l'histoire n'ait été pleinement ouvert...

L'ouvrage de Danielle Tartakowsky s'inscrit dans la lignée des travaux réalisés sous la direction de Pierre Nora sur Les lieux de mémoire, tout en s'appuyant sur des bases méthodologiques souvent plus fermes que ses devanciers. L'auteur s'est en effet intéressé à l'anthropologie, dont elle a pris soin de maîtriser les principaux concepts, notamment ceux qui tiennent aux symboles et aux rituels; elle a également pris garde de s'appuyer sur une documentation abondante et diversifiée, ce qui lui permet d'aboutir, en fin de compte, à une étude à la fois riche et structurée.

Danielle Tartakowsky ne s'attarde guère sur les débuts du cimetière, créé en 1804 à l'initiative de Quatremère de Quincy. Elle concentre ses efforts sur la période qui va de la Commune, en 1871 (quand, entre ses tombes, moururent une centaines de fédérés sous les balles des "Versaillais") jusqu'à nos jours et s'intéresse particulièrement à l'usage que les édiles et les partis politiques firent du cimetière.

L'étude du système des concessions gratuites et du visa des épitaphes lui permet d'affirmer que, à l'heure où la majorité municipale de Paris était nettement plus à gauche que la Chambre, le Conseil fit du cimetière une sorte de Panthéon municipal, par opposition au véritable Panthéon, dans lequel le gouvernement envoyait les personnalités correspondant à sa sensibilité politique.

Jusqu'en 1908, lorsque Clemenceau, ancien communard alors au faîte du pouvoir, fit apposer une plaque sur le Mur des fédérés, aucun monument ne vint rappeler les morts de 1871. Toutefois, les socialistes revendiquaient alors l'héritage de la Commune beaucoup plus que les radicaux qui avaient essayé de les devancer: aussi, les hommes qui arboraient l'églantine au revers du veston continuèrent après 1908 à se rassembler au Père-Lachaise et ceci d'autant plus que leurs manifestations, à la différence des cortèges funéraires, étaient généralement interdites par le pouvoir.

La scission entre communistes et socialistes, après la première guerre mondiale, fit rebondir la question des honneurs à rendre aux fédérés. Après l'armistice de 1918, la France souhaita célébrer dignement le souvenir des morts de la grande guerre en leur élevant dans chaque commune un monument. Mais les communistes, qui s'étaient montré pacifistes dès avant la fin des combats et qui, pour certains d'entre eux, avaient participé aux mutineries de la mer noire, ne pouvaient guère s'associer aux élans d'une victoire qu'ils avaient peu encouragé. Aussi s'efforcèrent-ils, pour ne pas se désolidariser complètement de ce grand moment de communion de la France avec son histoire, d'acquérir, dès 1921, et contre la SFIO, héritière du parti socialiste, le monopole des défilés devant le Mur des fédérés, aussi paradoxal que cela pût paraître à tous ceux qui savaient que Marx avait violemment désapprouvé l'action des communards.

La mort de militants communistes en février 1934, lors des manifestations anti-fascistes qui suivirent le 6 février, puis, en août 1935, celle d'Henri Barbusse, célèbre écrivain combattant devenu communiste en 1923, permirent de jeter les bases d'une réelle nécropole communiste en face du Mur des fédérés. Des obsèques du dirigeant communiste Paul Vaillant-Couturier, décédé brutalement en 1937, à l'âge de quarante-cinq ans, au grandiose défilé qui accompagna les restes de Maurice Thorez, en 1964, l'alignement des tombes communistes se densifia considérablement. Alors que, pour reprendre les mots de Danielle Tartakowsky, "l'inscription du parti communiste dans le temps de l'histoire demeurait fantasmatique en février 1934", trente ans plus tard, à la suite notamment des sacrifices de la Résistance, elle était devenue bien réelle... au moment même où "les communistes se sentirent menacés par cet avatar nouveau de la Commune que 1968 prétendait incarner". Les prétentions historicisantes de Mai 68 ne durèrent - on s'en doute - que l'espace d'un instant, et dès lors, le Père-Lachaise amorça son déclin politique.

Il est difficile de résumer ici toutes les analyses de Danielle Tartakowsky, qui font autorité, même sur des points controversés de l'histoire du parti communiste. On ne saura donc que renvoyer le lecteur à cet ouvrage stimulant, et destiné à faire école.


Jean-Philippe Dumas
( Mis en ligne le 11/04/2000 )
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