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Histoire & Sciences sociales -> Antiquité & préhistoire |
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Structures de la poésie grecque | | | Alain Blanchard Dans l'ouvroir du poète - Structures et nombres dans la poésie grecque antique PUPS 2008 / 22 € - 144.1 ffr. / 144 pages ISBN : 978-2-84050-609-6 FORMAT : 16cm x 24cm
Lauteur du compte rendu : Yannick Durbec, professeur agrégé de Lettres Classiques, Docteur ès Lettres, enseigne en Lettres Supérieures et a publié une édition des fragments poétiques de Callimaque aux Belles Lettres, ainsi que plusieurs articles dans des revues de philologie. Imprimer
Ce volume recueille les articles consacrés par Alain Blanchard à létude de certaines structures de la poésie grecque atteignables par létude des thèmes, mais que confirmerait lanalyse numérique. Ces recherches furent nourries par lenseignement dispensé au collège de France par Jean Irigoin, à qui est dédié le présent ouvrage, mais aussi par larticle publié par Paul Maury en 1944 et qui marqua la redécouverte dune possible architecture secrète des Bucoliques de Virgile.
La première partie de ce recueil étudie la composition du fragment 7, v. 1-95, de Sémonide dAmorgos, conservé par lAnthologie de Stobée et qui brosse le portrait de dix femmes mariées. Ce poème fut très critiqué par les commentateurs qui le jugèrent sans art et dune misogynie outrancière. Le propos dA. Blanchard est de démontrer par lexamen des thèmes et des proportions que ce fragment est parfaitement composé. Lensemble des dix animaux et éléments qui représentent les différents types féminins se divise en deux séries : dune part la truie, la chienne et la mer et dautre part lânesse, la cavale et labeille. Les types restants sont des rappels affaiblis des types correspondants et le troisième élément de chaque série représente laccomplissement des deux premiers selon le schéma AAB. De plus, ces deux séries sopposent fortement par le thème qui domine chacune delles : lappétit destructeur et le travail. Ce poème est le premier exemple connu dune structure complexe à dix éléments, même si la structure densemble neuf plus un est homérique, ainsi que le rythme ternaire AAB.
La deuxième partie se compose de six chapitres. Le premier présente une analyse comparative de la parodie dAgathon, chez Aristophane, Thesmophories 101-130, et de la structure du recueil des Bucoliques de Virgile. Lanalyse métrique et le décompte des temps marqués permettent de dégager dix éléments. Les parties I à IX sont groupées de façon concentrique autour de la cinquième partie. Le tableau qui se dégage de cette lecture est identique avec la structure densemble des Bucoliques que P. Maury voulut reconnaître en 1944. Le chapitre III offre une nouvelle approche à la confrontation des fragments des Sicyoniens de Ménandre et de lOreste dEuripide. Lincipit du 4e acte conservé de la comédie de Ménandre comporte plusieurs références textuelles au récit du messager du début du 3e épisode de la pièce du tragique. Ce parallèle est conforté par la découverte des peintures dÉphèse qui rapprochent ces deux uvres. A. Blanchard observe chez Euripide un équilibre exact de 104 tétramètres entre ce qui précède et ce qui suit le 2e stasimon point où laction bascule dans une tragédie classique. Chez Ménandre, ce point de renversement se situe au 3e entracte. L'auteur émet lhypothèse que cet entracte était encadré par deux ensembles de même valeur numérique dans les Sicyoniens.
Dans le chapitre IV, il essaye de dégager lintérêt de lexpression de la terreur et de la pitié chez Ménandre aux v. 589-609 du Dyscolos. Luvre de Ménandre est employée pour éclairer la Poétique dAristote. Lanalyse structurelle conduite par A. Blanchard sur cette même pièce de Ménandre, au chapitre V, confirme le schéma découvert par Paul Maury pour les dix Bucoliques de Virgile. Ce schéma établit une quadruple série de correspondances qui encadrent un élément axial ayant sa réplique inversée dans un élément final. L'auteur éclaire dans le chapitre VI notre compréhension de la division tripartite des comédies, connue par les grammairiens Évanthius et Donat. Cette division est datable au plus tôt de lépoque de Ménandre et peut être attribuée à Théophraste. La protase dépeint chez Ménandre lillusion naturelle dans laquelle se trouve le personnage principal de la pièce en raison de son défaut de caractère ; lépitase décrit une illusion artificielle créée par la ruse dun esclave et la catastrophe présente le renversement de la protase. Le tout répondant au schéma AAB. Le chapitre suivant montre que la division en cinq actes, telle quelle est exposée par Horace, résulte de la multiplication des trois temps de ce rythme ternaire par les deux temps fondamentaux du nud et du dénouement. Lacte III réunit dans une forte unité le temps B du nud et le temps A du dénouement.
La troisième partie se compose de deux chapitres consacrés à lanalyse de la structure du recueil des idylles bucoliques de Théocrite. Les trois familles de manuscrits médiévaux et les papyrus ne permettent pas en effet de reconstituer un ordre des idylles bucoliques. Les analyses métriques méthodiquement conduites par A. Blanchard au chapitre IX lui permettent de formuler des hypothèses de composition stimulantes, qui sont prolongées par une étude thématique développée au chapitre X. Cependant, le degré dincertitude de cette restitution demeure très fort, puisque la dislocation de cette belle architecture demeure inexpliquée.
La grande rigueur philologique dA. Blanchard offre cependant au lecteur un guide fiable pour mieux comprendre les structures et les nombres de la poésie grecque antique, malgré le caractère très hypothétique de ces recherches.
Yannick Durbec ( Mis en ligne le 16/12/2008 ) Imprimer | | |
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