L'actualité du livre Jeudi 28 mars 2024
  
 
     
Le Livre
Histoire & Sciences sociales  ->  
Biographie
Science Politique
Sociologie / Economie
Historiographie
Témoignages et Sources Historiques
Géopolitique
Antiquité & préhistoire
Moyen-Age
Période Moderne
Période Contemporaine
Temps Présent
Histoire Générale
Poches
Dossiers thématiques
Entretiens
Portraits

Notre équipe
Littérature
Essais & documents
Philosophie
Beaux arts / Beaux livres
Bande dessinée
Jeunesse
Art de vivre
Poches
Sciences, écologie & Médecine
Rayon gay & lesbien
Pour vous abonner au Bulletin de Parutions.com inscrivez votre E-mail
Rechercher un auteur
A B C D E F G H I
J K L M N O P Q R
S T U V W X Y Z
Histoire & Sciences sociales  ->  Antiquité & préhistoire  
 

Les mythes grecs d’Homère à Nonnos de Panopolis
Suzanne Saïd   Approches de la mythologie grecque - Lectures anciennes et modernes
Les Belles Lettres 2008 /  17 € - 111.35 ffr. / 168 pages
ISBN : 978-2-251-44351-5
FORMAT : 13,5cm x 21cm

L'auteur du compte rendu : Sébastien Dalmon, diplômé de l’I.E.P. de Toulouse, est titulaire d’une maîtrise en histoire ancienne et d’un DEA de Sciences des Religions (EPHE). Ancien élève de l’Institut Régional d’Administration de Bastia et ancien professeur d’histoire-géographie, il est actuellement conservateur à la Bibliothèque Interuniversitaire Cujas à Paris. Il est engagé dans un travail de thèse en histoire sur les cultes et représentations des Nymphes en Grèce ancienne.
Imprimer

Les éditions des Belles Lettres ont eu l’excellente idée de rééditer le petit ouvrage de Suzanne Saïd, professeur à la Columbia University de New York après avoir enseigné à Nanterre, précédemment publié dans la collection «128» chez Nathan, en 1993, et depuis longtemps épuisé. Il ne s’agit pas d’une simple réimpression, mais d’une deuxième édition, considérablement revue et augmentée, passant de 128 à 168 pages.

Après une introduction s’interrogeant sur la définition de la notion de mythe, la première partie de l’ouvrage tente un essai de typologie, distinguant plusieurs types de discours. Viennent en premier lieu les récits des origines : les différentes cosmogonies (dont la plus célèbre est celle de la Théogonie du poète béotien Hésiode), les mythes de combats pour la souveraineté (Titanomachie, Gigantomachie, Typhonomachie), les récits de création de l’homme (mythe de Prométhée et Pandore chez Hésiode – qui est plutôt un mythe sur l’origine de la condition humaine –, mythe des races, mythes locaux de Phoroneus, Pélasgos, Lycaon ou Cécrops…) et les récits d’origine des peuples et des cités (qui s’intègrent dans des généalogies héroïques).

Un deuxième type de mythes est constitué par la geste des dieux, racontant leur généalogie, leurs domaines d’intervention, leurs relations d’opposition et de complémentarité et leurs aventures (telles que contées dans certains hymnes homériques, ceux consacrés à Déméter, Hermès, Apollon ou Aphrodite, par exemple). Un troisième type de récits narre la geste des héros, qui prend souvent la forme d’épreuves et de combats contre des monstres, comme on le voit pour Héraclès et Thésée. Il ne faut cependant pas négliger les récits mettant en scène des héroïnes, qui sont généralement avant tout des filles, épouses ou mères de héros, même si certaines refusent la condition féminine (Callisto, Atalante, les Amazones). Les récits héroïques s’articulent également dans de grands cycles légendaires : celui de Thèbes autour des Labdacides (Œdipe, Antigone, le duel fratricide entre Etéocle et Polynice), celui d’Argos (débutant avec Io et se poursuivant avec les aventures des Danaïdes, de Persée, puis des Atrides issus de Pélops), l’expédition des Argonautes (avec Jason et Médée), l’expédition des Grecs contre Troie et leurs retours mouvementés dans leurs patries (dont le plus connu est celui d’Ulysse).

La seconde partie est consacrée aux écritures du mythe chez les poètes et les prosateurs, examinant tour à tour l’épopée et la lyrique archaïques, la tragédie attique, la comédie, la poésie hellénistique et l’épopée tardive, puis la rhétorique, l’histoire, les mythographes et les «nouveaux mythes» des philosophes. Le plan reste identique à l’édition de 1993, à l’exception de l’ajout d’un développement sur «la comédie d’Aristophane», mais de nombreuses sous-parties ont été étoffées. Il en va ainsi de celle consacrée à la poésie hellénistique, qui ne se contente plus de présenter Callimaque et Apollonios de Rhodes, mais consacre des développements plus substantiels aux epyllia (épopées miniatures), à l’Alexandra de Lycophron ou aux Phénomènes d’Aratos. La partie consacrée aux prosateurs s’enrichit d’une présentation des rhéteurs et sophistes dans l’Empire romain (Dion Chrysostome, Aelius Aristide, Philostrate, Lucien de Samosate), qui ont abondamment utilisé le mythe dans leurs discours et leurs écrits, ainsi que d’un paragraphe sur l’historiographie hellénistique (Ephore, Théopompe…), connue uniquement à travers des fragments et des témoignages indirects. La présentation des «nouveaux mythes» des philosophes ne se contente plus d’évoquer Platon, mais fait une place aux mythes philosophiques dans la littérature de l’Empire, tels que développés par Dion Chrysostome ou Plutarque.

La troisième partie s’intéresse aux lectures du mythe en Grèce ancienne. En effet, les Grecs ne se sont pas contentés d’assembler et d’organiser une série de récits mythiques ; ils ont aussi inventé une véritable «science des mythes». Certains auteurs ont tâché d’en extraire le fond de vérité qu’ils contenaient, se livrant à une véritable lecture historique. Les premiers historiens (Hécatée, Hérodote, Thucydide) ont tenté de donner une version rationnelle de certaines légendes, de même que des auteurs comme Plutarque ; pour Evhémère de Messène, les dieux n’étaient autres que des humains des anciens temps, divinisés pour leurs qualités remarquables. Des philosophes (comme Xénophane de Colophon ou, plus tard, les apologètes chrétiens) ont au contraire critiqué les mythes traditionnels au nom de la raison ou de la morale. D’autres ont tenté de les sauver par une lecture allégorique (Théagène de Rhégium, Métrodore de Lampsaque, les Allégories d’Homère d’Héraclite, l’Antre des Nymphes de Porphyre ou même des auteurs chrétiens comme Clément d’Alexandrie ou le Byzantin Michel Psellos).

La quatrième et dernière partie se compose d’un survol rapide des interprétations des mythes grecs par les Modernes : naissance de la mythologie comparée à la fin du XVIIIe et au XIXe siècles (Christian Gottlob Heyne, Friedrich Creuzer, Friedrich Max Müller) ; école anthropologique anglaise (avec Edward Tyler, Andrew Lang et, au début du XXe siècle, James George Frazer) ; naissance de la mythologie historique avec Karl Otfried Müller, ; école ritualiste de Cambridge (Jane Harrison, Gilbert Murray, A.B. Cook, Francis M. Cornford) ; avatars de la mythologie historique (Karl Robert, Angelo Brelich) cherchant à remonter aux origines mycéniennes (Martin P. Nilsson), indo-européennes (Georges Dumézil), proche-orientales ou même paléolithiques (Walter Burkert) de la mythologie grecque, ou tentant d’identifier l’évolution historique et les différentes couches historiques d’un mythe (école de Rome) ; lectures structurales inspirées par la linguistique (Claude Calame) ou l’ethnologie de Lévi-Strauss (école de Paris autour de Jean-Pierre Vernant, Marcel Detienne, Pierre Vidal-Naquet ou Nicole Loraux) ; lectures psychanalytiques (Sigmund Freud, Otto Rank, Carl Gustav Jung, mais aussi André Green, R. Caldwell, Charles Segal ou Philip Slater). Aujourd’hui, l’heure des grands affrontements méthodologiques est passée. On a renoncé à trouver une clé unique et universelle d’interprétation, et l’on préfère combiner, à l’instar de Jan Bremmer dans son analyse du mythe d’Œdipe, des méthodes aussi diverses que la lecture historique, le structuralisme lévi-straussien ou la psychanalyse freudienne.

Le livre de Suzanne Saïd est fort utile également pour son répertoire des écrivains de l’Antiquité, précisant pour chacun s’il a fait l’objet d’une traduction aux éditions des Belles Lettres («Collection des universités de France», «Collection byzantine», «La Roue à livres», «Aux sources de la tradition», «Fragments»), du Cerf («Sources chrétiennes») ou dans la «Loeb classical library» (en Anglais). On consultera aussi avec profit sa bibliographie organisée thématiquement en fonction du plan du livre, qui ne néglige cependant pas les ouvrages de référence comme les dictionnaires, introductions générales ou recueils d’articles fondamentaux.

Ce manuel clair, concis et rigoureux, rédigé par l’une des meilleures spécialistes de la littérature grecque, rendra ainsi service aux étudiants s’initiant à la mythologie, mais aussi, plus largement, à tout lecteur curieux de ces questions.


Sébastien Dalmon
( Mis en ligne le 06/05/2009 )
Imprimer
 
SOMMAIRE  /  ARCHIVES  /  PLAN DU SITE  /  NOUS ÉCRIRE  

 
  Droits de reproduction et de diffusion réservés © Parutions 2024
Site réalisé en 2001 par Afiny
 
livre dvd