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De la tombe thébaine d'Aba à la Rome de Zosime | | | Jean Leclant Dictionnaire de l'Antiquité PUF - Quadrige - Dicos Poche 2005 / 49 € - 320.95 ffr. / 2389 pages ISBN : 2-13-055018-5 FORMAT : 14,5cm x 20,5cm
L'auteur du compte rendu : Sébastien Dalmon, diplômé de lI.E.P. de Toulouse, est titulaire dune maîtrise en histoire ancienne (mémoire sur Les représentations du féminin dans les poèmes dHésiode) et dun DEA de Sciences des Religions à lEcole Pratique des Hautes Etudes (mémoire sur Les Nymphes dans la Périégèse de la Grèce de Pausanias). Ancien élève de lInstitut Régional dAdministration de Bastia, il est actuellement professeur dhistoire-géographie. Imprimer
Après la publication dun Dictionnaire du Moyen-Âge en 2002 sous la direction de Claude Gauvard, Alain De Libera et Michel Zink, et la réédition en janvier 2005 du Dictionnaire de la préhistoire dirigé par André Leroi-Gourhan, les Presses Universitaires de France sattaquent maintenant à lAntiquité avec un monumental ouvrage édité sous la direction de légyptologue Jean Leclant, professeur honoraire au Collège de France. Cet inédit est disponible à la fois en grand format, mais aussi dans la collection de poche Quadrige.
Avec plus de 2400 pages, 3200 articles et 5000 entrées dindex, louvrage a lambition de lencyclopédisme. Plus de 500 auteurs, savants confirmés, mais également jeunes chercheurs, ont participé à lentreprise, coordonnée par un comité scientifique constitué des plus éminents spécialistes : Jean Andreau pour Rome, Pierre Bordreuil pour le Levant, Anne Jacquemin pour la Grèce, Luce Piétri pour lAntiquité tardive, Olivier Rouault pour la Mésopotamie, Dominique Valbelle pour lEgypte, mais aussi Michel Humbert pour les droits grec et romain, Luc Brisson et Monique Canto-Sperber pour la philosophie, ou Monique Trédé pour la littérature gréco-romaine.
Si dordinaire on fait débuter lAntiquité avec lapparition de lécriture et des formes dorganisation sociale structurée (en particulier lurbanisation) et quon fixe son terme avec la chute de lEmpire Romain dOccident en 476 apr. J.-C., les progrès de la recherche effectués durant les dernières décennies font apparaître des contours de lAntiquité plus flous, voire à géométrie variable selon les aires géographiques considérées. LAntiquité tardive, débutant au IIIe siècle, se prolonge jusquau VIe siècle ; en Occident, léchec de lentreprise de reconquête de Justinien marque une rupture plus profonde que la chute de la Ville éternelle elle-même (car il ne sera plus possible de revenir sur la recomposition politique de lEurope partagée désormais entre les royaumes dits barbares) ; de même est-ce sans nul doute avec lhégire que débute en Orient une nouvelle ère à laquelle lIslam confère son unité. Cest donc tout naturellement que le Dictionnaire de lAntiquité commence avec les derniers niveaux de la préhistoire pour se poursuivre jusquau règne du constructeur de Sainte-Sophie (527-565 apr. J.-C.).
Lunité géographique de louvrage est fournie par la Méditerranée et ses prolongements. Cet antique fonds a irradié, sous limpulsion des conquêtes militaires et déchanges économiques constants, jusquaux confins des mondes voisins, asiatique ou africain, jusque dans lexotique Gandhâra ou la lointaine Nubie qui font chacun lobjet dune notice. Les confins européens sont un peu plus délaissés, notamment les Germains et les Celtes. Un article est bien consacré à Vercingétorix, mais Boudicca et Caractacus sont oubliés, de même quArminius. Une notice est consacrée par Maurice Sartre à la province romaine de Galatie, mais pas aux Galates.
Louvrage fait cependant un inventaire très complet (qui peut prétendre à lexhaustivité ?) des personnages et des lieux incontournables, des realia essentiels, sans oublier les aspects culturels et religieux majeurs (une place non négligeable est ainsi accordée au premier christianisme), faisant appel, outre lhistoire, aux disciplines les plus variées : archéologie, épigraphie, philologie, épistémologie, histoire des religions, de lart ou du droit, anthropologie... Pour faciliter la recherche, chaque notice renvoie à dautres entrées connexes, et un index, en fin douvrage, fait la même chose (la mention des numéros de page accélérerait cependant la recherche
). Cest donc un outil fort utile, dautant plus que des indications bibliographiques figurent à la fin de chaque article, et permettent de prolonger la recherche.
Les notices sont parfois inégales. Les articles consacrés à la déesse Athéna et au dieu Poséidon, par exemple, sont assez courts et décevants comparés à ceux consacrés à Artémis, Apollon, Hermès ou Dionysos ; la bibliographie est aussi beaucoup plus réduite (aucune référence aux travaux de Marcel Detienne et Jean-Pierre Vernant pour la métis dAthéna par exemple, alors quils ne sont pas ignorés pour Artémis, déesse des marges entre culture et sauvagerie, ou Apollon, sanglant dieu des fondations armé de larc, que lon surprend, parfois, le couteau à la main).
Malgré ces petits défauts (mais ne sont-ils pas inhérents à toute entreprise humaine de taille ?), ce dictionnaire apparaît comme un ouvrage de référence dans le domaine de lAntiquité, nous entraînant dans un parcours passionnant, tant la consultation dune entrée en appelle une autre, et ainsi de suite... Belle invitation au voyage, dans lespace et dans le temps, entre les peintures de la tombe thébaine de lintendant Aba (VIIe siècle av. J.-C.) et la Rome du pape Zosime (mort en 418 apr. J.-C.)
Sébastien Dalmon ( Mis en ligne le 19/10/2005 ) Imprimer | | |