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Histoire & Sciences sociales -> Moyen-Age |
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Les (premiers) Chrétiens et l'argent | | | Clément D' Alexandrie Quel riche sera sauvé ? Cerf - Sources chrétiennes 2011 / 22 € - 144.1 ffr. / 250 pages ISBN : 978-2-204-09530-3 FORMAT : 12,5cm x 19,5cm
Carlo Nardi (Annotateur)
Patrick Descourtieux (Traducteur)
L'auteur du compte rendu : Emmanuel Bain est agrégé dhistoire et docteur en histoire médiévale. Sa thèse a porté sur «Église, richesse et pauvreté dans lOccident médiéval. Lexégèse des Évangiles aux XIIe-XIIIe siècles». Imprimer
Quel riche sera sauvé ? Louvrage de Clément dAlexandrie est souvent cité, beaucoup plus rarement lu. En effet, sur la seule foi du titre, nombreux sont ceux qui postulent laffirmation dune hostilité des premiers pères de lÉglise à largent. La publication de ce titre aux ''Sources Chrétiennes'' permettra aisément de corriger cette perspective. Lutilité de cette édition pour les spécialistes est évidente puisquelle apporte un texte grec fiable accompagné de notes bibliographiques riches et dindices pratiques ; mais elle nest pas moins intéressante pour le lecteur novice auquel elle propose une traduction claire et accessible qui permet daccéder directement à un texte important à double titre. Tout dabord cest une des premières homélies qui approfondissent ainsi létude dun passage biblique particulier il semble que le texte soit la version remaniée dune série de sermons effectivement prononcés sur la péricope de lappel du riche (Mc. 10, 17-30). Ensuite cest un des premiers textes entièrement consacrés à la question du rapport des chrétiens avec largent.
De ce point de vue, il met en place une série didées constamment reprises tout au long du Moyen Âge et au-delà. Lintention de Clément, qui prononce ces homélies dans la ville aux riches activités économiques et culturelles dAlexandrie entre la fin du IIe siècle et le début du IIIe siècle, est de rassurer les riches chrétiens : quand Jésus appelle à tout donner aux pauvres pour le suivre et quand il affirme quil est plus facile à un chameau de passer par le trou dune aiguille quà un riche dentrer dans le royaume de Dieu, il ne demande aucunement aux chrétiens de vendre toutes leurs richesses et il ne condamne pas la possession de largent. Il souhaite uniquement «dépouiller lâme elle-même et ses dispositions intérieures de leurs passions cachées, arracher jusquà la racine et rejeter les éléments étrangers à lesprit» (p.133). Cest donc, selon Clément dAlexandrie, à un exercice de libération intérieure par rapport aux passions quappelle le Christ. Dans cet état, la personne, maître de largent et non plus à lui soumis, est à même den faire un bon usage en le distribuant aux pauvres. Cest sur cet aspect que Clément sattarde le plus : Jésus ne condamne pas la possession des richesses mais demande aux riches den partager une partie. Il ne sagit donc pas, pour Clément dAlexandrie, de combattre les inégalités ou de dénigrer les riches. Les miséreux ne sont pas meilleurs que les riches du fait de leur pauvreté. Si la possession des richesses ne soulève pas de problème, il nen va cependant pas de même de la volonté den acquérir de nouvelles et en ce sens seulement se construit une opposition entre lêtre chrétien et largent.
Conformément aux normes de cette collection, le texte est précédé dune substantielle introduction dont le principal intérêt consiste à replacer cette uvre dans le contexte philosophique et religieux de son temps. On peut en revanche regretter, dune part, que lauteur et le contexte historiques ne soient pas mieux présentés (pour ce qui est de la datation, le lecteur doit se contenter dapprendre que cest postérieur aux Stromates
) et, dautre part, que certains points importants ne soient pas plus approfondis, notamment pour ce qui concerne le texte biblique commenté qui, sur le verset de Mc. 10, 30, diffère totalement de celui que lon trouve dans nos Bibles actuelles. De même la postérité du Quis dives salvetur aurait méritée dêtre étudiée.
Emmanuel Bain ( Mis en ligne le 15/11/2011 ) Imprimer | | |
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