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Histoire & Sciences sociales -> Moyen-Age |
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Chevalerie et violence symbolique | | | Dominique Barthélemy Chevaliers et miracles - La violence et le sacré dans la société féodale Armand Colin - Les enjeux de l'histoire 2004 / 24 € - 157.2 ffr. / 296 pages ISBN : 2-200-26619-7 FORMAT : 16x24 cm
L'auteur du compte rendu : Eliza Zingesser est étudiante en deuxième cycle de littérature française à Smith College aux Etats-Unis. Imprimer
La société féodale autour de lan mil apparaît à nos yeux comme ayant été dune telle violence que les liens sociaux en furent menacés. On aurait tendance à y distinguer deux pôles : celui des chevaliers, singulièrement irascibles, et celui de lEglise, force neutralisante et civilisatrice à légard de ces derniers. Dans son ouvrage destiné surtout aux spécialistes, Chevaliers et miracles: la violence et le sacré dans la société féodale, Dominique Barthélemy sefforce de réexaminer ce point de vue, quil considère comme erroné, à travers létude de chroniques, de récits de vengeance divine et de chartes dépoque.
Dans une approche plus anthropologique, il propose de repenser la notion de guerre féodale, chère aux historiens modernes, en termes de faide chevaleresque, filtre quavait déjà suggéré Jacques Le Goff en 1974. Plus particulièrement, D. Barthélemy conclut que ces faides chevaleresques furent les plus nuisibles non pas à leurs participants mais aux plus faibles, les paysans qui subirent ce que Pierre Bourdieu appellerait une «violence symbolique». Notre perception bipolaire de la société féodale devrait donc être reconsidérée puisque les intérêts des chevaliers et des représentants de lEglise semblent parfois converger.
Pour mieux comprendre cette violence symbolique et tout ce qui ne peut être perçu quau plus près du premier degré des textes sources, D. Barthélemy prend une distance critique qui tente de cerner leur «construction» et leur «efficacité sociale». Il réussit par ailleurs à déconstruire son objet détude grâce à ce recul, ce qui, en contrepartie, relègue au second plan les textes que lhistorien est censé mettre en lumière. Lapparition sporadique de courtes citations noffre quune vision fragmentée de ces textes sources au lecteur qui ne les connaît pas déjà. A celui qui voudrait les découvrir et il le faut bien pour tirer profit de cet ouvrage sont destinées les références des traductions françaises (lorsquelles existent) précisées au début de chaque chapitre. Bien quelle puisse sembler aride aux non-spécialistes, lanalyse de D. Barthélemy nuance de façon subtile et convaincante la conception moderne de la société féodale. Pour apprécier à sa juste valeur cette intéressante étude, la lecture de deux autres de ses ouvrages, La mutation de lan mil a-t-elle eu lieu? (Fayard, 1997) et Lan mil et la paix de Dieu (Fayard, 1999), savère néanmoins indispensable.
Eliza Zingesser ( Mis en ligne le 07/04/2004 ) Imprimer
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