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Point de vue byzantin sur la non-liberté
Youval Rotman   Les Esclaves et l'esclavage - De la Méditerranée antique à la Méditerranée médiévale VIe-XIe siècles
Les Belles Lettres - Histoire 2004 /  29 € - 189.95 ffr. / 404 pages
ISBN : 2-251-38069-8
FORMAT : 15x21 cm

L'auteur du compte rendu : Historienne et journaliste, Jacqueline Martin-Bagnaudez est particulièrement sensibilisée aux questions d’histoire des religions et d’histoire des mentalités. Elle a publié (chez Desclée de Brouwer) des ouvrages d’initiation portant notamment sur le Moyen Age et sur l’histoire de l’art.
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Un coup d’œil sur l’exposé des sources utilisées par le byzantinologue, auteur de cet ouvrage issu d’une thèse, permet de cadrer le propos de son travail et la nature essentielle de ses recherches, moins large mais plus précis que le titre du livre ne l’exprime. On y trouve en majorité des recueils de lois grecques, civiles et/ou ecclésiastiques, car c’est bien de droit qu’il va être surtout question. Une exploration complétée par la mise en application des principes, le vécu des réalités, tels qu’on peut les déduire d’une lecture critique des sources littéraires, notamment des vies de saints. Le cadre chronologique est celui d’une longue durée, plutôt rarement explorée, qui nous conduit de l’Antiquité tardive (concrètement, depuis le règne de Justinien) jusqu’à une période (celle des croisades) où de nouvelles conditions politiques et économiques s’établissent durablement. Les conséquences de ces choix impliquent que l’étude porte, compte tenu des zones où l’empire byzantin exerce son autorité au cours de cette période, essentiellement sur la Méditerranée nord-orientale.

Autre conséquence – elle aussi reflétée par la liste des sources – dans ce panorama, on voit passer les peuples et civilisations avec lesquels Byzance la chrétienne se trouve en contact : les Arabes musulmans essentiellement, les Bulgares d’abord païens, et les juifs, toujours présents dans l’empire. Les uns et les autres ont à faire avec la législation et les pratiques liées à l’esclavage, qu’ils en soient objets ou sujets. Par contre, il ne sera pas question, dans l’ensemble du livre, de l’Occident. Et l’auteur situe sa réflexion, même quand il fait appel à des sources extérieures, du point de vue byzantin.

Les recherches de Y. Rotman partent, de façon logique, de la situation des esclaves dans l’Antiquité classique, pour en montrer l’évolution, sous l’influence des divers facteurs qui conditionnent l’histoire de l’empire byzantin à cette époque. Est-il besoin de rappeler que l’esclavage, à ce moment, n’est en aucune façon contraire aux conceptions chrétiennes ? Bien au contraire, ni baptême, ni mariage chrétien ne menacent les relations maître-esclave. Plus difficile apparaît la position pleine de nuances que l’Église peut et doit prendre vis-à-vis d’esclaves souhaitant entrer dans le clergé ou devenir moines. D’emblée, en tous cas, l’auteur invite à distinguer statut civil et statut social, qui ne sont pas nécessairement liés. Et il montrera au passage comment les circonstances politiques, en particulier les guerres, créent en fait une situation de mobilité, dans les deux sens, entre les statuts d’esclaves et d’hommes libres.

Au cours de cet exposé essentiellement destiné à des spécialistes, et fort heureusement bien articulé par les titres, sous-titres et documents explicatifs, on remarquera tout spécialement la finesse des recherches portant par exemple sur l’utilisation des esclaves en ville (on les y trouve chefs d’ateliers, car en cas de problème avec les autorités, la confiscation de l’esclave revient moins cher au maître que de payer l’amende qui lui incomberait à lui-même), et à la campagne, où ils sont intégrés dans l’ensemble de l’exploitation. Aux IXe et Xe siècles, des esclaves sont insérés à tous les niveaux de la vie économique et sociale. L’affranchissement médiéval existe, comme dans l’Antiquité, et des liens demeurent avec l’ancien maître.

Y. Rotman se livre, après d’autres, mais cette fois inséré dans le cadre juridique de son propos, à l’examen du cas des radhaniyya, ces marchands juifs d’esclaves (et aussi d’armes), qui se livraient à un commerce sur une grande échelle, tout au long d’itinéraires maritimes, terrestres et fluviaux qu’il positionne sur une carte de la Méditerranée.

En conclusion de son étude, l’auteur voit, au cours de la période qu’il étudie, une évolution conduisant de l’esclave/objet à l’esclave/sujet ; tout en s’insérant très logiquement dans l’ordre du monde, tel qu’il est vu par la pensée théologique où tout un chacun tient une place dans la société telle que Dieu (o kurios) la lui a assignée, cette évolution ne pouvait qu’ébranler à la longue la soumission de l’esclave à son maître terrestre.

On n’est pas surpris, bien sûr, de la richesse de l’apparat critique de l’ouvrage : notes, index et bibliographie en feront pour beaucoup de chercheurs une référence et un instrument de travail solide.


Jacqueline Martin-Bagnaudez
( Mis en ligne le 03/08/2005 )
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