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Négocier sans cesse
Madeleine Haehl   Les Affaires étrangères au temps de Richelieu - Le secrétariat d'État, les agents diplomatiques (1624-1642)
Peter Lang 2006 /  33 € - 216.15 ffr. / 370 pages
ISBN : 90-5201-284-9

L'auteur du compte rendu : Françoise Hildesheimer, conservateur en chef aux Archives nationales, est professeur associé à l'université de Paris I. Elle a notamment publié Fléaux et société. De la Grande Peste au choléra. XIVe-XIXe siècles (Hachette, 1999), et, récemment, un Richelieu chez Flammarion (2004).
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L’histoire du secrétariat d’État des Affaires étrangères, sous le règne de Louis XIII et le ministériat de Richelieu, marque une étape essentielle dans l’histoire des institutions diplomatiques et de l’affirmation de la politique étrangère de la France en Europe. Pourtant, aussi étonnant que cela paraisse, aucun travail n’avait jusqu’ici été consacré à ce sujet qui a pourtant laissé aux historiens une riche documentation archivistique à exploiter. Cette lacune est désormais comblée grâce à un travail qui fait pleinement la lumière sur les agents de la diplomatie française au temps de Son Éminence le cardinal de Richelieu. Qui plus est, cet ouvrage élégamment présenté et écrit démontre que le travail de l’historien est d’éclairer son sujet par la recherche et de le rendre accessible à tous par l’écriture. En le lisant, on comprend en effet l’impulsion qu’a pu donner Richelieu à la diplomatie du roi de France et contribuer par là même à la transformation des relations internationales à l’heure où l’Europe «invente la diplomatie», même si le mot n’est pas encore d’usage.

Le département des Affaires étrangères créé le 1er janvier 1589 par Henri III et confié à Louis Revol, est définitivement consolidé par le règlement décisif au 11 mars 1626, qui met un terme à deux années de partage des Affaires «du dehors» entre les quatre secrétaires d’État. L’unité indispensable à la conduite d’une politique extérieure cohérente dont Richelieu, chef du conseil du Roi depuis 1624, a mesuré les enjeux dans une Europe déchirée par la guerre de Trente Ans, est rétablie, autorisant ainsi le développement d’une diplomatie ambitieuse.

La montée au pouvoir du cardinal qui à partir de 1630 place au sein du gouvernement des hommes dévoués et compétents, «ses créatures», modifie sensiblement le travail du Conseil, où sont prises les décisions importantes. A l’évidence, le réseau des liens de fidélité favorise la collaboration entre les hommes, tandis que la confiance particulière accordée à certains les conduit naturellement à accroître l’importance de leur charge. De ce point de vue, le cas du secrétaire d’État des Affaires étrangères est tout à fait exemplaire, avec Claude et Léon Bouthillier, successivement à la tête du département de 1629 à 1632, puis de 1632 à 1643. Le travail accompli par le secrétaire d’État, entouré de ses commis, est considérable, compte tenu des moyens modestes d’une administration encore récente : de la correspondance qu’ils entretiennent avec les diplomates et dont ils rapportent les éléments essentiels dépend la décision du roi.

Il reste que rien n’eût été possible sans la vision nouvelle des relations internationales qui se dégage avec Richelieu, et le subtil partage des rôles entre le roi et le cardinal, qui, pas à pas, entraînent le royaume vers l’affrontement avec l’Espagne. Henri IV avait tracé les grandes ligne de la politique étrangère de la France devant la domination espagnole, Richelieu devait systématiser cette politique en utilisant la négociation comme méthode de gouvernement, même si la guerre est, selon ses propres mots, «quelquefois nécessaire…»

Ainsi comprise et déployée à l’aune de ce qui est utile à l’État, la négociation change de dimension et avec elle le rôle des ambassadeurs et la fonction diplomatique. Pour Richelieu, les ambassadeurs sont intimement liés à la personne du prince par le biais de la parole donnée : ils doivent être choisis avec pertinence car il est de leur responsabilité d’engager la réputation du prince et le bien des États lorsqu’ils négocient les traités. La vie diplomatique, tournée encore vers le passé par les traditions et les usages, évolue peu à peu vers une nouvelle conception des rapports entre Etats, une nouvelle logique politique, avec des méthodes, des attitudes, un langage différent.

Les nombreux agents du roi de France, ambassadeurs, envoyés et résidents, comme d’autres moins officiels, sont les premiers acteurs de cette évolution. Les aléas de la fonction diplomatique et les difficultés ne les découragent pas : souvent isolés et dépourvus de moyens, ils déploient les ressources de leur expérience pour mettre en œuvre la ligne de conduite dictée par des instructions rédigées à Paris ou à Rueil chez le cardinal. De leur capacité d’initiative et d’adaptation aux événements ou aux changements de politique décidés loin des lieux où ils se trouvent, de leur prudence, dépend parfois le destin du royaume. Si certains agents diplomatiques ont parfois outrepassé leurs pouvoirs et compromis la réputation du roi et le bien de l’État, dans leur immense majorité ils ont su répondre aux exigences d’une politique qui fera un temps du roi de France l’arbitre de l’Europe.

L’importance donnée aux Affaires étrangères comme la conception de la négociation continuelle rejaillissent ainsi sur l’ensemble de la diplomatie. En témoignent avec lucidité et concision les premières phrases du chapitre VI du célèbre Testament Politique, où Richelieu «ose dire hardiment que négocier sans cesse, ouvertement ou secrètement en tous lieux… est chose du tout nécessaire pour le bien des États.» Madeleine Haehl apporte à ces paroles les développements de l’historienne et, ce faisant, enrichit l’histoire du premier XVIIe siècle d’une pierre majeure qui lui faisait défaut.


Françoise Hildesheimer
( Mis en ligne le 23/08/2006 )
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