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Histoire & Sciences sociales -> Période Contemporaine |
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La Terreur : un épouvantail ? | | | Jean-Clément Martin La Terreur - Part maudite de la révolution Gallimard - Découvertes 2010 / 13 € - 85.15 ffr. / 127 pages ISBN : 978-2-07-043914-0 FORMAT : 12,7cm x 18cm Imprimer
La réputation des volumes «Découvertes Gallimard» nest plus à faire : combinant un contenu de qualité avec une riche iconographie, le tout rassemblé dans un format court, la collection est plébiscitée du public. La Révolution française est pour linstant peu représentée dans la collection : seul un ouvrage sur la guerre de Vendée, Blancs et Bleus dans la Vendée déchirée, par Jean-Clément Martin, traite de la période. Le même Jean-Clément Martin vient de publier lun des derniers-nés de la collection, qui sattaque à lépisode probablement le plus controversé de la Révolution française, la Terreur.
Louvrage est, comme tous les autres volumes de la collection, divisé en une partie de récit chronologique, abondamment illustré, et une partie «Témoignages et documents» qui propose un certain nombre de textes exposant des positions différentes ou contradictoires sur les sujets en jeu dans la Terreur. La bibliographie fournit un choix douvrages de référence sur le thème et ajoute quelques titres sélectionnés de manière plus personnelle.
J.-C. Martin a choisi dinscrire la Terreur dans un temps long en en faisant remonter les origines culturelles à lAncien régime et en en expliquant la postérité politique et mémorielle, jusquà la Troisième République. Lavantage est très certainement une meilleure compréhension du phénomène dans lhistoire, linconvénient le peu de pages consacrées aux épisodes les plus symboliques de la Terreur, qui deviennent par conséquent un peu difficiles à saisir pour le néophyte (les lois de prairial par exemple). Mais lidée de la collection est bien dêtre une porte dentrée attrayante vers lapprofondissement dun sujet, et non un manuel faisant le point.
Impossible de lisser lhistoire de la Terreur, lauteur ne peut seffacer derrière un sujet historiographiquement si «chaud». Même dans un ouvrage grand public. Ainsi, les préoccupations de lauteur transparaissent : on comprend vite que J.-C. Martin a travaillé sur la Vendée, sur la violence, sur lhistoire des femmes ou encore sur lhistoriographie contre-révolutionnaire de la Révolution. Ce sont donc autant daspects qui guident lévocation de cette période si complexe. Lauteur sefforce de ne pas prendre parti pour une thèse ou pour une autre, de clarifier les positions des différents courants de pensée, mais les seuls choix du temps long ou du prisme de la violence comme clé dinterprétation sont déjà en eux-mêmes des prises de position. Et finalement, cest mieux comme ça, il serait dommage de faire un livre fade sur un sujet si controversé.
Linterprétation, qui napparaîtra pas comme révolutionnaire à qui a un peu travaillé sur le sujet, pourra sembler audacieuse au non spécialiste, tant il est vrai que la mémoire a surchargé démotions le débat sur la Terreur, créant une diabolisation nuisible à la réflexion. Pour J.-C. Martin, la Terreur, davantage quune période datable (de la création du Tribunal révolutionnaire en mars 1793 à lexécution de Robespierre le 10 Thermidor soit 28 juillet 1794 par exemple) ou quun système politique organisé, est un concept créé pour servir une visée politique : «La Terreur naura donc jamais eu de commencement, puisquelle na existé que pour qualifier, ou plutôt disqualifier, un équilibre politique particulièrement instable. Elle est un de ces «tigres de papier» que la Révolution a créés et utilisés : pas plus que la Vendée na eu de limites territoriales et de consistance sociale, que le «fédéralisme» na eu dunité idéologique et de consistance militaire, la Terreur na eu de limites temporelles ni de consistance politique. Tous ces épouvantails ont été agités savamment, dans des moments de crise, par des hommes de pouvoir, désireux de garder un cap, voire simplement leurs têtes». Cette lecture pourra paraître surprenante, et cet étonnement même est la preuve que la manipulation qui a «construit» lobjet Terreur est à ce point efficace que ses effets se font encore sentir à deux siècles de distance
Mais laissons plutôt le lecteur juge.
Louvrage ne fait pas exception dans la collection : il se lit avec plaisir dune traite. En revanche, il nous paraît moins simple daccès que dautres. La collection, née à lorigine dans la section Jeunesse de Gallimard, sadresse actuellement «aux adultes et aux adolescents», mais ce volume vise clairement un public adulte. À cet égard, il est particulièrement réussi, invitant à la réflexion et à lapprofondissement, tout en donnant un aperçu de la richesse exceptionnelle de la production iconographique de lépoque.
Cécile Obligi ( Mis en ligne le 16/11/2010 ) Imprimer
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