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Histoire & Sciences sociales  ->  Période Contemporaine  
 

Un monument de papier
Philippe Artières   La Vie écrite - Thérèse de Lisieux
Les Belles Lettres - L'histoire de profil 2011 /  25 € - 163.75 ffr. / 241 pages
ISBN : 978-2-251-90006-3
FORMAT : 14,5cm x 21,5cm
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«Il n’y a pas d’histoire véritable qui n’aspire à cette rencontre, qui ne quête la résistance des autres, et qui n’éprouve ou ne fomente cette hérésie du passé par rapport au présent. (…) Car si [l’historien] a pour tâche de fournir à ses contemporains cette part nécessaire et légitime de leur «image» sociale qui intègre un passé au présent, il découvre progressivement une mission plus essentielle et plus difficile, qui consiste à leur révéler, dans un moment du passé, la négation de cette image même. (…) Il y a là quelque chose qui brise une facilité de l’intelligence et ouvre l’esprit à l’étonnement. Ce n’est qu’un grain de sable, mais il enraie la logique d’un système ; il fêle un miroir collectif ; (…) en se multipliant, en se corroborant, ces indices ne cessent de surprendre les formes mêmes du désir qu’ils éveillaient. Ils révèlent un être, un moment, des hommes, une société autres» (M. de Certeau, p.15).

Dans son dernier ouvrage La Vie écrite – Thérèse de Lisieux, Philippe Artières cite assez longuement Michel de Certeau, dont l’œuvre l’a impressionné et même guidé. P. Artières discerne en Certeau à la fois érudition et mystère. Certeau n’hésitait pas en effet, précise l’auteur, à faire l’histoire avec «l’excès et le manque, les cris et les silences, les trous et les blancs». Il mettait en lumière, écrit le chercheur au CNRS, «leur centralité et en proposait une lecture totale, irradiant la compréhension de la société contemporaine». S’inscrivant dans la continuité des travaux de Certeau, P. Artières prétend d’emblée considérer la mystique comme «prisme du social» et affirme que Thérèse de Lisieux est «l’héritière de cette histoire».

Pour toutes ces raisons, cet ouvrage - au demeurant remarquable - n’est pas une biographie classique. Il s’agit plutôt d’une synthèse sur le rôle de l’écrit, lors du siècle dernier, à travers la construction du mythe de Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus. Assez paradoxalement, P. Artières s’est décidé à traiter la vie de la religieuse à la suite de la lecture d’un manuscrit d’un assassin nommé Jean B, dont la dimension mystique l’a profondément touché. Ce sont en effet, écrit l’historien, «le criminel et l’historien qui me menèrent d’abord sur cette voie périlleuse de la vie de Thérèse de Lisieux me suggérant soudain de penser ensemble la sainte et les criminels. Le pouvoir des archives m’y a ensuite entraîné plus loin que je ne l’avais imaginé ; mes collègues y ont contribué, mes amis, ma compagne et mes enfants ont fait le reste. En un mot, la vie» (pp.13-14).

Au fil des pages, l’historien montre clairement que Thérèse de Lisieux s’inscrit tout à fait dans la lignée des grands Saints du Carmel, comme Sainte Thérèse d’Avila ou Saint Jean de la Croix. Loin de la cantonner à son rôle d’icône de la religion catholique, P. Artières estime qu’elle fût un véritable «monument de papier» de la Troisième République. En effet, explique l’historien, Sainte Thérèse était hors du commun non pas tant du fait de qualités extraordinaires, mais plutôt grâce à son caractère simple et ordinaire. Pour Philippe Artières, les Poilus y furent pour beaucoup dans la popularité de Sainte Thérèse : son récit autobiographique, Histoire d’une âme, les accompagna souvent dans les tranchés.

Philippe Artières estime que l’établissement du corpus thérésien a été lent, mais surtout qu’il a été symptomatique d’une évolution notoire voyant «l’avènement des archives, comme participant de l’œuvre d’un auteur». Avec Thérèse, on se rend compte que les «brouillons, les lettres jusqu’aux factures de blanchisserie et aux paroles prononcées, font partie au même titre que les livres de l’opus». Ce que l’on entend par œuvre s’est sensiblement étendu. L’auteur se fait novateur en se demandant si à ce deuxième corpus ne doit pas s’adjoindre «un troisième fait de tous les écrits produits à partir des deux premiers» (p.211). Dans cette hypothèse, les écrits des Poilus feraient partie de l’œuvre de Sainte Thérèse, au même titre que les écrits des prisonniers des années 1970 vis-à-vis de l’œuvre de M. Foucauld.


Jean-Paul Fourmont
( Mis en ligne le 22/03/2011 )
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