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Volontaires par contournement
Jean-Noël Grandhomme   Les Malgré Nous de la Kriegsmarine - Destins d'Alsaciens et de Lorrains dans la marine de guerre du IIIe Reich
La Nuée bleue-Editions de l’Est 2011 /  25 € - 163.75 ffr. / 428 pages
ISBN : 978-2-7165-0794-3
FORMAT : 15,5 cm × 24,0 cm

L'auteur du compte rendu : Thérèse Krempp mène une recherche en doctorat à l'École des hautes études en sciences sociales sur l'armée française d'Orient pendant la Première Guerre mondiale. Elle a co-publié Charles de Rose, pionnier de l'aviation de chasse (éditions de la Nuée Bleue, septembre 2003).
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De prime abord, le rapprochement entre les incorporés de force alsaciens-lorrains durant la Deuxième Guerre mondiale et la marine de guerre allemande peut surprendre. Pourtant, il ne faut pas oublier que l’Alsace et la Lorraine sont traditionnellement des régions à vocation militaire et maritime. Jean-Noël Grandhomme, maître de conférences à l’université de Strasbourg, nous livre ici les résultats d’un long et minutieux travail de recherche sur un sujet totalement inédit.

Après nous avoir présenté l’énorme traumatisme de l’annexion de fait de l’Alsace-Lorraine dans le Reich allemand, l’auteur nous rappelle que les habitants de ces régions sont soumis à un maillage politique nazi sans commune mesure avec ce que connaît le reste de la France, et qui met en place une propagande de tous les instants. La situation des Malgrés Nous n’est pas une spécificité alsacienne et lorraine, car on peut la rapprocher de la situation des Roumains et des Slovaques incorporés de force dans l’armée hongroise, ou des Polonais dans l’Armée rouge. Ces incorporations de force d’une minorité nationale dans une armée particulière sont une conséquence des guerres nationales et idéologiques menées au XIXe et au XXe siècle ; elles trouvent leur origine dans les légions nationales créées pendant la Première Guerre mondiale.

L’étude présente ne s’intéresse pas uniquement aux incorporés de force mais à l’ensemble des Alsaciens-Lorrains présents dans la Kriegsmarine et la question délicate des volontaires – sujet encore presque absent dans la bibliographie disponible – est de ce fait largement analysée. Il est indispensable d’utiliser le terme «volontaire» avec une prudence extrême. Bien qu’il y ait eu évidemment d’authentiques volontaires, la gamme du volontariat est large et elle propose plusieurs types comportementaux.

Des engagements isolés existent dès 1940, mais le résultat des campagnes de propagande en faveur de l’engagement reste bien maigre jusqu’en 1942 : malgré la difficulté d’avoir des chiffres fiables on peut estimer que 97% des Alsaciens ayant revêtu l’uniforme de la Wehrmacht n’était pas volontaires. Les volontaires «conscients» dans la Kriegsmarine doivent être considérés comme moins fanatiques que ceux qui signent un engagement dans les Waffen SS ou dans l’armée de terre. Certains sont manifestement ralliés au régime nazi, d’autres se recrutent par «simple» germanophilie, sans accointances particulières avec l’idéologie nationale-socialiste. Mais une fois la conscription établie, à partir de 1942, l’engagement volontaire dans la Kriegsmarine revêt bien souvent une signification très différente. En effet l’engagement de force dans les Waffen SS est la hantise de tous les Alsaciens-Lorrains patriotes. Se mettent alors en place des stratégies d’évitement individuel ou collectif de la guerre qui font que les jeunes gens vont s’engager volontairement dans la marine (réputée comme moins dangereuse et moins meurtrière) plutôt que d’attendre d’être recrutés de force par les Waffen SS ou d’être envoyés sur le front de l’Est. On peut alors parler d’engagements volontaires par contournement.

Cependant, après la guerre, il va s’avérer difficile de distinguer les volontaires par contournement des véritables volontaires. On le voit, la situation de ces Alsaciens-Lorrains est particulièrement complexe car il faut, pour bien la comprendre, concilier l’engagement volontaire et le statut de victime, statut si cher aux représentations mémorielles de la société actuelle. Jean-Noël Grandhomme réussit parfaitement à faire ressortir cette dualité grâce à un important travail de démonstration étayée par des sources solides.


Thérèse Krempp
( Mis en ligne le 15/05/2012 )
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