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Histoire & Sciences sociales  ->  Période Contemporaine  
 

Oeil pour oeil...
R. M. Douglas   Les Expulsés
Flammarion - Au fil de l'histoire 2012 /  26 € - 170.3 ffr. / 506 pages
ISBN : 978-2-08-126630-8
FORMAT : 15,0 cm × 24,0 cm

Laurent Bury (Traducteur)
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Professeur d’histoire contemporaine à l’université Colgate (New York), R. M. Douglas vient de publier, aux éditions Flammarion, Les Expulsés, une histoire des Allemands qui ont été «transférés», au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, des Etats d’Europe centrale vers l’Allemagne vaincue.

Au sortir de la Deuxième guerre mondiale, le Vieux Continent a été le théâtre d’un transfert forcé de populations allemandes. Ces opérations s’effectuèrent à une très grande échelle, puisqu’ils concernèrent quelques treize millions d’Allemands vivant «paisiblement» par exemple en Hongrie et en Pologne. Après la chute du IIIe Reich, ils étaient en effet devenus parfaitement indésirables dans ces pays durement éprouvés par les sombres années de domination nazie. Ces Allemands ont donc été délogés de leurs confortables foyers et envoyés vivre au milieu des ruines encore fumantes du Reich hitlérien.

Ces Allemands ethniques ont été très durement éprouvés. L’auteur évoque notamment «une vieille femme (qui) fut défenestrée, un musicien (qui fut) lynché en pleine rue parce qu’il ne parlait pas allemand». L’universitaire américain rapporte qu’«un officier tchèque (affirma que) la vermine allemande devait souffrir». L’Europe centrale songeait, avant tout, à se venger des exactions allemandes qui eurent lieu pendant la guerre. Comme le disaient à cette époque les Tchèques, «œil pour œil, dent pour dent». Pour replacer cet épisode dans son contexte et pour être tout à fait exact, l’histoire est pleine de ces exodes forcés, comme par exemple entre ceux qui eurent lieu entre la Turquie et l’Arménie.

Ces expulsions, qui eurent lieu entre 1945 et 1947, ont été mises en place par les autorités des pays d’Europe centrale, avec l’aide des gouvernements britanniques, soviétiques et américains. Ceux-ci dirigeaient alors la reconstruction du continent européen. Parfois brutales, elles ont concerné entre 12 et 14 millions de personnes, principalement des femmes et des enfants. Les victimes de ces déplacements sans escorte furent nombreuses (500 000 environ). Les Allemands de ces pays étaient souvent battus et volés. Tout ceci a été fait au grand jour, avec de nombreux témoins.

Dans cette enquête minutieuse et fouillée, R. M. Douglas n’insinue pas que la souffrance subie par ces expulsés allemands a été équivalente au martyr des Juifs ou Polonais assassinés par les Nazis. Mais, ainsi que le rappelle l’auteur, un camp de concentration reste un camp de concentration et c’est là-bas que furent internés des milliers d’Allemands. Pour le président tchèque Bénés, ces violences étaient inévitables, les Allemands récoltant ce qu’ils avaient patiemment semé durant de dures et longues années.

Toutefois, les expulsions s’arrêtèrent assez rapidement (fin 1947). Selon l’auteur, hors d’Allemagne, cet épisode a été oublié, presque refoulé pourrait-on dire. Ce livre entend donc combler cette criante lacune historique. Dernièrement décédé, l’historien Tony Judt, historien britannique, avait lui aussi abordé cette question dans l’un de ces tout derniers ouvrages. Pour R.M. Douglas, il ne fait aucun doute que tout ceci constitue un crime contre l’humanité et qu’il ne doit pas être reproduit.

«Si graves qu’aient été les blessures physiques et psychiques causées par l’occupant nazi, l’idée que ces sociétés ne pourraient retrouver leur amour propre collectif qu’en déployant leur capacité de violence est, d’après R.M. Douglas, à la fois malsaine et éthiquement intenable». La France fut très hostile à ces déplacements forcés de population, non par angélisme, mais plutôt parce que ces déplacements permettaient à l’Allemagne (non réunifiée à cette époque) de reconstituer sa population.

Un ouvrage salutaire à bien des égards : R.M. Douglas a voulu réaliser une étude des expulsions qui examine l’épisode de bout en bout, depuis ses origines et dans tous les pays concernés, jusqu’au temps présent, où le phénomène continue de projeter son ombre sur nombre d’évènements européens et mondiaux. L’auteur reconnait néanmoins qu’il n’a pas pu faire le tour de la question, car il n’a pas eu accès aux archives soviétiques concernant la Roumanie et les pays de l’ex Yougoslavie.


Jean-Paul Fourmont
( Mis en ligne le 06/11/2012 )
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