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Un récit canonique
Pierre-Louis Roederer   Un été d’espoir et de sang - Chronique de cinquante jours. 20 juin-10 août 1792
Perrin 2019 /  25 € - 163.75 ffr. / 432 pages
ISBN : 978-2-262-07748-8
FORMAT : 15,5 cm × 24,0 cm

Thierry Lentz (Annotateur)
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Celui qui pouvait se prévaloir «d'avoir passé auprès de Louis XVI la dernière nuit de son régime et auprès de Bonaparte la première nuit du sien», Pierre-Louis Rœderer, était un lorrain de naissance (il est né à Metz le 15 février 1754) et un juriste de tradition familiale et de formation. Fils d'un substitut du procureur du roi au Parlement de Metz, il succède à son père et se signale par son adhésion aux idées nouvelles. C’est ainsi qu’en 1789, il est très normalement élu député de Metz (plusieurs autres députés lorrains s’illustreront très rapidement, notamment l'évêque de Nancy, Mgr de La Fare, qui prononce le sermon de la messe d'ouverture des États généraux, l'abbé Grégoire, curé d'Emberménil, ou encore Jean-Louis Emmery, éphémère président de l'Assemblée) et il sera représenté par David dans le Serment du Jeu de Paume, alors qu’il n’y était pas présent. À la dissolution de l’Assemblée constituante, il devient procureur général syndic de la Seine, un poste qui lui donne connaissance directe de la situation de la capitale. Il est alors mêlé à la journée révolutionnaire du 10 août 1792, où il invite le roi à quitter les Tuileries pour se réfugier auprès de l'Assemblée législative et l’y conduit lui-même.

La Chronique qu’il nous a laissée s’étend de la première invasion des Tuileries, le 20 juin 1792, à cette journée du 10 août suivant, jour de l'assaut final du Palais, du massacre des Suisses et de la suspension du roi, bientôt enfermé au Temple. Il y raconte en détail les discussions, les débats de ces cinquante journées qui ont fait la France et voient la montée des extrêmes, la manipulation des sections populaires, la division des modérés, la politique du pire menée par la cour et l'effondrement de la monarchie. Ce texte «constitue le témoignage le plus précis des événements. Il a d'ailleurs souvent servi de point d'entrée aux historiens de l'année 1792. On y observe la guerre des pouvoirs, remportée ici – et comme toujours – par celui qui gagne le monopole de la force organisée. On y apprend comment s'opère concrètement une révolution à la tribune, dans les sections parisiennes, dans la presse et dans la rue, sans oublier les Tuileries, où l'auteur se rendit aux moments les plus chauds», écrit Thierry Lentz, le biographe de Rœderer (Éditions Serpenoises, Metz 1989), qui nous en procure aujourd’hui une nouvelle édition.

L’intérêt du témoignage est grand en effet : il constitue quasiment l’unique source présentant le récit de ces journées dont Rœœderer a été l’un des principaux acteurs et qui, faute de concurrence, a été repris par tous leurs historiens. Or cette chronique a été rédigée postérieurement, en 1832, au début de la monarchie de Juillet et à la fin de la vie de son auteur. Car la carrière de Rœderer ne s’est pas limitée à ces quelques jours de bouleversement. Si son nom ne figure pas dans le Dictionnaire des Girouettes, son parcours politique sera encore long. Réfugié au Pecq chez son ami Lebrun, pendant la Terreur, il réapparaît après Thermidor et participe activement au coup d'État du 18 Brumaire, puis à la rédaction de la constitution de l'an VIII. Conseiller d’État, directeur de l’Instruction publique, c’est un de ces juristes – avec Cambacérès, Merlin de Douai, Boulay de la Meurthe, etc. – qui œuvrent dans l’entourage de Bonaparte et réalisent un immense travail de reconstruction dont nous avons recueilli l’héritage (Thierry Lentz (dir.), Napoléon et le droit, Éditions du CNRS, 2017).

Ce tenant dévotieux de la toute-puissance de la loi est nommé sénateur et créé comte d’Empire, mais est progressivement mis à l’écart tout en conservant diverses missions qui l’éloignent du cœur du pouvoir (ministre du royaume de Naples et du grand-duché de Berg). Après une éclipse normande sous la Restauration, il réapparaît en 1830 comme soutien de la Monarchie de Juillet et retrouve la Chambre des pairs jusqu’à sa mort en 1835. C’est alors qu’il fait retour sur les événements qu’il a vécus et publie en 1832 cette Chronique (Imprimerie de Lachevardière) qui sera reprise en 1863 au tome III de la publication en 8 volumes par son fils de ses écrits (Édition Firmin Didot). Ces œuvres sont au demeurant à replacer dans une production pléthorique et sans doute à interpréter dans le cadre plus large d’une volonté de leur auteur d’intervenir dans le débat politique pour construire et contrôler l’opinion publique (voir notamment Jean-Luc Chappey, «Pierre-Louis Rœderer et la presse sous le Directoire et le Consulat : L’opinion publique et les enjeux d’une politique éditoriale», Annales historiques de la Révolution française, octobre-décembre 2003).

Rendue aisément accessible par cette réédition, la Chronique de Rœderer, bien que déclarée «simple et lourde» par ce dernier, se lit quasiment comme un roman baignant dans l’espoir et le sang. Elle est éclairée par l’introduction, la conclusion biographique, la chronologie et la présentation des institutions dont l’a dotée Thierry Lentz, mais souffre d’un déficit d’informations en ce qui concerne la présentation des sources (le fonds Rœderer des Archives nationales, 29 AP, notamment) et de la bibliographie systématique qui aurait été nécessaire à sa mise en situation, ainsi que l’annotation quelque peu «légère» dont le texte est assorti. On appréciera en revanche l’index des noms de personnes qui en fournit l’identification et complète efficacement l’annotation.


Françoise Hildesheimer
( Mis en ligne le 24/02/2020 )
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