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Histoire & Sciences sociales  ->  Période Contemporaine  
 

Un Anglais à Paris
Herbert Lottman   Oscar Wilde à Paris
Fayard 2007 /  19 € - 124.45 ffr. / 260 pages
ISBN : 978-213-62892-9
FORMAT : 13,5cm x 21,5cm

Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Marianne Véron.

L’auteur de l’article : Arnaud Genon est docteur en littérature française, diplômé de l’Université de Nottingham Trent (PhD). Membre du Groupe «Autofiction» ITEM (CNRS-ENS), cofondateur du site http://herveguibert.net/, il est aussi l'auteur, chez l'Harmattan, de Hervé Guibert. Vers une esthétique postmoderne (2007).

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Oscar Wilde, plus d’un siècle après sa disparition, fascine toujours autant. Après les biographies de Robert Merle ou de Richard Ellmann, pour n’en citer que deux, Herbert Lottman, biographe américain vivant à Paris, spécialiste de la vie intellectuelle française, qui s’était déjà penché sur les figures de Camus (1978), Colette (1990) ou Flaubert (1990), se propose à son tour d’approcher l’attachant dandy britannique. Mais il fait le choix de ne pas reprendre l’ensemble de la vie de l’auteur du Portrait de Dorian Gray et de retracer plus précisément «l’amitié amoureuse d’Oscar Wilde pour Paris et pour la France, depuis son premier voyage à Paris en 1874 jusqu’à sa mort en 1900».

D’ailleurs, Wilde faillit quitter définitivement l’Angleterre pour la France. Sa pièce Salomé, écrite en français, retravaillée avec l’aide de Pierre Louÿs, fut censurée outre-Manche au nom d’une vieille loi datant de la Réforme protestante du XVIe siècle qui interdisait la représentation sur scène de personnages bibliques. Ainsi Wilde, dans un entretien donné au quotidien Le Gaulois, déclara être prêt à quitter l’«Angleterre pour [s]’établir en France où [il] prendrai[t] des lettres de naturalisation». Plus loin, il évoquait la France comme «une nouvelle patrie [qu’il] aime déjà depuis longtemps» et Paris comme «la ville des artistes […] la ville… artiste».

Wilde sut charmer ses contemporains, qu’ils soient anglo-saxons ou français. Lors de ses premiers voyages à Paris en tant que célébrité, il n’était encore qu’un conférencier qui séduisait l’Angleterre en évoquant ses «Impressions personnelles de l’Amérique». Ses premières pièces, jouées en Amérique et non en Angleterre, n’avaient pas le succès qu’auraient ses comédies plus tardives telles que L’Eventail de Lady Windermere ou De l’importance d’être constant. Néanmoins, c’est par ses conversations, son érudition et par sa maîtrise des paradoxes que Wilde enchantait tout ce que Paris pouvait compter de salons mondains ou littéraires, rencontrant les personnalités les plus brillantes ou prometteuses de l’époque telles que Mallarmé, Anatole France, Marcel Schwob, Léon Daudet, Sarah Bernhardt ou André Gide. Mais il s’attirait aussi la haine de certains, notamment celle du peintre Whistler. Puis, du fait de son homosexualité qu’il affichait de plus en plus ouvertement, naissaient les inimitiés ou les rancoeurs de ceux qui avaient d’abord été des amis (Pierre Louÿs, entre autres).

Mais en 1895, le duc de Queensberry, père de Lord Alfred Douglas, amant attitré de Wilde, allait mettre fin à la gloire de l’auteur anglais. Plus justement, pour répondre à une carte du duc jugée diffamatoire, Wilde allait-il entreprendre un procès à son encontre qui se retournerait rapidement contre lui et briserait sa vie et sa carrière, alors qu’il aurait pu traverser la Manche et échapper ainsi à la prison. Mais «sous le choc», Wilde ne put réagir à temps.

Le procès, déjà évoqué dans de nombreuses biographies et dont on a pu lire la retranscription récemment (Merlin Holland, Le Procès d’Oscar Wilde, Stock, 2005), est ici vu de la France, à travers les échanges des salons, les articles de journaux, les observations malveillantes de quelques écrivains français (les Goncourt, Alphonse Daudet) ou la défense courageuse de ceux qui prenaient conscience de la disproportion du châtiment (Octave Mirabeau, Henry Bauër) et qui cherchaient désespérément à faire signer des pétitions…

L’ouvrage nous éclaire enfin sur les tristes dernières années de l’écrivain déchu qui séjourna tantôt à Dieppe, tantôt à Berneval puis à Paris. Depuis qu’il était devenu Sebastian Melmoth (pseudonyme qu’il s’était choisi à la sortie de prison), il n’était déjà plus Oscar Wilde. Lui qui avait jadis brillé par ses aphorismes, par son esprit, par ses tenues extravagantes, n’avait désormais plus l’impression d’exister et déclarait à Gide, quelque temps avant de mourir : «Il ne faut pas en vouloir à quelqu’un qui a été frappé».

Cet ouvrage d’Herbert Lottman contribue, comme d’autres, à refaire exister Wilde, cet auteur si britannique et pourtant si français… Et ce genre de résurrection est toujours agréable.


Arnaud Genon
( Mis en ligne le 27/07/2007 )
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