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Histoire & Sciences sociales  ->  Période Contemporaine  
 

Pérégrins à la lisière de l'horreur
Léon Blum   Le dernier mois
Arléa 2000 /  11.45 € - 75 ffr. / 95 pages
ISBN : 2-86959-506-9

présenté par Pierre Bourgeade
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"Je m'appelle Frédérick Thyssen. (...) C'est votre gouvernement qui m'a livré aux nazis, il y a plus de quatre ans.
- Mon gouvernement ? Non, pas le mien.
- Enfin, le gouvernement français.
- Ce n'était pas non plus le gouvernement français".

En rééditant le récit donné par Léon Blum du dernier mois de sa captivité à Buchenwald où il a passé deux ans, et de sa libération, Arléa livre au public un témoignage poignant et singulier. Le récit, Blum l'a voulu bref et sans effet de style particulier : ce n'est même pas la sécheresse du carnet de notes qu'il consulte et condense; c'est plutôt l'expérience sans emphase de ces mots "tout à fait impuissants à caractériser l'existence (...) menée pendant deux ans".

Cette expérience n'est pas non plus celle des "horreurs indicibles qui se perpétraient à quelques centaines de mètres" du baraquement où Blum et sa femme se trouvent enfermés. L'univers concentrationnaire - et "la sauvagerie plus atroce encore" de l'extermination - n'est qu'un "indice" pour les prisonniers de Buchenwald : une odeur que le vent porte de temps à autre à la fenêtre. Seulement dans les derniers temps de leur prison, ils verront les déportés politiques "avec leurs visages hâves et creusés de longs sillons, le corps flottant dans leurs souquenilles zébrées, les pieds nus dans leurs socques". Autrement, ils sont seuls, sans contact que la garde SS et quelques prisonniers pour assurer le service et sans sortie que le dentiste quelquefois la nuit.

Le couple Blum ne se fait pas d'illusion sur l'issue vraisemblable de cette vie d'otage. Ils ont vu Mandel, tiré de leur prison commune, marcher au martyr sans "la moindre altération dans le geste de ses mains, dans sa démarche, dans son langage, dans les intonations de sa voix". et se savent promis au même sort. Aussi, quand en avril 1945 s'annonce le moment du départ, l'augure est particulièrement sinistre. Commence alors un long périple. Les Allemands fuyant l'avance alliée emportent en convoi ceux qui peuvent servir de monnaie d'échange, ou - pire - qui ne doivent pas survivre à l'écroulement final. Chaque heure peut être la dernière, chaque halte, définitive : Flossenbourg où "on liquidait par paquet, en toute hâte", Ratisbonne, dans une cellule où les Blum consignent sur leur carnet avec une piété douloureuse les ultimes mots, gravés sur les murs, de ceux qui allaient partir. Schoenberg, où ils apprennent la mort de Roosevelt - un événement qui touche Blum au plus profond, alors même qu'il doit se soucier de sa propre vie, Dachau..

Les pages consacrées au séjour en ce dernier endroit rendent un écho presque fantastique. C'est là que Blum croise Thyssen. Mais il croque surtout une compagnie hétéroclite de comploteurs contre Hitler, d'hommes politiques européens (tel l'Autrichien Schuschnigg, un ancien adversaire sur la scène européenne), qui compte même... un agent secret britannique. Etrange cercle, encore élargi d'un évêque et d'un Prince à Innsbruck, après le départ de Dachau et le tableau "le plus atroce" de son évacuation par les déportés. À chaque instant Blum comme sa femme redoutent la mort mais, à l'écoute des communiqués, espèrent en la vie.

Elle leur sera offerte, finalement, et Blum voit sous ses yeux le démantèlement de l'Allemagne nazie, avec ses derniers fanatiques, qui veulent se débarrasser des prisonniers à coups de grenades, ses enfants qui jouent dans les rues entre deux bombardements, et auxquels il voue une pitié inquiète, et, finalement, ses soldats qui jettent les armes en criant de joie "la guerre est finie". Le 4 mai 1945, un officier américain vient les trouver : avec ce souvenir commence "une autre vie" note Blum. Commence également une autre histoire, celle de l'après-guerre. L'homme d'Etat Blum, qui se campe à la fin de son récit en blouson et chaussettes de l'armée des Etats-Unis, aura de nouveau son rôle à jouer.


Thierry Leterre
( Mis en ligne le 03/11/2000 )
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