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Histoire & Sciences sociales -> Histoire Générale |
| Patrick Clastres Paul Dietschy Collectif Paume et tennis en France - (XVe-XXe siècle) Nouveau monde 2009 / 26 € - 170.3 ffr. / 386 pages ISBN : 978-2-84736-330-2 FORMAT : 14cm x 22,5cm
L'auteur du compte rendu : Grégory Prémon est agrégé d'histoire-géographie. Imprimer
Pour lhistorien, le jeu de paume reste principalement associé au serment de la salle qui porte son nom. Cest tout lintérêt de louvrage de Patrick Clastres et de Paul Dietschy que de donner une histoire à ce jeu et à son successeur, le tennis, en publiant les actes dun colloque tenu à Paris les 22 et 23 mai 2006. Louvrage sinscrit dans le renouveau actuel de lhistoire culturelle que Georges Vigarello appelait de ses vux dès 1988. Après les travaux de Michel Brousse sur le judo ou ceux de Joris Vincent sur le rugby, lhistoire du tennis a désormais elle aussi son ouvrage de référence.
Celle-ci sinsère dans un temps long. Après avoir montré quaux XVe et XVIe siècles, le jeu de Paume est le «jeu des puissants» (Jean-Michel Mehl), Serge Vaucelle explique son déclin progressif au profit de lescrime et de léquitation lors du siècle suivant. Au XIXe siècle, le jeu de Paume cède la place au tennis dont les règles sont peu à peu fixées. Les premiers grands champions tels les fameux «mousquetaires» français durant lentre-deux-guerres donnent au sport une popularité qui sexprime lors des grands événements sportifs à lexemple du tournoi de Roland-Garros. La notoriété de cet événement ainsi que la présence permanente de joueurs français parmi lélite mondiale permet à la France de maintenir son rang à lheure dun tennis mondialisé.
Cette longue histoire est également une histoire totale. Une histoire sportive évidemment : Stéphane Méry montre comment les règles et les techniques du sport ont été peu à peu définies. Une histoire également politique. Durant lentre-deux-guerres, les «mousquetaires» ont pour mission de représenter la France à létranger et de montrer au monde la puissance dun pays quon soupçonne de faiblesse après la saignée de la Grande guerre. Léconomie trouve sa place dans lhistoire du jeu quand limportance financière quil revêt dans les clubs et associations sportifs dans les années 1930 est démontrée par Xavier Breuil. Enfin et bien sûr, lhistoire du tennis est une histoire culturelle à tel point que les contributions de Jean-Michel Peter, dYvan Gastaut et de Stéphane Mourlane ne sont pas sans évoquer les travaux dAlain Corbin sur le désir de rivage ou lavènement des loisirs.
Lintérêt de louvrage tient dans sa volonté permanente de tirer profit de méthodes novatrices au service de nouveaux objets historiques. La contribution de Stéphane Méry sappuie ainsi sur «lhistoire vivante», méthode originale et inspirée de ce qui est pratiqué par les historiens britanniques où il sagit de «rejouer» réellement lévénement pour mieux le comprendre on ne peut dailleurs que saluer les photos des reconstitutions publiées dans louvrage. Françoise Taliano des Garets livre une étude intéressante sur la place des femmes dans le tennis de Suzanne Lenglen à Amélie Mauresmo - mariant ainsi habilement histoire du sport et «gender studies». Enfin, les études sur Jean Borotra, Philippe Chartier ou Yannick Noah illustrent tout lintérêt que les contributeurs de louvrage ont su tirer du renouveau de la biographie, renouveau qui les conduit le plus souvent et à fort bon escient à dépasser les aspects uniquement sportifs de la vie de ces hommes, pour sintéresser, par exemple, pour Jean Borotra, à son itinéraire politique.
Les grandes qualités de cet ouvrage tiennent en grande partie à la volonté actuelle de sauvegarder le patrimoine du tennis français grâce à la création du Tenniseum en 2003. La politique dacquisition de ce musée du sport donne aux historiens du tennis les moyens nécessaires à leurs travaux. La présentation rapide de ses fonds montre toute létendue des travaux qui restent encore à accomplir. Cest dailleurs tout le mérite de Patrick Clastres et de Paul Dietschy que de souligner les limites de leurs travaux, limites qui sont autant de nouvelles pistes pour les historiens du sport. Les auteurs regrettent notamment labsence de travaux sur les XVIIIe et XIXe siècles, parents pauvres de lhistoriographie du tennis en France. Un travail entier reste également à faire sur les acteurs du tennis quil sagisse des joueurs bien sûr, mais aussi des dirigeants et des supporters. Enfin, comment imaginer ne pas se pencher tout simplement sur lhistoire des techniques et de lenseignement du tennis ?
Grégory Prémon ( Mis en ligne le 25/08/2009 ) Imprimer
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