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Rihla saida : bon voyage ! | | | Jalel Bouagga Guide d'Oman - Parfums d'Arabie Jean Picollec - Les guides 2003 / 31 € - 203.05 ffr. / 318 pages ISBN : 2-86477-185-3 FORMAT : 13x21 cm
Lauteur du compte rendu : agrégée dhistoire et docteur en histoire médiévale (thèse sur La tradition manuscrite de la lettre du Prêtre Jean, XIIe-XVIe siècle), Marie-Paule Caire-Jabinet est professeur de Première Supérieure au lycée Lakanal de Sceaux. Elle a notamment publié LHistoire en France du Moyen Age à nos jours. Introduction à lhistoriographie (Flammarion, 2002). Imprimer
Les éditions Jean Picollec, qui avaient déjà donné un guide de lIrak, publient aujourdhui un guide dOman ; le sultanat dOman (capitale Mascate) se trouve à la corne de lArabie (1700 km de littoral), et détient une situation stratégique sur le golfe arabo-persique. Certes la situation actuelle nincite pas aux voyages touristiques dans la région du golfe et par ailleurs lOman nest quau tout début dune politique touristique, mais ces deux raisons même peuvent conduire le lecteur à ouvrir ce livre. Sa curiosité ne sera pas déçue, ni son plaisir. Louvrage est fort bien illustré par un calligraphe (Ghani Alani), les aquarelles dun peintre breton (Jean-Claude Crosson) et de superbes photos de lauteur ; des cartes générales et un index en facilitent lutilisation. Des encarts, clairs, donnent des précisions sur des aspects du texte.
Peu connu des Français, car sous influence anglaise, lOman souvre depuis peu au tourisme. Au XXe siècle, ce sont dailleurs des explorateurs anglais qui ont commencé à le découvrir : Bertram Thomas, qui entreprend en 1930-1931 la traversée du désert Rub al Khali, Harry Saint John Philby, puis Wilfred Thesiger (1910 2003), qui se veut héritier de Lawrence dArabie et dont le récit a été publié en français : Le désert des déserts (Plon, 1978).
Lauteur est tunisien, ethnologue, il vit à Paris où il dirige une agence de voyages. Le guide souvre sur une description des caractères géographiques, culturels et une présentation de léconomie et de la société omanaise. Celle-ci est composée de populations dorigines diverses : des communautés marchandes sont anciennement implantées, les Persans, à Mascate, des Indiens du Goudjerat (province du Nord Ouest de l'Inde). Les Baloutches (originaires du Baloutchistan) sont arrivés avec les Anglais, comme gardes militaires du pays. Lintérieur des terres, domaine des bédouins, est moins ouvert aux influences extérieures, plus fidèle à la tradition arabe. Les Omanais ont la réputation dêtre accueillants et offrent à leurs hôtes le kahwa (café) servi selon le rituel traditionnel, avec dattes et halwa.
Léconomie est fondée sur lagriculture et la pêche ; le pétrole est de découverte et dexploitation récentes (fin des années 60), avec des réserves estimées à une trentaine dannées. Aussi, demblée a-t-il été décidé de prévoir laprès pétrole et de profiter de cette rente pour réaliser les équipements du pays. Cest dans ce cadre que se produit aujourdhui une ouverture au tourisme.
Pays de la légendaire reine de Saba, lOman a fourni toutes les civilisations de lAntiquité en encens par les longues routes caravanières dabord (Pline lAncien compte 65 étapes de Tamna à Gaza), puis les routes maritimes. Dans une première période, y vivent des sociétés préislamiques , dominées par les Perses qui auraient apporté le savoir faire de lirrigation par «falaj» (galeries semi enterrées drainant leau des montagnes aux oasis), permettant une économie agricole prospère. En 630, Amr Ibn al As, émissaire du prophète, arrive en Oman ; se déroule alors la phase de lislamisation des tribus qui adoptent un islam austère dans sa version ibadite (dans libadisme, branche de lIslam née en Irak, lidée est que limam doit être choisi en fonction de ses qualités propres et non de ses liens de famille avec le prophète). En 1064 linvasion turque met un terme à lindépendance omanaise. Le début du XVIe siècle voit larrivée des Portugais qui en 1518 prennent Mascate et Ormuz. Ils introduisent lusage de lartillerie, la construction de forts et denceintes (aswar). La concurrence est rude entre les Européens pour surveiller cette région stratégique.
Au XVIIe siècle une dynastie omanaise sinstalle (les Yarubi ) qui gouverne un siècle (1644-1724) et développe le commerce maritime et la flotte, tout en multipliant la construction de forteresses destinées à assurer la sécurité des routes. Puis une seconde dynastie simpose, celle des al bu Said , à laquelle appartient le sultan actuel, qui chasse les Perses, réalise une alliance matrimoniale avec les Yarubi, reprend en main le pays, et fait en 1799 de Mascate la capitale. Les Omanais dominent Zanzibar, centre de la traite négrière et de la vente du clou de girofle et de livoire, «marchandises» sur lesquelles se fonde la richesse du sultanat. Ils devront labandonner à la conquête anglaise en 1890. La décolonisation sest effectuée dans les années 60, avec des difficultés dûes aux relations avec le Yemen voisin, ainsi quà la définition de frontières qui nappartenaient pas à la culture locale et résultaient de la présence européenne. Depuis 1970, lOman est dirigé par le sultan Qabous (dont la photo ouvre le guide) qui sest livré à une réforme en profondeur de la société, en instaurant deux conseils (lun nommé, le second élu au suffrage censitaire avec électeurs des deux sexes) et en tentant une évolution vers une démocratisation, alors quil fonde son pouvoir sur la reconnaissance de son autorité par les tribus.
LOman est partagé entre un littoral de marins - ne dit-on pas que Sindbad était omanais, originaire de Sour,- et un intérieur montagneux, avec le désert Rub al Khali. Une troisième partie : A travers Oman, décrit les différentes régions que peut découvrir le voyageur. Mascate : la ville, larchitecture, le souk de Matrah, la grande mosquée et les musées. La plaine de la Batinah, région de culture et de pêche, avec le circuit des châteaux forts (lannée 1994 a été déclarée année du patrimoine en Oman, ce qui a permis de nombreuses restaurations) ; aux plus aventureux : le circuit des wadis et la descente des canyons, des escalades. À Musandam, la corne de lArabie, des fjords à la beauté étonnante et une faune abondante, mais actuellement il faut pour sy rendre une autorisation du pouvoir. Djahirah avec la ville de Nizawa, cur de la civilisation ibadite, avec la nécropole de Bat et ses tombeaux de feu, inscrits au patrimoine mondial ; le Hajar, massif culminant à 3009 mètres, bordé doasis de piémont ; la Sharqiah, région isolée et aride, plaines de graviers, de rares acacias épineux, région des bédouins, et des randonnées chamelières ; le Hajar oriental ; JaAlan et Sour ; Barr al hikman, région peu connue, difficile daccès, et la réserve ornithologique de lîle de Matira, soumise à autorisation ; le Dhofar, pays où pousse lencens, région au climat tropical, riche en histoire, mais ruinée par la guerre en 1963, qui se reconstruit actuellement ; le désert Rub al Khali
Un espace de rêve donc, peu connu et peu visité, où se perdre en randonnées, escalades, visites architecturales ou plongées, selon ses goûts. La dernière partie du guide donne tous les renseignements pratiques, adresses et sites Internet. Alors, Rihla saida : bon voyage !
Marie-Paule Caire ( Mis en ligne le 15/03/2004 ) Imprimer | | |