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Un voyage au Carmel oriental
Jean-Claude et Geneviève Antakli   La Vie prodigieuse de Mariam Baouardy (1846-1878)
Editions du Parvis 2018 /  14 € - 91.7 ffr. / 96 pages
ISBN : 978-2880224349
FORMAT : 14,5 cm x 21 cm

L'auteur du compte rendu : Juriste, essayiste, docteur en sociologie, Frédéric Delorca a publié entre autres, aux Editions du Cygne, Les Régimes populistes face au mondialisme (2017).
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La religion provoque souvent les sarcasmes acerbes des athées, et l’agacement de ceux qui adhèrent à une croyance rivale. L’humilité dicterait plutôt d’y voir l’occasion d’un voyage. C’est ainsi sans doute qu’il faut prendre, avant tout, le dernier livre touchant que Jean-Claude et Geneviève Antakli consacrent à la religieuse stigmatisée Mariam Baouardy : un voyage à la fois dans l’univers du mysticisme carmélite et de la chrétienté orientale.

La petite sainte arabe (canonisée en 2015) est née en Galilée en 1846. Assassinée à Alexandrie à l’âge de 14 ans après avoir tenté de se soustraire à un mariage forcé (elle a la gorge tranchée profondément au cimeterre), elle est miraculeusement ramenée à la vie et soignée dans une grotte par une «dame en bleu» surgie de nulle part. Réfugiée en France, à Marseille, en 1863, elle se place sous la protection d’une religieuse anglaise, Sœur Véronique, qui l’installe au Carmel de Pau où elle prend le voile. Puis elle participe à la fondation d’un couvent en Inde, se trouve à l’origine du Carmel de Bethléem à partir de 1875 et meurt de la gangrène trois ans plus tard à l’âge de 32 ans.

En apparence, il ne s’agit là que de l’existence brève d’une petite moniale fragile, illettrée, qui disait d’elle-même qu’elle n’était qu’un «petit rien», mais il semble qu’en réalité ce fut une existence remplie de phénomènes surnaturels dont son entourage fit un inventaire minutieux et dont le couple Antakli fournit un exposé émerveillé et scrupuleux : des phénomènes qui font système avec toute l’histoire de la chrétienté d’Orient et d’Occident et qui, précisément à ce titre, font voyager au-delà du sort particulier de l’humble carmélite, dans deux mille ans d’histoire religieuse.

Il y a les stigmates physiques qui laissent la médecine sans voix : la cicatrice à la gorge de dix centimètres de long sur un de large ; le transpercement du cœur (transverbération), comme celui de Sainte Thérèse d’Avila, qui creusera lui aussi une cicatrice de quatre centimètres aux ventricules du cœur prélevé sur son cadavre à sa mort ; et les plaies sur les mains et les pieds qui s’ouvrent les jeudis et vendredis. Il y a les prouesses de la petite sainte : ses lévitations qui la portent sur des branches élevées des arbres à Pau, sa bilocation (dont hélas le couple Antakli ne donne pas les dates ni les modalités), son aptitude à lire l’avenir (le don de prophétie), dont certains de ses proches ont pu vérifier le bien-fondé dans leur propre vie. Il y a ses visions de Jésus, de Marie, sa communion aux souffrances du Christ, ses extases ; et les fulgurances qui par moments inspirent à la jeune analphabète des poèmes sur la création ou des louanges qui ont ému de grands écrivains de son temps. Il y a aussi, bien sûr, le pouvoir miraculeux de ses reliques après sa mort, notamment au profit d’un nourrisson sicilien prématuré voué à l’asphyxie programmée en avril 2009.

Mariam Baouardy a été emmenée par l’esprit au Paradis, au Purgatoire et en Enfer, comme Catherine de Sienne et Marie des Vallées. Elle a recherché l’anonymat dans ses couvents comme les autres grandes visionnaires du XIXe siècle, Catherine Labouré et Bernadette Soubirous. Et son chemin de souffrance est parsemé de bienfaits improbables dont elle bénéficie dès qu’il s’agit d’accomplir la mission que Dieu lui a assignée au service de l’ordre carmélite. Bref, elle réunit à son actif toutes les caractéristiques des élus les plus éminents tels que les ont toujours envisagés les fois catholique romaine et grecque orientale.

Les protestants sourcilleux, pour leur part, dénonceront sans doute, avec des arguments sérieux, le caractère «antibiblique», pour ne pas dire plus, de l’apparition dans le réfectoire du Carmel de Pau le 17 juillet 1867 de Saint Elie, le prophète qui avait défié Baal sur le mont du Carmel dans l’Ancien Testament, l’absence troublante de référence de la Sainte à l’eschatologie (la fin des temps) ou ce culte de la mortification du corps si commun dans le monachisme et pourtant si peu compatible avec l’évangélisme «athlétique» d’un Saint Paul, tout comme ils ont dénoncé, naguère, les égarements théologiques du film La Passion du Christ de Mel Gibson, pour lequel Myrna Nazzour, une autre visionnaire orientale – de notre époque, celle-là – dont le couple Antakli relaie les messages à travers l’Europe, a manifesté beaucoup d’enthousiasme. Les exorcistes s’interrogeront sur les possessions démoniaques qui terrassaient la pauvre Mariam, comme elles ont secoué à une autre époque le Padre Pio ou Marthe Robin. Les ufologues y verront une illustration du pouvoir insoupçonné des extraterrestres sur nos vies (cette «dame bleue» qui a soigné la petite sainte ne fait-elle pas pensée à celle qui évangélisa le Nouveau Mexique au XVIIe siècle, évoquée à propos des bilocations de Marie d'Agréda, mais qui peut aussi bien venir de bien plus loin que la «Vierge Marie»… ?) ; les athées, peut-être une occasion de dépasser leur scepticisme.

En tout cas, pour tous, cette biographie, très condensée et écrite dans un style très agréable, peut être un outil de réflexion utile sur le monde chrétien, sur les phénomènes mystiques et sur les possibilités existentielles qui peuvent parfois être données.


Frédéric Delorca
( Mis en ligne le 23/07/2018 )
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