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Histoire & Sciences sociales  ->  Biographie  
 

Un homme décidément exceptionnel
Alix Delage   Jean-Henri Fabre - L'observateur incomparable
Rouergue 2005 /  24 € - 157.2 ffr. / 410 pages
ISBN : 2-84156-689-7
FORMAT : 15,0cm x 24,0cm

L’auteur du compte rendu : Rémi Luglia, professeur agrégé d’Histoire et interrogateur en deuxième année dans une classe préparatoire commerciale, est doctorant à Sciences-Po Paris où il mène une recherche sur l’histoire de la protection de la nature en France de 1854 à nos jours à travers le mouvement associatif.
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Apparemment, de nos jours, Jean-Henri Fabre est plus connu et apprécié au Japon ou en Russie qu’en France, sa patrie de toujours. Et à la lecture de l’intéressante biographie d’Alix Delage, on ne peut que le déplorer tant ce personnage hors du commun mérite d’être remarqué.

Pour synthétiser, Jean-Henri Fabre est à la fois un homme simple et complexe. Simple parce qu’il est animé de hauts principes moraux au premier rang desquels figurent la rigueur, l’honnêteté, la franchise et surtout l’amour de son prochain et particulièrement des enfants. Cette droiture l’animera toute sa vie. C’est un personnage complexe aussi par ses itinéraires atypiques, par son caractère de touche-à-tout scientifique, pas son insatiable curiosité du vivant. Jean-Henri Fabre est un personnage attachant et c’est un des indéniables mérites du livre d’Alix Delage que de savoir nous le faire découvrir et aimer.

A partir d’une progression chronologique, d’usage pour une biographie mais néanmoins très pertinente ici, l’auteur nous donne à voir la construction permanente du savant à mesure que l’homme se forme et vit. Une vie rythmée par des lieux : l’Aveyron de sa prime enfance ; Avignon, à la fois lieu de réussite et repoussoir ; Sérignan enfin avec son Harmas, lieu de l’accomplissement. On regrette que les photographies choisies donnent si imparfaitement à voir ce dernier lieu, pourtant propriété de la municipalité, aménagé en musée en l’honneur de son illustre habitant. On aurait aimé contempler cette allée de lilas en fleurs, ce jardin que le maître a aménagé pour attirer le maximum d’insectes et où il s’est penché sur d’innombrables bestioles.

En même temps que d’être un savant (il a consacré sa vie entière à la science), Jean-Henri Fabre a été un homme durement marqué et touché par la vie du XIXe siècle. Vagabond par nécessité à 15 ans, dignement pauvre sans être nécessiteux une bonne partie de sa longue vie, il a connu la douleur renouvelée du décès de proches ainsi que la décrépitude du corps à la fin de sa vie. Rien ne lui aura ainsi été épargné. Il gardera tout au long de son existence le chagrin de la mort brutale de ses deux premiers enfants, encore nourrissons. Son fils Jules ensuite partira au moment où il donne à voir ses pleines possibilités intellectuelles. Ses deux femmes, aimées et toujours soutiens fidèles, disparaîtront avant lui. Il verra aussi mourir sa petite fille Jeanne, son fils Emile. Tous ces drames le marqueront profondément, malgré sa pudeur...

Une vie dure donc, mais aussi vie de labeur consacrée en grande partie aux autres. Car la seconde vocation de Jean-Henri Fabre, après la recherche scientifique, est la transmission de son savoir. A cet égard, c'est un précurseur, celui d’une école ouverte à tous, garçons et filles, à qui l’on propose avant tout de réfléchir et de découvrir. Son enseignement devant différents publics rencontre le succès, pas toujours apprécié chez les misogynes. Ses livres de vulgarisation scientifique, à la portée de tous mais exigeants sur le fond comme sur la forme, se vendent très bien et forment des cohortes entières d’élèves. C’est dire combien Jean-Henri Fabre a pu laisser sa marque ne serait-ce que par le biais des si fécondes «leçons de choses». Pour cela, il a accumulé de manière le plus souvent autodidacte une somme impressionnante de connaissances qui auraient du lui ouvrir les portes de l’université (mais il refusait de s’insérer dans un réseau ou de mettre en place une stratégie ; éléments pourtant indispensables pour obtenir un poste) ou de l’Agrégation, s’il en avait passé le concours. Jean-Henri Fabre l’avait bien compris, le cœur du métier de professeur, ce ne sont pas de ci-devant «méthodes pédagogistes innovantes» mais bien une passion pour sa discipline, appuyée sur des connaissances approfondies. Il est sans doute l'un des meilleurs modèles de l’enseignant chercheur qui allie les recherches les plus poussées à la nécessité de les expliquer au profane, y compris aux enfants des écoles et des collèges. Enseignant, Fabre l’a été toute sa vie, que ce fût en tant qu’instituteur ou professeur au Lycée d’Avignon ou en tant que précepteur de ses propres enfants ensuite.

Mais la grande œuvre de sa vie, celle qui lui assure un prestige international immense et une aura encore remarquable, est bien ses Souvenirs entomologiques. En dix volumes, Jean-Henri Fabre nous conte le monde des insectes de façon inimitable. Appuyé sur un style et une expression mémorables, c’est le vivant qui nous est décrit et expliqué. Quelle rupture avec l’aridité forcée de la science qui pour être sérieuse et valable semble devoir être ennuyeuse et mise en équation !

Peut être est-ce pour cela que ce savant dérange encore un certain nombre de scientifiques... Peut être est-ce pour disqualifier un homme sans doute un peu trop révolutionnaire que, comme le démontre si bien Alix Delage par une analyse poussée et des citations nombreuses (trop ?) des écrits de Jean-Henri Fabre, certains lui prêtent abusivement des idées dont l’inanité est désormais bien établie, comme le «créationnisme»...


Rémi Luglia
( Mis en ligne le 18/10/2006 )
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