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Histoire & Sciences sociales -> Sociologie / Economie |
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Il y a communiquer et communiquer... | | | Paul-Marcel Lemaire Communiquer : Pour quoi faire ? Cerf 2011 / 22 € - 144.1 ffr. / 250 pages ISBN : 978-2-204-09540-2 FORMAT : 13,5cm x 19,5cm Imprimer
A la fin des années 1960, le philosophe Marshall McLuhan théorisait ce quil appelait «le village planétaire» (Global Village). Il sagissait alors de rendre compte des effets du développement de la mondialisation et des progrès des médias et des technologies de l'information et de la communication sur la vie des hommes. Ceux-ci vivraient dans un monde unifié. Il ny aurait plus quune culture. Le monde ne serait quun seul et unique village, une seule et même communauté, «où l'on vivrait dans un même temps, au même rythme et donc dans un même espace».
Cette façon de considérer le monde parait optimiste à bien des égards. Daucuns nhésitent pas à brocarder son excessive naïveté, son caractère bel et bien utopique. Cest notamment le cas de Paul-Marcel Lemaire, qui dans son récent ouvrage Communiquer. Pour quoi faire ? défend lidée que «la communication a été dépouillée de ses traits propres, pour mieux envahir la culture collective». Car si la communication, dans son acceptation la plus large et la plus sibylline, est lun des domaines les plus labourés et retournés en tous sens, un certain nombre de questions essentielles sont rarement traitées.
Cest cette sorte dérème, ce territoire délaissé à la fois par les études savantes et par les manuels de confection rapide que Paul-Marcel Lemaire aborde dans cet essai. Les grandes interrogations auxquelles lenseignant sefforce de répondre relèvent tant des sciences humaines que de la philosophie. En effet, lauteur combine diverses perspectives, si bien que son approche est multidisciplinaire. Toutefois, prévient lessayiste au cours de son propos introductif, il répugne à employer franchement cette épithète tant elle a été galvaudée. «Plus modestement, écrit-il, nous nous rattachons à lécriture dessai, à lécole des grands maîtres de ce genre littéraire, comme Montaigne, Pascal et dautres, avec tous les risques de lengagement personnel que comporte cette décision».
Suivant cette méthode, Paul-Marcel Lemaire consacre son ouvrage à la préoccupation constante de desserrer les liens des langages spécialisés. Il sagit au surplus de retourner à lusage du langage courant et ordinaire pour lamener à exprimer des questions capitales. En cela, lauteur entend se situer dans la continuité de Ludwig Wittgenstein. Au fil des pages, sont abordés de nombreux thèmes comme les ailleurs de la communication, lindépassable principe dincertitude, les enseignements à tirer de la féconde réflexion de Paul Ricur, les liens entre relation(s) et communication ainsi que la place finalement très résiduelle de la communication dans le monde actuel.
Si le constat parait sombre, Paul-Marcel Lemaire esquisse quelques pistes éthiques afin de retrouver la communication, laquelle se fonde entre autre sur une sage modération, sur la reconnaissance de laltérité et de «la transcendance de lautre». P.-M. Lemaire recommande en sus de «privilégier la parole chercheuse de sens». Lauteur affirme dautre part quil nest pas de communication «sans sensibilité spirituelle» ni «courage de lespérance». Il sagit finalement de résoudre les tensions inhérentes à linsociable sociabilité des hommes. Pour ce faire, indique lauteur, il importe de se replonger dans la Bible et plus spécialement dans les textes du Livre de la Genèse...
Jean-Paul Fourmont ( Mis en ligne le 08/11/2011 ) Imprimer | | |
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