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Universelle et cloisonnée : la France
Emmanuel Todd   Hervé Le Bras   L'Invention de la France - Atlas anthropologique et politique
Gallimard - NRF Essais 2012 /  25 € - 163.75 ffr. / 517 pages
ISBN : 978-2-07-013643-8
FORMAT : 15,2cm x 23,9cm
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L’Invention de la France, écrit par Hervé Le Bras et Emmanuel Todd, a été publié pour la première fois en 1981. L’ambition explicite des auteurs était alors de démontrer l’hétérogénéité anthropologique de la France et le poids de constantes régionales sur ce territoire, soulignant ainsi la force de rassemblement d’une Nation capable de fédérer des peuples aussi divers.

L’analyse des deux démographes repose avant tout sur les structures familiales, qu’ils regroupent en trois catégories (nucléaire, large-autoritaire ou communautaire), et qui expliquent selon eux la formation de cultures politico-religieuses régionales. L’ouvrage souligne par exemple à de nombreuses reprises le poids des familles communautaires dans les régions de gauche du Sud-Ouest de la France. La démonstration est plutôt convaincante, et surtout très agréable à suivre ; les auteurs proposent des cartes parfois étonnantes dont les analyses sont brèves mais pertinentes. Les sujets assez divers de ces cartes (taux régionaux de suicide, d’alcoolisme, de prostitution, de meurtres…) permettent de prendre la mesure du fossé anthropologique et culturel qui sépare encore nos différentes régions, malgré l’effort d’homogénéisation de l’administration française. Le lecteur sera parfois surpris par certains faits, comme la non-correspondance des régions ouvrières et du vote communiste, que les auteurs expliquent davantage comme la conséquence de l’effondrement de structures familiales.

Le texte de 1981 souligne l’inexistence de fait d’une «race» française, et donc la nécessité d’une culture commune au pays. Emmanuel Todd et Hervé Le Bras insistent largement sur cette diversité qui empêche tout discours ethnique ; ceci expliquerait selon eux que la France ait refusé le protestantisme pour lui préférer l’universalisme catholique, et que la droite traditionnelle, du fait de ses différentes origines régionales, n’ait pu forger un modèle racial français à même de s’opposer entre autre à celui du Juif (ce qui semble particulièrement discutable au regard de la tradition antisémite française).

On est tenté de croire à cette idée que la France serait anthropologiquement destinée à l’universalisme. Cependant, l’analyse du vote F.N., qui constitue le principal apport de cette réédition, est malheureusement contestable. Emmanuel Todd et Hervé Le Bras l’expliquent avant tout comme le signe d’une société malade, atomisée. Durkheim avait interprété le suicide comme la conséquence de l’individualisation et la rupture de liens sociaux ; il en serait de même à notre époque pour le vote frontiste : «lorsqu’on circule aux marges des agglomérations, là où les pavillons s’intercalent entre des champs cultivés, des bois ou des friches, on est frappé par l’importance des grilles, des haies et surtout des panneaux indiquant la présence d’un chien méchant. Ni la proportion d’étrangers aux alentours ni la fréquence des délits ne peuvent expliquer cette attitude défensive et désespérée de rupture avec le voisinage, en vérité de crainte de tout le voisinage. Les bureaux de votes proches recueillent des scores F.N. maximaux». Les auteurs jugent sévèrement ce recroquevillement sur soi sans pour autant s’intéresser à sa cause. Si en effet on ne constate pas d’étrangers dans ces zones périurbaines, c’est que bien souvent les familles qui y habitent ont fait l’effort de fuir des zones de banlieue à majorité immigrée. L’étude ne rend nullement compte de cette dynamique d’exode des classes populaires chassées par les loyers des centres-villes et cherchant à s’échapper des banlieues à majorité immigrée. La méthode démographique et cartographique montre alors ses limites, et la faiblesse de cette analyse tend paradoxalement à penser que le F.N. a encore de beaux jours devant lui...


Antoine Robineau
( Mis en ligne le 28/02/2012 )
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