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Histoire & Sciences sociales -> Sociologie / Economie |
| Raquel Capurro Le positivisme est un culte des morts : Auguste Comte Epel 2001 / 21 € - 137.55 ffr. / 160 pages ISBN : 2908855666 Imprimer
Raquel Capurro a fait des études de philosophie en France et de psychologie en Uruguay. Elle exerce aujourdhui comme psychanalyste à Montevidéo et fait partie de lEcole Lacanienne. Cest donc sous langle de la psychanalyse quelle nous fait part de ses réflexions sur ce penseur français du XIXème plus connu comme fondateur de système philosophique et historien des sciences que comme fondateur de religion. Dans cette monographie clinique, historique et sociale, il sagit, nous dit l'auteur, «de cerner la particularité du dire de cet homme qui témoigna, par tous les moyens dont il disposait, de linsupportable malaise dont il souffrait. »
On ne sait jamais trop comment aborder loeuvre dAuguste Comte. Ses deux traités, le Cours de philosophie positive en six volumes et le Système de politique positive en quatre volumes sont souvent difficiles à lire et séduisent peu le lecteur à première vue. Or, Raquel Capurro, en sattachant à deux évènements de la vie du philosophe, son expérience de la folie puis son amour et deuil pour Clotilde de Vaux, nous plonge dans lune des oeuvres philosophiques majeures du XIXème siècle. En sappuyant sur la correspondance de Comte et quelques morceaux bien choisis de ses ouvrages, elle nous entraîne dans la genèse de cette oeuvre. Etrange personnage que cet homme expérimentant la folie à 28 ans, découvrant lamour à 46 et qui, quatre ans plus tard, «habitant une tombe anticipée
», parle à ses contemporains «dans un langage posthume
» !
Parti sur les traces du fondateur du positivisme, le lecteur de 2003 peut-il encore entendre quelque chose de ce discours doutre-tombe ? Après la plongée au coeur du monde médical et de la vie politique française du XIXème, on retient deux idées fortes de la philosophie de Comte. Tout dabord, une doctrine fort étrange du cerveau et, dautre part, la mise en valeur du lien social. Loin dêtre pris comme lorgane le plus sophistiqué du système nerveux, Comte pensait que le cerveau était lorgane de lhumanité par lequel celle-ci avec son passé et ses morts - gouverne les vivants. De sa crise cérébrale, Comte a retenu que la folie nest pas une «irritation du cerveau» mais lacceptation ou le refus de la vie, toujours placée sous lempire des morts.
Comte nous rappelle aussi que «cette vie sociale, seule, est vraiment réelle». En enseignant les principes moraux et en inspirant les grandes actions morales, la religion positiviste rappelle à tous les membres de la société quils ne sont pas isolés dans leur histoire personnelle, mais quils font partie dune grande communauté, celle de lhumanité. Peut-être que Comte, en évoquant les esprits du passé, fait peser sur nos cerveaux le poids beaucoup trop lourd des générations mortes mais «Vivre avec les morts, dit-il, constitue lun des plus précieux privilèges de lhumanité».
Entre 1842 et 1844, écrit Raquel Capurro, Comte sétait trouvé dans une impasse. Il sétait rendu compte que la science ne pouvait traiter des questions de la subjectivité. Comte avait alors décidé de remanier sa doctrine et de toute reprendre du point de vue subjectif en incluant donc le social et le collectif. La science devient un préambule à la religion universelle et sans dieu. Elle seule, nous dit Comte, peut prendre en compte laffectivité dans sa dimension sociale, cest-à-dire le lien avec lautre. Comte avait proposé une morale de la solidarité mais la mort le rattrapa.
Aurélia Giusti ( Mis en ligne le 21/12/2002 ) Imprimer | | |
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