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Histoire & Sciences sociales -> Sociologie / Economie |
| Françoise Hatchuel Savoir, apprendre, transmettre - Une approche psychanalytique du rapport au savoir La Découverte - Poche 2007 / 8 € - 52.4 ffr. / 158 pages ISBN : 978-2-7071-5196-4 FORMAT : 13,0cm x 19,0cm
Première publicarion en janvier 2005 (La Découverte).
L'auteur du compte rendu : Ludivine Bantigny est agrégée et docteur en histoire. Ses travaux portent sur lhistoire sociale et culturelle de la France dans la deuxième moitié du XXe siècle, et abordent dans ce cadre lhistoire des sciences du psychisme. Sa thèse, «Le plus bel âge ? Jeunes, institutions et pouvoirs en France des années 1950 au début des années 1960», évoque notamment le rapport au savoir dans diverses institutions (scolaire, judiciaire, militaire
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Quelque peu hybride dans sa forme, le livre de Françoise Hatchuel est le résultat de réflexions menées dans le cadre de léquipe «Savoirs et rapport au savoir» du Centre de recherche en éducation et formation (Université Paris-X-Nanterre). Hybride en effet, dans la mesure où un tel sujet, «le rapport au savoir», savère si vaste quil conduit lauteur à aborder toutes sortes de domaines, de lhistoire à la psychosociologie, de lanthropologie aux sciences de léducation. Cela confère parfois à certains développements un caractère lapidaire, voire sommaire : Lacan et la psychanalyse occupent deux pages, la psychologie de la cognition, autour de Piaget, Wallon et Vygotsky, une à peine
Foucault, Althusser, Bourdieu et Passeron défilent également sous les yeux du lecteur, mais leur apparition est fugitive dans louvrage, quoique fondatrice pour le sujet. Cette présentation au lance-pierre est dautant plus étonnante que lauteur revendique avant toutes choses limpérieuse nécessité de construire les savoirs au lieu de les empiler. Mais cet écueil napparaît que dans les premiers chapitres du livre, qui évoquent la genèse du «rapport au savoir» et les liens entre savoir et pouvoir.
Soucieuse de donner une perspective historique à cette étude, Françoise Hatchuel retrace lémergence de la notion de rapport au savoir, apparue à la fin des années 1960 dans le champ de la psychanalyse, de la sociocritique et de la formation dadultes. Mais cest avant tout la démarche dordre psychanalytique qui prévaut dans ces pages, avec de belles réflexions sur le désir de savoir et sur ce que le savoir représente dun point de vue fantasmatique pour un individu. Cest la dimension active et dynamique du sujet dans la constitution de son rapport au savoir qui retient surtout lattention de lauteur. Celle-ci rappelle combien, chez Freud, la «pulsion de savoir» est intimement liée au désir, qui est désir du désir dautrui, souci de la reconnaissance et de lamour de lautre. Apprendre, cest aussi «accepter de ne pas tout savoir, faire le deuil de la toute-puissance enfantine». La référence aux travaux de Gérard Mendel, sur la socialisation du rapport au savoir dans un cadre institutionnel (lécole ou la famille) notamment, se fait ici très prégnante.
Lun des grands intérêts du livre réside dans lalliance subtile entre réflexion de nature épistémologique et exposé de cas pratiques, issus de travaux dobservation. Car le savoir est ici considéré avant tout comme source de pratiques sociales. Françoise Hatchuel, auteur déjà dun ouvrage intitulé Apprendre à aimer les mathématiques (PUF, 2000), rend compte en particulier dexpériences réalisées dans des «ateliers de mathématiques» et dentretiens menés dans ce cadre avec des adolescents et de jeunes adultes.
Les chapitres les plus denses de louvrage concernent sans doute le rapport proprement féminin au savoir et la situation de lenseignant. Dans le premier cas, cest la question de la différence sexuée quant à linvestissement des filles et des garçons dans lécole et dans leur rapport respectif au savoir qui se révèle essentielle. Létude va alors au-delà des travaux de Christian Baudelot et Roger Establet sur la hiérarchie des filières. Elle aborde aussi les pratiques sélectives des enseignants, les micro-interactions intervenant dans une classe, la fréquente (auto)dévalorisation des filles par opposition à la surestimation souvent observée chez les garçons. Un rapprochement avec lautobiographie de Simone de Beauvoir permet de rappeler que celle-ci a grandi dans lidée, exprimée par son père, quelle avait un "cerveau dhomme" «Quel dommage que Simone ne soit pas un garçon. Elle aurait fait Polytechnique.»
Le second cas, touchant à la situation denseignement, permet danalyser, exemples concrets à lappui, combien est complexe le «contrat» passé entre un enseignant et ses élèves. Ou : en quoi cette demande de savoir quadressent les seconds au premier est porteuse dautres demandes imaginaires, et vice-versa.
Ludivine Bantigny ( Mis en ligne le 13/04/2007 ) Imprimer | | |
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