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Histoire & Sciences sociales  ->  Témoignages et Sources Historiques  
 

Le destin de l’Empire français vu par Pierre Messmer.
Pierre Messmer   Les blancs s’en vont - Récits de décolonisation
Albin Michel 1998 /  17.4 € - 113.97 ffr. / 301 pages
ISBN : 2 226 10479 8
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« Dieu est haut et le roi est loin » pensaient les coloniaux de l’Ancien régime. Pierre Messmer avoue, lui aussi, avoir partagé cet aphorisme quant il fit le choix de l’école nationale de la France d’outre-mer. Mais les temps étaient vraiment autres et la guerre allait marquer le point d’orgue de l’utopie assimilationniste, dont naîtra la fragile Union française, avant que la décrue n’emporte l’Empire.

Après son premier récit autobiographique, Après tant de batailles, Pierre Messmer nous livre un nouveau témoignage, au titre sans équivoque. En onze chapitres et sur une trame presque chronologique, il nous donne son opinion, sa vision des événements et des circonstances qui ont marqué la disparition de cet empire colonial que fit et qui fut la France.

Pierre Messmer, emploie toujours un style très direct. Il écrit ainsi un livre d’histoire qui se lit véritablement comme un roman, un roman des illusions perdues et plus encore des occasions gâchées. Il brocarde ainsi sans cesse la bêtise des administrations centrales et de ces petits bureaucrates qui n’entendaient rien aux choses et qui, c’est le plus consternant, ne furent même pas de bons administrateurs. Si les pages consacrées aux grands conflits de l’Indochine et de l’Algérie sont sans surprise, mais non sans intérêt, c’est plus encore ses considérations presque morales ou, si tant est que cela soit académiquement recevable, ses positions philosophico-politiques qui donnent à ce livre toute sa valeur et son originalité.

En effet, Pierre Messmer nous dévoile des aspects peu connus des effets de notre passage sur ces terres lointaines et surtout, il porte un regard sans concession sur les politiques menées depuis la disparition, de fait, de la Communauté. Ainsi le chapitre consacré à la Mauritanie, chapitre intitulé de façon paradoxale « La Mauritanie n’a pas été colonisée », porte-t-il à notre connaissance l’impact de notre littérature, ou plus justement des œuvres de certains de nos écrivains les plus contemporains tels Odette du Puigaudeau et, ce qui peut surprendre, Diégo Brosset, qui commanda la 1re division française libre dans les Vosges. Tout l’ouvrage recèle ainsi de ces petites surprises, de ces découvertes, qui ravissent le lecteur averti. Elles sont le fruit des constants va-et-vient de l’auteur entre son expérience personnelle, sa connaissance des acteurs et des faits, et d’une documentation bien étayée. Cette construction savante et rigoureuse devrait d’ailleurs être celle de tout témoignage !

Enfin, et c’est à mon avis l’aspect le plus passionnant de ce livre, le point de vue de Pierre Messmer sur la politique de coopération française avec les états africains clôt cet état des lieux en dressant un rapide et critique bilan des méthodes « personnalistes ». Ainsi, sans d’ailleurs s’appesantir, celles de Jacques Foccart dans un premier temps et avec un certain talent, puis celles de Jean-Christophe Mitterrand dans un autre et avec moins de morale.

Pierre Messmer ne se contente pas de décerner des satisfecit. Il souligne simplement que la politique de coopération, globalement si décriée, a donné des résultats pas si mauvais en matière agricole et que, surtout, renoncer complètement à la personnalisation des relations avec les dirigeants africains n’est pas forcément un gage de réussite. Il donne ainsi un bon nombre de pistes afin de revivifier et de redonner sens à ce mot et à ce principe politique qu’il préfère aux nouvelles formes d’interventions, cette nouvelle morale de l’action qui incite les grandes puissances mondiales à jouer les gendarmes du monde et auxquels il préférerait l’instauration d’une véritable force interafricaine agissant, à terme, sous mandat onusien.

Pierre Messmer, nul ne peut le contester, a pris une posture morale et politique qui lui assure aujourd’hui un véritable magistère personnel. Certes, des contradicteurs existent et sur certains points son action et ses prises de position ne sont certainement pas absentes de critiques. Cependant, à le lire et c’est aussi un des apports essentiels de cet ouvrage, l’on découvre, ou redécouvre hélas, ce qu’est, ou ce que pourrait être, de la bonne politique.


Hervé Lemoine
( Mis en ligne le 17/12/2001 )
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