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Contrepoint
 Collectif   Atlas Alternatif
Le Temps des cerises 2006 /  20 € - 131 ffr. / 372 pages
ISBN : 2-84109-532-0
FORMAT : 15,0cm x 24,0cm
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La mondialisation ou l’accélération et l’intensification de la mondialisation sont le grand phénomène des dernières décennies, en particulier depuis l’écroulement du bloc soviétique. Le citoyen des démocraties consulté sur la politique de son Etat a besoin d’informations fiables et étendues sur le contexte international dans lequel son Etat ou son organisation continentale d’Etats (L’Union européenne par exemple) doit inscrire son action. Il s’agit autant de savoir ce qui se fait que ce qu’il est possible de faire en fonction du réel, de ses intérêts (parfois légitimes) et de ses conceptions politiques. Or l’information sur la mondialisation des médias oscille entre le fouillis inextricable de l’écume des faits sans mises en perspective et aussitôt oubliés, et le sensationnalisme des crises, pas toujours beaucoup mieux expliquées, mais qui servent de points d’appui à la répétition infatigable de visions du monde dominantes et simplistes dans les rédactions (démocratie contre islamisme rétrograde, liberté contre dictature, etc.). On renvoie à ce sujet au très bon livre récent de Jean Bricmont, Impérialisme humanitaire, qui préface le présent ouvrage.

Or quand le citoyen veut creuser la question, il risque de tomber sans cesse dans les librairies du grand public sur les sources convenues des grands médias : spécialistes patentés, prétendument objectifs, naturellement démocrates et épris de vérité, mais d’un solide réalisme (au nom de la défense de La Liberté bien sûr, voire des Femmes…). Or il se trouve que ces «spécialistes» sont souvent tels parce que les médias les ont cautionnés de l’aura cathodique du sacre et du prestige de l’invitation aux grands messes de «l’information» de masse. L’intérêt d’un dictionnaire de l’état du monde proposant des points de vue alternatifs, généralement négligés ou écartés, est évident. Or les auteurs de cet ouvrage sont loin d’être des ignorants dans leurs domaines respectifs, puisqu’ils en sont aussi spécialistes universitaires (économistes, géographes, etc.) et/ou connaisseurs empiriques de terrain depuis des années : voir la liste des auteurs en fin d’ouvrage. Parmi eux : Samir Amin, Georges Labica, André Prenant. Il est donc au moins intéressant de les lire pour entendre enfin un autre son de cloche.

Le titre d’Atlas est un peu étrange, car les cartes manquent cruellement dans cet ouvrage, à moins de nommer ainsi les reproductions grises mal définies qui «illustrent» tristement les pages titres des articles. Problème financier d’un éditeur courageux mais pas très argenté sans doute. On se reportera donc à nos beaux atlas cartographiques au moment de lire les textes des auteurs sur leurs régions d’étude. Un autre sens du mot «Atlas» peut justifier le titre : la référence au géant qui doit porter le monde sur son dos, le fardeau de ses malheurs et peut-être celui de la connaissance de la vérité. Il ne s’agit pas d’ailleurs de la noircir, mais de la rétablir enfin. Car la «mondialisation heureuse» (Minc) est une provocation d’idéologue libre-échangiste du Nord. Il est fort possible et parfois vraisemblable que certains pays du Sud tirent leur épingle et un grand profit du jeu économique actuel, mais ils sont une minorité et ont généralement bénéficié de conditions spéciales. D’autre part, les contrecoups de la mondialisation en voie de dérégulation croissante sont nombreux et pas toujours «heureux». Si l’on veut les intégrer dans un calcul global du processus, encore faut-il dire les faits, mesurer les impacts, définir les responsabilités, les bénéficiaires et les victimes. Cela pourrait - sait-on jamais ? - nous éclairer sur les raisons des mentalités du Sud que nous déplorons souvent avec la compassion du progressiste modéré, la condescendance du «réaliste» indifférent ou le mépris agressif de l’ignorant inquiet.

L’ouvrage ne cache d’ailleurs pas son intention polémique à l’égard de sciences politiques et sociales lénifiantes et assume un «engagement anti-impérialiste» («Pourquoi nous avons encore besoin d’être anti-impérialistes», de J. Bricmont). Il ne s’agit pas de jeter «l’objectivité» aux orties par passion, mais de combattre des visions dominantes unilatérales dangereuses et souvent mensongères, qui procèdent de l’inféodation politique cachée des spécialistes. Il ne s’agit d’ailleurs pas pour autant d’idéaliser les régimes socio-politiques des pays et des peuples victimes de la mondialisation, quelles que soient nos sympathies à leur égard. Mais il s’agit de savoir si «le savoir» institutionnel du Nord – d’ailleurs parfois traversés de contradictions entre intérêts nationaux - doit servir de légitimation aux ambitions des puissances sur le reste de la planète, comme autrefois certaine science positive anthropologique ou économique.

L’ouvrage comporte deux parties («sections») : «Caractéristiques générales de l’impérialisme dans le monde» (pp.17 à 78) et «L’impérialisme occidental : approche par zone géographique» (pp.79 à 356). Cette seconde partie comporte 16 chapitres régionaux par ensembles continentaux ou sub-continentaux. Quelques mois après le mystérieux décès en prison de S.Milosevic – au fait, où en est le rapport final d’autopsie contradictoire ? -, il reste utile de lire une autre histoire de l’explosion de la Yougoslavie : celle de Dianne Johnstone (ch.3 «Balkans», pp.125-130), qui met en lumière le rôle peu glorieux des puissances occidentales, donneuses de leçons. L’actualité nous invite à lire particulièrement l’économiste égyptien Samir Amin sur le Moyen-Orient (ch.11), dont les propos fort intéressants et dérangeants n’ont pas grand chose à voir avec la vulgate médiatique occidentale dominante. Frédéric Delorca fournit une fiche sur l’Irak et l’Iranien Morad Shirin nous explique d’une façon originale et fort opportune les raisons des tensions de plus en plus médiatisées entre l’Iran et le bloc Europe/Etats-Unis, alors qu’on nous prépare déjà à une opération militaire. Au lecteur curieux de pousser plus loin son information et de se faire son jugement. On ne dira jamais assez comme l’occident, par-delà ses divisions internes, a globalement sabordé (par tous les moyens) les tentatives de modernisation socio-économique et politique progressive mais rapide des Etats laïcs de la région, avant de fustiger leurs «dérives» fondamentalistes et autoritaires.

D’actualité aussi, l’Amérique latine (ch.1), soumise à une pression très importante du grand voisin dominateur : il peut être utile de lire Danielle Bleitrach (pp.90-93) sur Cuba pour apprécier les événements actuels et les processus futurs autour de l’avenir de l’île autrefois vassalisée puis assiégée depuis bientôt 50 ans. Du même auteur, des pages intéressantes sur l’opposition états-unienne aux réformes du Venezuela (pp.99-101). Sur la Russie, la CEI et l’espace de l’Eurasie en transformation, on lira avec profit Bruno Drweski (INALCO), un des rédacteurs de La Grande Braderie à l’est, publié chez le même éditeur récemment et déjà signalé sur Parutions. Nicolas Bàrdos-Féltoronyi, qui écrit dans «Balkans» sur la Bulgarie enjeu géopolitique centre-européen est également un des auteurs de cet ouvrage précédent.

Il est impossible de citer tous les auteurs ni leurs textes respectifs. L’ouvrage fournit des mises au point claires et relativement courtes qui doivent inciter le lecteur - à l’aide des brèves bibliographies et renvois de sites internet «alternatifs» par exemple, mais pas seulement – à devenir beaucoup plus critique et plus savant que nos médias sur l’état du monde. Ce ne sera pas très difficile.


Nicolas Plagne
( Mis en ligne le 26/09/2006 )
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A lire également sur parutions.com:
  • Impérialisme humanitaire
       de Jean Bricmont
  • La Grande braderie à l'Est
       de Collectif , Claude Karnoouh , Bruno Drweski
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