|
Essais & documents -> Questions de société et d'actualité |
| |
Un pamphlet contre la dictature des niais | | | Ivan Rioufol La République des faux gentils - Pourquoi elle affaiblit la France Le Rocher 2004 / 14.50 € - 94.98 ffr. / 158 pages ISBN : 2-268-05107-2 FORMAT : 13x20 cm Imprimer
Ivan Rioufflol est bien connu pour son «bloc note» hebdomadaire du vendredi dans Le Figaro; il y reprend et commente avec beaucoup dintelligence différents points de lactualité de la semaine. Dans notre triste paysage journalistique, bien peu peuvent se flatter de combiner ainsi, grâce à une culture solide et un esprit percutant, réaction immédiate à lévénement et lucidité de lanalyse.
Il nous livre ici un pamphlet tout à la fois drôle et profond qui synthétise avec brio ce que nombre dentre nous ressentent devant le triste ballet politico-médiatique. La République des faux gentils est partout : «Ce que la Club Med avait inventé, avec ses gentils organisateurs et ses gentils membres, comme devant être une parenthèse dans un monde naturellement âpre, la Vè République la repris et officialisé trois cent soixante cinq jours par an. (
) Dans cette univers adorable, tout nest plus que compliments, nonchalance, effarements éthiques.» (p.25) A commencer par notre gentil président, et là, Ivan Rioufol se déchaîne avec un florilège de citations ahurissantes : «Jacques Chirac parle le langage des campus américains des années 1960 (
) le président de la République, version xxiè siècle, est pour la paix dans le monde, le dialogue, le partage. Il dit : «la guerre est toujours la pire des solutions.» Et aussi : «il ny a aucune espèce de raison de ne pas se parler car les hommes et les femmes naissent égaux et sans haine.» Et ceci : «Le dialogue humain, le dialogue des cultures, cest la base de tout.» Ou encore : «La mondialisation de léconomie exige la mondialisation de la solidarité». Il annonce aussi vouloir taxer les ventes darmes pour financer la faim dans le monde. Cool man !». Du sommet, la niaiserie sétend à la base, à moins que cela ne soit linverse ou bien les deux !
Les deux principaux vecteurs de cette mièvrerie généralisée sont, on sen douterait, lécole et les médias. Sur lune comme sur les autres, Ivan Rioufol nest pas tendre et son diagnostic est dautant plus sévère que toujours très documenté et nourri de citations bien choisies qui montrent que chez les gentils moins quailleurs le ridicule ne tue pas.
Derrière tout cela, un regrettable manque de courage : il est tellement plus facile de nager dans le sens du courant que de sexposer une levée de bouclier. Et la bêtise est souvent moins innocente quelle ny paraît. Car ces «faux gentils» ne sont forts que grâce à leur nombre et, comme tous les faibles, ils peuvent déployer des trésors de méchanceté quand ils sont menacés. Ponctuellement, les gentils opérèrent un petit lynchage «pour lexemple», laffaire Renaud Camus en fut un. Les récalcitrants potentiels voient ainsi ce quils risquent à la plus petite déviation. Mais larme privilégiée du gentil reste le silence : «Le boycott et lindifférence sont les censures les plus efficaces chez les gentils hypocrites. Elles nempêchent pas de dire ou décrire ; elles obligent à dire ou à écrire ce quil convient pour espérer trouver un écho» (p.62). Car les gentils, sont, cela va sans dire, des sentencieux, prompts à donner des leçons de «boy-scoutisme» sur tous les sujets : les questions sociales (dont ils raffolent), le racisme (leur pain quotidien), lenvironnement (grand sujet dinspiration pour les culculteries), lart et la culture (leurs «domaines réservés») et aussi, hélas, les relations internationales : tous pro-palestiniens, ils critiquent le manichéisme américain dans les termes les plus manichéens qui soient. Et que seraient-ils sans G. W. Bush ? «Parce que le choix de la guerre, parce que la puissance des Etats-Unis, parce que larrogance batailleuse de Bush : parce que tous ces comportements si peu charmants lancés à lappétit dune opinion publique bercée par la tendresse, la France, ignorant ses vrais ennemis, aura su trouver un adversaire à la hauteur en la personne du président américain.» (p.127). La lutte anti-Bush, qui ressemble dailleurs comme une petite sur à la mobilisation anti-Le Pen crée lillusion dun consensus large puisque regroupant «pacifistes, antimondialistes, islamistes, antiaméricains, antisionistes, « munichois », honorables consciences religieuses
» (p.128)
Un livre intéressant à lire très vite pour comprendre pourquoi la vie politique ne nous intéresse plus guère. Heureusement, il reste quelques individualités comme Alain Finkielkraut, Pascal Bruckner, Jean-François Revel, Elisabeth Lévi et Yvan Riouffol pour nous montrer quil est malgré tout encore, envers et contre tout, possible de penser par soi-même dans notre pays. Et la conclusion est un appel à une réaction : «Il y a urgence. La République des capons menace la France de désintégration.» (p.156)
Claire Laux ( Mis en ligne le 05/07/2004 ) Imprimer
A lire également sur parutions.com:La France qui tombe de Nicolas Baverez Ne laissons pas mourir la France ! de Nicolas Dupont-Aignan , Paul-Marie Coûteaux Le Dépérissement de la politique de Myriam Revault d'Allonnes | | |
|
|
|
|