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Philosophie  
 

Penser le poème
De la création poétique : autour de l'oeuvre de Jacques Garelli
Encre Marine 2000 /  50.38 € - 329.99 ffr. / 256 pages
ISBN : 2909422461

collectif
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Publié aux éditions Encre Marine en septembre 2000, De la création poétique: autour de l'oeuvre de Jacques Garelli, se compose de deux volumes qui restituent pleinement la force et la richesse de la pensée du philosophe et du poète. Le premier volume de l'ouvrage contient la réédition de trois importants recueils poétiques: Brèche, Les Dépossessions et Lieux précaires, parus respectivement en 1966, 1968 et 1972 au Mercure de France, et dont Sartre et Aragon avaient immédiatement relevé l'originalité. Importants bien évidemment de par leur qualité littéraire et poétique, mais également, et surtout, parce qu'ils incarnent une pensée féconde, pensée sans cesse travaillée, depuis La Gravitation poétique, dans les ouvrages philosophiques de Jacques Garelli.

Pourtant, il ne s'agit pas pour autant de concevoir la poésie garellienne comme l'exemplification, en quelque sorte la caution littéraire, d'une pensée théorique abstraite qu'il conviendrait d'illustrer. Comme le souligne fort justement R.Barbaras, mais également L.Oppenheim, G.Petitdemange et F.Worms, il n'y a pas de rapports hiérarchiques entre philosophie et poésie au sein de l'oeuvre, les deux exercices servant le même projet, exprimant une même pensée, celle de la pré-individualité. C'est principalement sur ce rapport singulier de complémentarité entre ces deux modes d'expressions bien distincts que portent les analyses philosophiques et littéraires de quinze personnalités internationales, regroupées dans le second volume : Penser le poème.

Un double cheminement poétique et philosophique permet donc au lecteur d'investir l'univers garellien, de se familiariser avec une pensée qui confère à l'acte poétique une portée à proprement parler ontologique. Dans un long article intitulé: Sur la mémoire du monde, qui achève l'ouvrage et constitue une réponse à deux questions formulées par le philosophe K.Axelos, Jacques Garelli expose avec une grande clarté l'impuissance des approches conceptuelles de type sémantique, structurel, linguistique, ou encore symbolique, à saisir les véritables enjeux soulevés par la création poétique. Le poème ne peut en effet se comprendre sur le mode communicationnel classique de l'émetteur et du récepteur, en terme de message à décoder, s'exprimant dans un rapport direct de signifiant à signifié Il ne peut en aucune façon être extrait de l'horizon indéterminé de sens duquel il émerge, et qui prend sous la plume de Jacques Garelli la forme d'un Monde pré-individuel. Toujours en prise sur ce milieu pré-réflexif, anté-prédicatif, irréductible à l'ordre de la détermination conceptuelle, le poème apparaît alors comme l'acte d'ouverture temporalisatrice et "mondifiante", qui se déploie au sein d'un réseau complexe de tensions irrésolues non individualisées, ou plus exactement en instance d'individuation.

Une relecture approfondie des grands textes de la philosophie (de Platon à Merleau-Ponty, en passant par une revalorisation du jugement réfléchissant kantien) d'une part, et une réflexion centrée sur le statut de l'individualité dans les sciences contemporaines d'autre part, permettent à Jacques Garelli d'imposer une conception novatrice de l'homme et du monde, dont les contours respectifs s'effacent progressivement, se dissolvent, se compénètrent, puis se retrouvent au coeur d'un Néant trans-individuel. Ce Néant ne peut alors être compris comme un pur non-Être, qui s'opposerait frontalement à la pleine positivité de l'étant Il est Néant dans la mesure où il diffère fondamentalement de l'ordre de l'institué et du thématisable, lui résiste, lui échappe. Le phénoménologue rompt ainsi définitivement avec la traditionnelle dichotomie Sujet/Objet, non véritablement questionnée par la philosophie classique. Les thèses de G. Simondon offrent alors la possibilité de dépasser, sans les renier, les conceptions heideggérienne, husserlienne et merleau-pontienne du monde, et de comprendre celui-ci en termes de système "métastable", horizon indépassable de notre apparaître, de notre individualité.

Le poème devient dès lors puissance d'ouverture, activateur d'énergie, révélateur privilégié de la "métastabilité" du Monde. La compréhension classique d'un univers régi par la légitimité du concept doit s'effacer, s'abolir. Le poème ouvre une "Brèche", invite à la "Dépossession" des certitudes les plus assurées, suggère de "prendre appui" sur ce qui a pu survivre à l'abolition, et que Jacques Garelli nomme la Mémoire du monde. Il reste au lecteur à faire l'effort nécessaire à cette incursion dans cet univers où le règne de la logique et du tiers-exclu est radicalement remis en cause, en ces Lieux précaires où le mot lui-même perd ses assises et son statut strictement référentiel, pour trouver place au coeur des rythmes et des mondes ouverts par la magie créatrice du poème.


Jean-Pierre Carron
( Mis en ligne le 12/02/2001 )
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