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Le cerveau a-t-il un sexe ?
Catherine Vidal   Dorothée Benoit-Browaeys   Cerveau, Sexe et Pouvoir
Belin - Regards 2005 /  16.00 € - 104.8 ffr. / 110 pages
ISBN : 2-7011-3858-2
FORMAT : 15x21,5 cm

Antoine Bioy est psychologue clinicien et docteur en
psychologie.

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Catherine Vidal est neurobiologiste et directrice de recherches à l'Institut Pasteur. Par ailleurs membre du Comité Scientifique « Science et Citoyen » du CNRS, ses travaux portent notamment sur les rapports entre sciences et société. Elle signe ici, avec la journaliste scientifique Dorothée Benoit-Browaeys (auteur de Des inconnus dans notre assiette), un ouvrage où la question des différences hommes/femmes sont abordés d’un point de vue scientifique.

Le thème de l’ouvrage est simple : il dénonce l’idéologie ambiante qui voudrait faire croire que toutes les inégalités de la nature seraient inscrites dans les gènes. Ainsi, les partisans du déterminisme biologique ont recours à la science pour tenter de démontrer que les femmes ne sont pas les égales des hommes (forcément, elles ont un cerveau plus petit), que les noirs sont moins intelligents que les blancs, mais également que le pouvoir machiste est une donnée neurobiologique, qu’il existe en gène des croyances (donnant accès à Dieu), etc. On peut trouver ces débats parfaitement farfelus. Pourtant, cette « idéologie » se vend à plusieurs dizaines de millions d’exemplaires avec des ouvrages du type Pourquoi les hommes mentent et les femmes ne savent pas lire une carte routière ou encore Les hommes viennent de Mars et les femmes de Vénus. Selon ces livres, les différences hommes/femmes seraient expliquées non seulement par la neurobiologie mais aussi par l’anthropologie (héritage génétique de la préhistoire) et donc, on ne peut rien y faire… Une écriture alerte, un soupçon d’études présentées comme irréfutables et voilà l’intelligence du lecteur endormie et fascinée par un mode de présentation qui facilite l’identification et où tout paraît si simple et vrai…

Les auteurs de Cerveau, Sexe et Pouvoir démontrent non seulement la vacuité des arguments présents dans ces livres, mais également le fait qu’ils sont scientifiquement totalement erronés ! Mais le propos de ce livre ne s’arrête pas à une critique des erreurs véhiculées par ces ouvrages à succès. En fait, la question principale est de savoir si la science, et en particulier les neurosciences (l’étude du fonctionnement neurologique du cerveau), permet de légitimer une quelconque différence homme/femme. La réponse est ici clairement non, et s’appuie sur un bilan de connaissances des études les plus sérieuses en la matière. Les auteurs démontrent ainsi que nos comportements, aptitudes, émotions, valeurs ne sont pas inscrites «dans le cerveau», car ce dernier n’est programmé que pour une chose : apprendre et s’adapter. Toute différence est donc avant tout acquise, c’est-à-dire fortement en lien avec des données comme la culture ou encore l’éducation et les évènements de vie.

Au fil des exemples, C. Vidal et D. Benoit-Browaeys démontrent ainsi d’une part comment une idéologie rampante des différences hommes/femmes peut se loger dans un secteur aussi sérieux que la science, mais d’autre part comment s’impose le diktat de la «preuve scientifique» qui voudrait que tout soit explicable et contrôlable, jusqu’aux comportements humains. Cet ouvrage, écrit à l’intention d’un large public, constitue donc à la fois une formidable entreprise de démolition des idées reçues, mais également un agent de savoir, qui apporte au lecteur nombre de connaissances passionnantes sur ce que le cerveau «contient» réellement. Enfin, il ouvre sur des perspectives intéressantes, car il replace l’humain dans toute sa richesse : ses différences, sa capacité d’évolution, ses aptitudes à la création et à l’imaginaire.

Pourquoi souligner l’importance d’une telle publication ? La première raison est que généralement, les agents de résistance au « tout neurologique » sont des tenants des sciences humaines (psychologues, sociologues, anthropologue, ethnologues…). Ici, les arguments sont avancés par des auteurs reconnus pour leur sérieux et qui s’appuient sur les données propres aux neurosciences. Ils dénoncent les extrapolations abusives et les interprétations sauvages d’expériences et d’imageries cérébrales, en recadrant sur ce que ces études montrent réellement. Autrement dit, ce n’est pas la nécessité des études qui est pas remise en cause, mais les conclusions hasardeuses, voire partisanes, auxquelles elles donnent parfois lieu (comme le fait de publier autour de « l’existence » d’un gène de la fidélité potentiellement défaillant en pleine affaire Monica Lewinsky, « disculpant » ainsi Clinton par le pouvoir de la neurobiologie…).

La seconde raison qui donne à Cerveau, Sexe et Pouvoir toute son importance est que derrière ces questions, se profilent des enjeux sociologiques et éthiques importants. Nous ne reprendrons qu’un exemple, celui du prétendu gène de l’homosexualité. Lorsque cette hypothèse a été avancée, elle a donné lieu à des réactions diverses. L’une d’entre elles est venue de James Watson, Prix Nobel et co-découvreur de la double hélice d’ADN. Il a purement et simplement proposé l’avortement préventif des embryons qui contiendraient ce gène, puisque l’homosexualité devenait de fait une tare génétique ! Pourtant, cette hypothèse du gène homosexuel, démentie depuis, continue à être entendue dans de nombreux milieux, y compris au sein des lobbys gay et lesbiens qui en font curieusement un argument pour prétendre au droit à être reconnus comme une minorité…

Écrit dans un style ouvert et didactique, l’ouvrage s’adresse au plus grand nombre. Il ne se vendra malheureusement pas autant que les ouvrages de fiction scientifique de tout poil, mais apportera plusieurs dizaines de millions de fois plus à ses lecteurs. On apprend beaucoup à sa lecture, que l’on soit un homme ou une femme !


Antoine Bioy
( Mis en ligne le 03/10/2005 )
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