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Concerto pour piano et orchestre n° 2, op. 18
Sergei Rachmaninov (1873-1943)
Hélène Grimaud( piano )
 Philharmonia Orchestra
Vladimir Ashkenazy( direction )

Teldec / Warner 2001   
Sélection Paru.com 2001
ffff Télérama 2001
Recommandé par Classica 2001
10 de Répertoire 2001
TT :  65 mn.
8573-84376-2
1 CD

+ Prélude op. 32 n° 12
Études-Tableaux op. 33 n° 1, 2, 9
Variations sur un thème de Corelli


Enregistrement (studio) : juin et septembre 2000, janvier 2001. Stéréo DDD. Prise de son très claire, très travaillée, contrastes dynamiques légèrement exagérés.
Notice (allemand, anglais, français) très soignée.

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Bien sûr, il faudrait être un mufle pour flétrir les lauriers que la presse spécialisée et non spécialisée, miraculeusement accordées, lacent sans se lasser autour du front d'ange d'Hélène Grimaud. Pourtant, on en meurt d'envie, tant le plan marketing de Teldec, savamment ourdi autour de la damoiselle élue, agace. Songez que ce nouvel opus contient un " Mini-Poster Hélène Grimaud " agrémenté d’un " porte-photo " adapté ! On n'attend plus que la mèche de cheveux. Mais, quand on a entendu ses Brahms, douloureusement introspectifs (Erato), comment regretter encore que cette authentique musicienne, dans l'âme comme dans le sang, soit devenue la coqueluche d'un large public ?

Ainsi, de disque en disque, Hélène Grimaud relève les défis. Le Deuxième de Rachmaninov en est un de taille : ne sera-t-il pas trop démesuré pour ce piano réfléchi, certes puissamment poétique et nuancé, mais dont l'ampleur n'est pas la principale qualité ? Grimaud a l'intelligence de ne pas se poser la question. Eût-elle cherché à égaler le slave lyrisme d'un Ashkenazy, la robustesse mâtinée de mélancolie d'un Richter, elle se fût à coup sûr parjurée. Lisible note à note, d'une constante inventivité plastique et cependant très calculé, esquivant le legato mais cédant à un rubato parfois prononcé, son jeu découpé privilégie l'exactitude du phrasé, la justesse de ton, aux dépens de la fougue. Surtout, il est articulé avec une science infinie. A force d'interroger le texte, Hélène Grimaud le dépouille des parti-pris interprétatifs qui avaient fini par l'empeser. La direction suave et étonnamment limpide d'Ashkenazy (les vents !) autorise cette lecture pianistique tout en finesse. Il était temps que, dans cette jungle luxuriante, deux interprètes osent éclaircir le feuillage !

Par habitude auriculaire, on pourrait déplorer l'absence de folie, voire de spontanéité, regretter la richesse sonore des Richter, Janis, Kappell. Ce sens de la mesure, toutefois, permet à Grimaud d'oser de magnifiques contrastes ; détaillé à l'extrême, troué de silences évocateurs, le rêveur Adagio cesse d'être cet interminable pont tendu vers le bravache Allegro final. Grimaud y est à son meilleur : touchante sans effusion, d'une sincérité non feinte, et souveraine dans l'art de la surprise. " Noblesse de coeur et raffinement d'expression ", précise la jeune femme dans une manière d'art poétique : c'est la plus juste définition de son style. Si, dans les premières mesures du Moderato initial, il est évident qu'elle peine à imposer cette forme d'éloquence sans transports, en revanche le Finale sort grandi de cette décantation d'où le pathos a fui au profit d'une étrangeté inédite et d'une douce persuasion. Même ses forte, brefs, implacables, paraissent sans poids. Tout juste, à ce jeu éclairé, le concerto paraît-il se difracter et perdre une unité qui, tout bien considéré, n'est peut-être pas sa première caractéristique. Dans un style moins héroïque, voire moins convaincant à la première écoute, sa réussite nous rappelle celle, plus conventionnelle, de Cécile Ousset, qu'EMI avait " lancée " à l'orée des années 90 avec un fracas (presque) comparable et dont on n'entend plus guère parler aujourd’hui.

A écouter les Études-Tableaux, mélange subtil de rigueur et de distance ludique, on s’aperçoit qu’Hélène Grimaud est encore meilleure soliste que concertiste. Elle possède, plus que nulle autre, l'art de se livrer sans se répandre et d'émouvoir par le seul dessin d'une ligne : une forme de classicisme. Qualité évidemment à l'œuvre dans les énigmatiques Variations Corelli, qui séduisent par leur prodigalité sonore et leur stupéfiante maîtrise rythmique. Osons le dire : on n'avait jamais imaginé que cette partition négligée pût être aussi passionnante. Pour ce qu'elle révèle des capacités de la jeune pianiste, de son intelligence instinctive du texte, de son regard toujours interrogateur, c'est certainement le sommet de ce disque. On y pressent en outre quelle interprète elle serait des Paganini. Rendez-vous est pris !



Olivier Philipponnat
( Mis en ligne le 30/04/2001 )
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