|
Documentaires -> Actualité |
De père en fils avec Philippe Ayme 7 € - 45.85 ffr. Durée film 52 mn. | Diffusion télévision, pays : Avril 2005, France
Pour obtenir le DVD du film, contacter Adalios au :
04 75 94 57 10
Prix du DVD : 12 euros ttc + 3 euros ttc de frais de port. Imprimer
Cest un pays où le vent souffle et chantent les cigales lété quand le soleil y brille : vert, bleu, bordeaux, violet et jaune
La terre sy déploie en collines et champs plantureux, griffée par les vignes, les allées de lavandes, des truffes lovées à lintérieur
Une terre sombre et riche, mise à nue par lhiver, superbe dans son manteau estival et champêtre. Une nature humaine, à la fois sauvagement nature et superbement humaine, qui descend jusquau sud se faire manger par une mer souvent calme, parfois écumeuse et enragée. Toujours sous lazur méridional, et la lumière qui dore, chaude et maternelle, qui chauffe jusquaux voix des habitants du coin, graves et sucrées.
Philippe est né là, au cur de la Drôme, comme son père, ses frères, et son neveu, dernier arrivé dans la famille, chacun reproduisant les gestes et les sourires de la smala, fidèles au temps qui passe, qui transforme, érode mais répète tout, rassurant : les saisons, les générations, à lombre de pierres inaltérables, celles du pays, celle de la ferme, scène de ce petit bijou documentaire
Parce que Philippe tire son sang, sa propre sève, de ce coin terrestre, parce quil a un regard que la caméra prolonge, sublime et arrête dans le temps, il offre quelque chose de rare, dà la fois universel et de particulier : une vie de famille dans une région qui ne change pas.
Tout part dun virage néanmoins, passation de pouvoir - notaire, discussions à nen plus finir, etc., etc
- entre le pater familias et le cadet, bientôt papa, sous le regard du benjamin. Laîné, Bruno, qui renvoie comme les autres les reflets familiaux, rejoint plus son petit frère, hors champs, hors cadre. Parisiens tous les deux, ils évoluent en satellites autour de leur chez-soi, ici tous les deux mois, moins ici que le cadet donc. Régis, agriculteur et futur père, prolonge la lignée dans les faits et les gestes, dans le sang et la terre. Non sans heurts avec un père exigeant, quil concurrence, quil remplace presque, qui veut rester encore tout en lorgnant vers lhorizon marin, tout décume au soleil couchant. Mais les choses se mettent en place : la ressemblance prend le dessus. Régis enfante et nourrit la terre, reproduisant lart et la manière appris en regardant papa : la taille de la vigne, la mise en bouteille dun vin honnête et amical, la moisson des lavandes qui finiront dans un pressoir, mangées par les vapeurs et une sorte de magie tellurique
Lil de Philippe est là, muet, câlin et pudique, metteur en scène de cette réalité familiale. Dans un baquet, le vert bouteille sentrechoque et leau sy aspire ; les coups de sécateurs font le bruit de clichés photographiques et des brassées de lavandes fraîchement fauchées sourient à la caméra, horizontales violettes sur les verticales vertes des vignes printanières : Régis perpétue lhistoire familiale et Philippe limmortalise, artisan et artiste
Le réalisateur napparaît que dune main qui caresse les murs de la maison familiale, dune voix discrète qui pose ses questions, mais dun regard qui dit tout. Jaloux ? Complice ? Résigné ? Fidèle en tout cas, et magnifiquement, dans le propos, limage et ses cadres, quelques notes de musiques, acoquinement dun violoncelle placide et dune guitare électrique plus nerveuse (David Trescos), parfaitement complémentaires, eux aussi
Philippe Ayme offre ici un document précieux, sorte de bilan, darrêt sur image(s) à propos de lagriculture française aujourdhui, du rapport Paris (où les fils, nombreux, sexilent) / Province, de ce moment délicat quand se décide une succession, du microcosme étrange mais à la beauté évidente, que peut former une simple famille. Sil est question de la terre et du sang, rien de barrésien ici : cest un patriotisme serein qui est donné à voir, par un déraciné pas si déraciné que cela
Philippe Ayme voit bien, juste et joliment, car à la qualité documentaire sajoute celle esthétique et sensuelle de plans charmeurs et oniriques : une lampe qui danse dans le vent, les arabesques fractales dessinées par lécume du vin fraîchement versé dans un seau, la chorégraphie de mains sappliquant à égrener une grappe de raisin.
1er prix aux quatrièmes Rencontres du Film de Vannes, Prix du public au festival Oenovidéo et sélectionné dans dautres festivals («La Ruralité dici et dailleurs» de Bazas en Gironde ou les cinquièmes Conviviales de Nannay dans la Nièvre), De père en fils fut diffusé en avril dernier sur France 3 Rhône-Alpes Auvergne. Ce DVD est loccasion de lui rallier un public bien plus large, quil mérite grandement
Bruno Portesi ( Mis en ligne le 23/05/2005 ) Imprimer | |
|
|
|
|