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Blissfully Yours
avec Apichatpong Weerasethakul,  Tongaram,  Oo,  Jansuda
MK2 2004 /  36  € - 235.8 ffr.
Durée film 128 mn.
Classification : Tous publics

Blissfully Yours est vendu dans un coffret avec le film Mysterious object at noon

Sortie Cinéma : 2002, Thaïlande
Titre original :Blissfully Yours

Version : DVD 9 Zone 2 Pal
Format vidéo : 4/3
Format image : 1.66
Format audio : vo thaïlandaise 5.1
Sous-titres : Français

Bonus :
Préface par Philippe Azoury

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Objet filmique non identifié au zénith de la jungle thaïlandaise… Blissfully Yours… c’est son nom. Par où commencer ? Je peux écrire: les caresses inlassables du film…la lumière d’un soleil impitoyable… une brûlure au plus profond des êtres…un éblouissement mélancolique… Difficile de rendre compte par les mots de cette expérience sensuelle, sensorielle avant tout.
Une jeune fille thaïlandaise, Roong, est avec Min, un clandestin Birman. Elle paye Orn, une femme plus âgée, pour s’occuper de son amant, atteint d’une étrange maladie de peau, pendant qu’elle va travailler à l’usine. Un jour, Min emmène Roong pique-niquer dans la jungle, où ils retrouvent Orn…

Objet filmique non identifié parce que le film ne ressemble à rien de connu dans le monde du cinéma contemporain. Il y a le premier générique qui apparaît après trois-quarts d’heure de film, la voix-off de Min qui intervient de temps en temps, ces dessins et écritures superposés parfois sur l’image, mais si ces éléments contribuent à brouiller les pistes, ce qui fait la force du film est ailleurs. L’excursion dans cette jungle « sous le soleil exactement » est une excursion dans l’intime du désir et du plaisir, comme jamais ils n’ont été représentés. Si le réalisateur s’attarde, c’est pour laisser advenir dans la durée un mystère insondable. A la fin, le spectateur est comme hypnotisé, envoûté par la sensualité omniprésente du film, mais aussi perplexe : quelle expérience vient-il de faire au juste ? Qu’a-t-il vu exactement ? Impossible de déterminer la nature du film.

Quelque chose dans Blissfully Yours l’empêche de tomber dans le déballage du désir aux lèvres pendantes si commun sur les écrans. Ici c’est une crème qu’on étale du bout des doigts sur une peau desquamée, ou une fellation filmée de dos, à bonne distance. La lumière solaire se fraye un passage à travers le feuillage pour éclairer ces corps qui s’effleurent, se cherchent lentement, à l’ombre d’une nature bienveillante dont il ne faut craindre que les fourmis rouges avides du repas des deux amants. Le désir s’infiltre dans le film au fur et à mesure que le couple pénètre dans cette jungle enveloppante de chaleur et de beauté.

Mais Blissfully Yours ne donne pas à voir le seul plaisir de vivre ces instants extatiques en compagnie de son amant. On sent comme une retenue, une mélancolie indissociable de la contemplation du monde, de sa lumière, de sa beauté. Comme si tout cela était trop improbable, inatteignable au fond, ces images-là nous parviennent dans un moment de grâce de toute façon éphémère. C’est le personnage de Orn qui rappelle à l’ordre les amants et le spectateur égaré dans ce bonheur trop simple, c’est l’image de son corps bêtement accouplé à celui du collègue de son mari, tous les deux filmés dans leur petite laideur impardonnable par une caméra en plongée, ce sont ses gestes mesquins, à l’affût de l’argent, c’est sa question lancinante et plaintive, lorsqu’elle retrouve les deux jeunes amants, « Quelle heure est-il ? Il est tard, je veux rentrer, Roong ». Si elle représente tous les obstacles au plaisir absolu, elle figure surtout le temps qui passe, celui qui laisse son corps las et abîmé. Mère d’un enfant noyé, elle porte en elle la mort et la solitude.

Blissfully Yours est en quête du plaisir, ce plaisir qui envahit tout notre être et nous apaise aussi, pour finalement nous dire ça ne dure pas, ça ne peut pas durer. Le film nous montre comment le désir se tisse lentement vers l’extase pour défaire presque dans le même temps cet ouvrage délicat. C’est un élan aussi bien qu’un regret, qui reste délicieux à regarder pour celui qui veut bien se laisser enivrer, doucement bercé par les précieuses et nouvelles images de Apichatpong Weerasethakul, qui a reçu pour ce deuxième long-métrage le prix Un Certain Regard à Cannes 2002.

Le DVD offre un chapitrage bien pensé et une belle préface de Philippe Azoury. Un coffret proposé par MK2 inclue également le premier long métrage du réalisateur, Mysterious Object at Noon, une oeuvre qui aiguise la curiosité des spectateurs envoûtés par Blissfully Yours ou le récent Tropical Malady, son troisième long. De quoi s’approcher de la genèse d’un cinéma unique et rare, suivre dès le début dans cette jungle créatrice la piste de ce nouveau grand cinéaste.


Florence Keller
( Mis en ligne le 22/12/2004 )
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