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Amour et peur / Amor y Miedo
avec Iciar Bollain, Laia Marull, Luis Tosar, Candela Pena
MK2 2005 /  19.99  € - 130.93 ffr.
Durée film 86 mn.
Classification : Tous publics

Sortie Cinéma : Espagne, 2003 ; France, 2004
Titre original : Te doy mis ojos

Version : DVD 9 / zone 2
Format image : 16:9 compatible 4/3 format d'origine respecté 1.85
Format audio : Espagnol, Dolby Surround Stereo, 5.1
Sous-titres : français, néerlandais, allemand

Bonus :
- Bande annonce
- Entretien avec la réalisatrice, Iciar Bollain
- Court métrage, Un amour qui tue (18 min)

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Après une crise et un coup de trop, Pilar fuit le domicile familial et son mari Antonio. Elle emporte son fils avec elle et se réfugie chez sa sœur, pour oublier et essayer de se reconstruire. Elle trouve alors un stage à la cathédrale de Tolède ; l’art l’aide à cicatriser et retrouver une image de soi qui lui appartienne. Car elle a tout donné à Antonio, son corps, aimé et maltraité, comme son âme, par amour et peur, de plus en plus par peur, sans que l’amour, jamais, ne s’en aille vraiment…

Antonio veut changer. Il s’inscrit à une thérapie de groupe où il apprend à identifier et maîtriser sa colère, et revient finalement chercher Pilar, qui hésite, qui a peur encore, mais qui l’aime toujours et finit par accepter…

Ne dis rien est le récit de cet amour tragique. On préfèrera d’ailleurs à la traduction française le titre original, Te doy mis ojos (Je te donne mes yeux), qui indique, autant que l’aliénation à l’autre, le désir amoureux de s’abandonner à l’être aimé. Car telle est l’histoire : l’entremêlement inexpiable de scènes d’amour tendres et touchantes, et de violences inacceptables. Jusqu’à ce que le nœud casse…

C’est à cette tension que s’est appliquée avec succès la réalisatrice Iciar Bollain, avec son équipe. Car tout le film n’est que tension, de part en part, et le spectateur n’en sortira pas, jusqu’à la dernière minute, toujours à l’affût du pire, d’un climax dans la violence, d’une colère toujours prête à sourdre malgré les efforts et les moments de douce accalmie. On est toujours rattrapé par sa nature…

Un film dur, à voir absolument donc. La réalisatrice est partie du fait divers et de sa visibilité accrue ces dernières années en Espagne. Signe que les choses empirent ou qu’elles vont mieux ? Coupons la poire en deux en disant que si l’Espagne sort chaque jour plus de l’omerta franquiste, les maux sociaux, comme ailleurs, comme en France et en Europe, la gangrènent encore. Pas de Latin touch ici, nous disent les enquêtes : les femmes sont autant, sinon plus, battues en Suède qu’en Espagne ou en Italie…

D’où une partie du succès du film, en Espagne comme ailleurs (peut-être boudé en France, où l’on croit être revenu et guéri de tout…), ses prix nombreux : il malmène en la pointant du doigt une vérité quotidienne mais tue, tabou social tapi discrètement malgré sa fureur dans le sanctuaire familial. Les choses changent et ces faits divers coûtant la vie de femmes entrent de plus en plus dans le débat public.

Mais le film doit aussi sa réussite à la façon dont le sujet est ici traité : sans parti pris, Iciar Bollain cherche à comprendre les mécanismes psychologiques à l’œuvre, pourquoi certains hommes expriment leur peur par la violence, pervertissant ce qui fait l’amour même, en son nom ; pourquoi les femmes restent-elles si longtemps auprès de leur bourreau… Servi par les jeux bluffant des deux acteurs - stupéfiants Laia Marull et Luis Tosar -, le film convainc le spectateur de s’identifier aux deux personnages à la fois.

C’est ce dont la réalisatrice rend compte dans un long et passionnant entretien offert par le présent DVD. Où l’on trouve aussi un court-métrage à l’origine de Te doy mis ojos, par Iciar Bollain toujours : Un amour qui tue, avec, encore, Luis Tosar dans le rôle de l’époux violent. Ici, sous la forme du documentaire, est traitée la vision et la maladie masculines, toujours avec pudeur et volonté de comprendre.


Bruno Portesi
( Mis en ligne le 11/04/2005 )
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