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L’étendard de la révolte
avec Kenji Mizoguchi, Raizô Ichikawa, Yoshiko Kuga, Ichijiro Oya
Films sans frontières 2004 /  27.75  € - 181.76 ffr.
Durée film 107 mn.
Classification : Tous publics

Sortie Cinéma, Pays : 1955, Japon
Titre original : Shin heike monogatari

Version : 2 DVD 9/Zone 2
Format vidéo : 4/3
Format image : 1.33 (couleurs)
Format audio : Japonais (Dolby digital mono 2.0)
Sous-titres : Français, Anglais

Edition collector - Double DVD

DVD 1
Le film
L’époque de Heian
Shin heike monogatari
Témoignages
Apparat critique
Bio-filmographies
Photos de plateau

DVD 2
Un documentaire de Kaneto Shingo de 1975, Kenji Mizoguchi, la vie d’un cinéaste (150 mn)

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Le talent d'un cinéaste peut se mesurer à l'aune de différents critères : qualités intrinsèques de la réalisation, choix des histoires portées à l'écran, choix et utilisation des acteurs et de l'équipe, messages et argumentaires… On en oublie sans doute un certain nombre mais en ne prenant que ceux énumérés ci-dessus on peut, sans prendre beaucoup de risques, affirmer que Kenji Mizoguchi est un grand, un immense cinéaste. Le risque est d'autant moins grand que depuis de nombreuses années des générations de cinéphiles et de critiques disent la même chose !

Le Héros sacrilège en est une parfaite illustration. Il adapte une partie d'un roman d’Eiji Yoshikawa, un des auteurs, peut-être l'auteur le plus connu au Japon grâce aux romans qu'il a écrits au début du vingtième siècle. Ces romans reprennent généralement des histoires du moyen-âge japonais avec des personnages ayant réellement existé. Le plus connu étant sans doute La Pierre et le sabre, adaptation de la vie de Musachi Myamoto, qui avait lui-même écrit un traité aussi connu que L'Art de la guerre : Le Traité des cinq roues. «Dans ce classique de la littérature universelle écrit par le plus grand samouraï de l'histoire, vous trouverez le secret de l'efficacité moderne japonaise qui applique l'esprit des arts martiaux aux affaires du monde», nous indique la couverture du livre. La version romancée de Yoshikawa s'est quand même écoulée à plus de cent vingt millions d'exemplaires. Tout ceci situe assez bien les bases scénaristiques on ne peut plus solides de Mizoguchi.

Il adapte ici le début de Shin Heike Monogatari (Chronique du clan Heike). En 1137, lorsque le film débute, on est à un point charnière de l'histoire japonaise, qui devient le point central du film : période étonnante avec une double monarchie et donc deux cours impériales qui se font concurrence, le tout sous la menace de moines qui exercent un ascendant par les armes et la superstition. Face à cela, un jeune homme va se dresser dans une épreuve à la fois initiatique et révolutionnaire.

Il y a donc la cour impériale et la cour cloîtrée. L'introduction du film, ainsi que les nombreux bonus, permettent de comprendre cette réalité historique étrange. Dans ce cadre, les samouraïs, qui assurent pourtant en grande partie la sécurité, sont très peu considérés. Ce manque de reconnaissance va amener le héros, le jeune Kiyomori Taïra (l’immense Raizô Ichikawa), à ne plus obéir aux ordres de la cour. C'est un complot ourdi contre son père, chef du clan Taïra, qui le fait passer à l'action et devenir ainsi sacrilège.

Dans ce deuxième film en couleur, qui sera en même temps son avant-dernier film, Mizoguchi et Kazuo Miyagawa, son directeur de la photographie, font un important travail sur la couleur justement. Elle est utilisée comme un véritable élément de la mise en scène, d’abord avec le soin tout particulier apporté aux costumes puis avec l’utilisation des couleurs pour souligner certains sentiments : une porte monumentale d’un rouge profond se détache en arrière-plan lorsque Kiyomori, très en colère, se prépare à partir au combat. Le bleu ou le noir accompagneront la tristesse.

Ce personnage historique permet à Mizoguchi d’exprimer certains de ses thèmes favoris d’homme de gauche. Kiyomori est un véritable héros révolutionnaire, social et sacrilège. Le film propose de nombreuses grilles de lecture : le parcours de l’adolescent vers l’âge adulte, de la prise de conscience de son identité, une réflexion à la fois politique et philosophique sur le pouvoir et son exercice mais aussi la lutte de classe pour mettre fin aux privilèges. On comprend rapidement que le réalisateur a un penchant pour le peuple et même pour les quartiers un peu malfamés où se déroulent ce qui semble être à ses yeux la vraie vie, avec de l’alcool ou des geishas et les gens du peuple qui travaillent. Enfin, on peut voir le héros comme le symbole de l’homme face aux dieux et aux superstitions qui peuvent les accompagner.

Sacrilège, le héros, l’est donc à de très nombreux titres : il repousse sa mère allant même jusqu’à la frapper, il s’oppose à son père resté fidèle à la cour impériale, à l’empereur donc et enfin à la religion incarnée par des moines débauchés qui prospèrent grâce à la peur et à la superstition qu’ils inspirent et entretiennent. La révolte initiée par Kiyomori marque le début du pouvoir des samouraïs à la tête du Japon, samouraïs qui peuvent être perçus comme les représentants du peuple. Cela va perdurer jusqu’au milieu du XIXe siècle et l’ère Meiji qui verra le retour du pouvoir impérial. Cette valorisation du pouvoir shogun par Mizoguchi intervient dans une période, l’après-guerre, qui marque une sorte de retour du pouvoir populaire. La victoire et la présence américaines donnent un rôle purement représentatif à l’empereur et la mise en place d’un pouvoir démocratique.

Dans ce chef-d’œuvre, on retrouve tous les grands thèmes du cinéaste japonais, sorte de testament après une longue carrière de plus de 80 films, entre 1923 et 1956. «Je voudrais vivre longtemps et, au terme d'une longue vie, réussir un bon film », disait Mizoguchi. Il a réussi au-delà de toute espérance. Le très conséquent documentaire, Kenji Mizoguchi, la vie d’un cinéaste, de Kaneto Shindo, qui accompagne le film, permet de tracer les contours de l’œuvre et de l’artiste. Réalisé en 1975, ce documentaire-somme a l’énorme avantage de permettre le témoignage de nombreux collaborateurs de Mizoguchi et de mieux saisir le travail du maître. Véritable travail de cinéaste sur un cinéaste, les 150 minutes ne sont pas inutiles pour y parvenir.

Chaque cinéphile qui se respecte devrait par conséquent avoir ce double DVD, classique des classiques, en bonne place dans sa DVDthèque.


Judicaël Tracoulat
( Mis en ligne le 24/04/2006 )
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