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Littérature et bourgeoisie
Marcel  Aymé   Le confort intellectuel
Le Livre de Poche - Biblio 2002 /  0.69 € -  4.50 ffr. / 158 pages
ISBN : 2-253-93347-3
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Il est affreusement banal de présenter un auteur comme «rebelle à son temps», la posture de la rupture étant un des artifices littéraires les plus usités. Ceci étant dit, qualifier en 1949 les fidèles groupies de l’existentialisme de petits marquis poudrés tout droit sortis des Précieuses Ridicules n’est pas précisément anodin. Tel est pourtant l’esprit et le cadre de ce roman.

Deux personnages, qui ont préféré abandonner Paris libéré, se rencontrent dans l’hôtel d’un village d’Ile-de-France. L’ambiance météorologique d’un morne automne pèse sur eux tout autant que l’amoncellement de menaces sur la liberté d’esprit et sur la liberté tout court – l’occupant ayant à peine tourné les talons. Uranus, le roman de Marcel Aymé sur l’épuration, n’est pas loin. Il faut dire qu’Aymé a connu quelques soucis pour avoir apporté son soutien, à la libération, à l’écrivain et collaborateur Robert Brasillach. Il sait donc de quoi est capable un comité d’épuration d’intellectuels, et connaît sans doute par coeur les Fouquier-Tinville poussés près de Saint-Germain des Prés ou dans la «ceinture rouge» de Paris.

Depuis leur retraite, les deux personnages donnent très vite à leurs conversations de coin du feu, la tournure d’une dispute littéraire. L’un des deux «proscrits», ou prostrés peut-être, se livre à une digression – qui confine au soliloque - sur le snobisme intellectuel des bourgeois. Ces derniers, leur intelligence aveuglée par la volonté de passer pour des hommes sensibles, éclairés, ouverts, etc. mépriseraient tout ce qui magnifie ou provient de leur classe sociale. Notre sceptique brocarde plus avant l’auto-dénigrement, passion «bourgeoisissime» nourrie de référents soi-disant avant-gardistes. Et par delà l’affaiblissement d’une classe à laquelle il ne rougit pas d’appartenir, il croit voir la cause de l’affadissement littéraire des élites française.

Les deux hommes dynamitent également la galaxie littéraire de l’époque, l’un joyeusement, le second presque à son corps défendant ; s’il se résigne à grand-peine à accepter la conclusion de ses réflexions, l’effet en est pareillement dévastateur. Et ce duo souvent contradictoire (qui pourrait représenter tant la pensée que les doutes d’Aymé) se raccorde généralement à l’heure des bilans. En prennent subséquemment pour leur grade les écrivains qui privilégient l’effet au détriment du principe de réalité, bref, qui «font du sentiment» en pourrissant la clarté de la langue française. Faut-il préciser qu’ils sont légion et souvent très respectés ?

Ainsi, cible élevée au rang d’exemple, Baudelaire apparaît sous le peu reluisant jour d’une idole pour midinettes. La démonstration d’Aymé, à grand renfort de citations baudelairiennes, devient même cruellement comique. Cela tient-il uniquement à l’adresse du rhéteur ? Il n’est pas certain que vous puissiez économiser un sourire, une fois refermé ce livre, à l’évocation de l’auteur du Spleen de Paris.

Mais la charge vitriolée contre Baudelaire – à laquelle Marcel Aymé a visiblement pris plaisir – vise d’abord le symbole d’un romantisme déclaré mal du siècle. Ce courant de pensée est dénoncé comme responsable d’un affaiblissement de la littérature, qui cèderait à une idéologie du mièvre, du flou dit «artistique» et à des passions vaporeuses, incertaines et vaines...

Aymé contre Baudelaire peint comme ultime avatar d’un romantisme de vieille fille ; Philippe Muray contre un Victor Hugo représentant un socialisme pompier et inspiré par un érotisme balourd (Le 19ème siècle à travers les âges) ; ou encore François Ricard «cartonnant» la vertigineuse insanité de La génération lyrique, caractérisée par «ce sentiment d’innocence et d’absolue confiance en ses désirs et ses pouvoirs» (Isabelle Daunais à propos de l’oeuvre de François Ricard in L’Atelier du Roman, La Table ronde, mai 2002), et qui en conséquence produit une vision du monde brumeuse et dévastatrice, ainsi que l’ont par ailleurs analysé Jean-Louis Harouel (Culture et contre-Culture) et Gilles Lipovetsky (L’ère du vide)… combien ont, malgré la facilité d’un dénigrement parfois systématique, admirablement décrit le cancer du mot, folle prolifération qui lui fait perdre tout attachement au réel et donc tout pouvoir d’évocation !?

Ces gardiens du verbe sont parfois rasoirs et contestables, mais on ne pourra nier l’importance de leur rappel : la langue est une matière délicate. Certains de ces essayistes tentent de construire tout un système de réfutation, une architecture de déni du «littérairement correct». Aymé dit plus simplement son ennui devant l’indigence - nullement inoffensive par ailleurs – des petits idéocrates à l’anathème facile mais à la plume stérile et servile. C’est contre eux qu’il défend son Confort intellectuel, dans un livre à l’esprit jubilatoire et merveilleusement bien écrit – ce qui est, bien sûr, la moindre des choses…


Vianney Delourme
( Mis en ligne le 12/11/2002 )
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