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Le roman qui dit "je"
Daniel  Pennac   Le dictateur et le hamac
Gallimard 2003 /  3.44 € -  22.50 ffr. / 399 pages
ISBN : 2-07-075631-9
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Ce serait l’histoire d’un romancier pas tout à fait amnésique qui indiquerait scrupuleusement à son lecteur les ficelles de sa Création, comme le brouillon propre d’un roman en train de se faire. Alors, ce n’est pas tout à fait un roman. C’est autre chose. Il y a de l’autobiographie dans cette narration. L’auteur raconte et se raconte, ou plutôt, raconte le roman dans sa construction. Mais ce n’est pas une autobiographie. Le dictateur et le hamac n’appartient pas au genre classique, et proustien par excellence, de l’autobiographie romancée. Il y a certes de l’autobiographie. L’auteur dit «je» en tant qu’auteur et acteur et non que simple narrateur ou héros. Mais la fantasmagorie l’emporte.

Le roman est présent, avec ce goût décidément sud-américain de l’épopée, entre réalité et absurdité cocasse. La fantasmagorie, c’est l’histoire de ce dictateur d’opérette, entre Chaplin, un Mussolini version Comedia dell’arte et ces généraux latins qui, de nos latitudes, peuvent faire sourire. Manuel Perreira da Ponte Martins est le nom de ce despote cruel et grotesque… et celui de la nuée de sosies qui jouent son rôle sans réussir à jouer le leur propre pendant que lui vaque à des amours européens. Derrière Pennac, il y a alors du Garcia Marquez, du Allende, du Roa Bastos, comme si l’Amérique latine, ce continent à la fois proche et lointain, guidait les plumes des auteurs qui s’y frottent pour en faire jaillir de merveilleuses invraisemblances, des récits où l’histoire décidément tragique s’édulcore dans les folies féeriques, mythologiques, en un mot, romanesques, de ses acteurs.

Mais Le dictateur et le hamac n’est ni un roman ni une autobiographie. C’est un roman qui se raconte, un «auto-roman» pourrait-on dire, tel qu’on en voit fleurir de plus en plus sur les étals des libraires. On pense au Testament à l’anglaise de Coe, à La tache de Roth, à Une voix dans la nuit de Maupin. Dans chacun de ces romans d’un nouveau genre, le narrateur est aussi le romancier qui explique la genèse de son œuvre. De plus en plus, le roman dit «je».

Pennac nous invite dans cette aventure en nous suggérant les ficelles de sa mise en scène. L’intrigue se déroule. Elle est prenante en soi. On suit volontiers ces personnages hollywoodiens et homériques, leurs périples d’une terre à l’autre, leurs déboires. On retrouve avec le même plaisir l’entraînante vitalité des récits de Pennac. Malaussène est absent ; Pennac est bien là. La profonde humanité de ses héros, leurs contours attachants et sympathiques, les peintures saisissantes des cadres, des hommes, tout ce qui fait la beauté atemporelle des romans de Pennac – le signe d’une œuvre qui durera – se retrouve ici.

Bien plus saisissante est cependant l’autre aventure, celle qui constitue la matrice de la première, l’histoire d’une œuvre en train de se faire. «Les sédiments de la vie», «la part romanesque» des amis qui aident l'auteur à découper ses "tranches de réel", l’effort de la documentation, les lectures nombreuses, dévorées, digérées, assimilées (Pennac cite d’ailleurs Roth et Coe…), une culture accumulée, considérable, et cette qualité de l’écrivain, l’amour propre qui le situe dans cet entre-deux impossible, à mi-chemin entre la soif de reconnaissance et le désir de fuite (le Brésil, son exotisme), tout ces éléments parrainent le roman en train de se faire. L’auteur, démiurge, coud ensemble ces bouts de vérité, ces morceaux imaginés, les bribes d’une culture, pour en faire une œuvre. Il a pour cela son talent et, surtout, son style.

Alors le lecteur accompagne son auteur avec un plaisir qu’il ne saurait dire. On croirait au début que Le dictateur et le hamac est un roman bâclé que l’auteur, pressé par son éditeur, aurait simplement agrémenté du récit de sa grossesse. Et puis, on réalise que l’on a affaire à un véritable genre littéraire. Une invite au plaisir des mots et de l’écriture. Sur le socle marmoréen, infrangible, de sa culture et d’une langue admirablement maîtrisée, Pennac danse un tango littéraire. Il s’amuse. Comme les enfants avec trois-fois-rien, il recrée un univers entier à partir de sa vie et de son imaginaire. Il façonne le récit comme on coudrait un patchwork. On saisit alors d’autant mieux le pouvoir de l’écriture, la force des mots, qui, par la magie de l’auteur démiurge, transmettent chez le lecteur des images et des émotions, des moments, des pensées. Et l’on comprend alors que ce dictateur dans son hamac, c’est cet écrivain démiurge, ce despote éclairé et humaniste qui édifie à son image un monde qu’il offre ensuite aux autres.


Bruno Portesi
( Mis en ligne le 23/06/2003 )
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