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Marcher avec son cancer
Emmanuelle, de  Boysson   Le Secret de ma mère
Presses de la Renaissance 2003 /  2.6 € -  17 ffr. / 234 pages
ISBN : 2-85616-953-8
FORMAT : 14x23 cm

Emmanuelle de Boysson collabore à Parutions.com.
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Rien de plus banal que de perdre un parent d’un cancer… Et pourtant, quelle écorchure, quelle blessure et quel périple que cet accompagnement étrange vers une mort à la fois inévitable et que l’on pense pouvoir esquiver ! Une mort lente, qu’on craint mais qu’on finit par oublier et qui vous surprend enfin, pour de bon… Cancer, mot étrange, monstrueux à vrai dire, pour une maladie qui ne l’est pas moins. Elle est incompréhensible, pas vraiment maîtrisable sinon par ces chimio qui semblent – semblent seulement - détruire plus qu’elles ne soignent. Alors, une fois la mort présente, dans cette quête malhabile de la vérité, la faute à qui, la faute à quoi ? Tabac, stress, modernité, pollution, radioactivité, pas de chance, médecins incapables, les autres, soi-même… Tout y passe.

Le cancer, c’est la mort qui prend son temps, étrange temporalité qu’Emmanuelle de Boysson traduit dans son dernier roman, récit autobiographique déguisé, d’une fille au chevet d’une mère mourante. Le ton est juste, le sujet, émouvant, parfois insoutenable (tout dépendra de la proximité que le lecteur aura avec le sujet) et la plume, belle. L’auteur raconte l’avant, le pendant et l’après de cette disparition à petit feu, de cet amenuisement par des cellules «anarchistes» et des traitements chevronnés : invasions barbares... Aux pensées de la fille succèdent les passages du journal de la mère, comme un étrange dialogue de sourdes, tissé de silences, d’une incommunicabilité qui n’altère pourtant pas ce lien consanguin.

Eva, le temps du deuil, cherche auprès de Blanche, sa mère, quelques dernières preuves d’amour, un clin d’œil, un sourire, un mot. La morphine lui soutire un «je t’aime» dont on comprend qu’il ne la convainc pas. Elle a tort. Cette quête teintée d’égoïsme n’améliore pas l’incompréhension entre les deux femmes, comme deux générations sans passerelle, deux mondes à la dérive, la vie et la mort, la vie et la maladie, et une histoire étouffée entre elles deux, celle d’un oncle disparu, admiré par Eva, mais dont le souvenir est redouté par sa mère…

Eva joue une symphonie pathétique, limite indécente, auprès d’une morte-vive qu’elle soumet à la question : ai-je été digne de toi, bonne fille, aimable ? M’aimes-tu ? Cet égoïsme est outrepassé quand, au seuil de la mort, la narratrice se lance dans un anathème impropre sur le corps médical et la morphine. «J’aurais voulu veiller sur toi, mais pas ainsi, guetter l’instant où tu te déciderais à passer la main. Au lieu de tout cela, j’écoute tes cris étouffés. Ils voulaient t’éviter la souffrance, ils t’ont incarcérée» (p.146). «Pour les filles comme moi, l’euthanasie confisque l’instant d’apaisement tant attendu» (p.230), écrit-elle plus loin. Lignes dures où le deuil des vivants prime sur la mort de ceux qui partent. Or, les dernières heures d’un cancer s’appellent agonie et c’est bien une victoire de notre époque que de pouvoir soulager chimiquement ces souffrances. Car l’apaisement doit d’abord être celui de ceux qui s’en vont…

Mais Le Secret de ma mère est aussi l’accompagnement d’une mort difficile. Les mots embaument la défunte, et chaque page lue est comme une de ces bandelettes offrant les corps saints à l’éternité. C’est un bel hommage, une illustration du rapport mère-fille, à la fois fusionnel et concurrentiel, alchimie douteuse pour qui est de l’autre sexe, et qui vibre pour sa maman comme le jeune Pagnol pour sa mère… Ici, pas d’admiration, pas cette fascination d’un jeune prince pour sa régente mais le vitriol édulcoré dont peuvent parfois se servir les femmes : «Elles se haïssent mais elles se protègent», affirmait la Marquise de Lambert…

Roman dur, parfois maladroit mais écrit d’une plume trempée dans une encre littéraire chimiquement pure, c’est un récit qui se parcourt aisément et non sans plaisir. On réagit, on accompagne ou on désapprouve. Mission accomplie donc ! Les mots y expriment sincèrement les étapes du deuil : la tristesse, la colère, l’égoïsme, l’oubli et aussi ce «charme discret» de l’aristocratie moderne : les mondanités, les engagements caritatifs et ces visons pudiquement cachés dans des penderies à l’odeur de naphtaline… L’amour d’une fille pour sa mère y est plus abscons. Mais n’est-il pas hermétique par nature ?


Bruno Portesi
( Mis en ligne le 14/01/2004 )
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